Chapitre 9-1 : Joséphine

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( Sud Quercy 29 août 18 h 37)

Lors d'une sortie en Méhari, Samuel et Jo ont été attaqués par un petit groupe d'infestés. Pour sauver son amie, prise en otage, notre survivaliste a fait feu et tué deux membres du quatuor. Il s'attendait à ce que la jeune fille ne veuille plus le fréquenter mais celle-ci demande juste à prendre des leçons de tir. 

Leur relation reste toutefois très orageuse. Jo sent bien que Samuel se soucie plus de son intégration dans l'armée des Opposants à César que de son amour pour elle. Et puis, il y a la jolie Daphné...


Je pose mon menton sur mes genoux, mes yeux frileux fixés sur l'horizon. Cet abruti de Sam est drôlement en retard !

Tout part à vau-l'eau. J'en ai marre, marre, marre ! Pourquoi ça m'arrive à moi ?

Mon regard angoissé se dirige sur la vallée ; pivote ensuite vers le Tuc-Haut. Ma peau me picote.

Plus de portable, plus de télé, plus de musique, plus d'internet.

Je n'ai que Sam pour m'occuper, que Sam dans la tête, que Sam dans le corps.

Plus de shopping, plus de virée en boîte, plus de mec à draguer, plus de dispute avec les copines.

Je n'avais que Sam.

Mais putain, pourquoi ai-je employé le passé ?

Plus de clopes, plus de Haribo, plus de pilules contraceptives.

Les yeux sombres de Sam. Sa peau café au lait. Ses muscles à faire pâlir d'envie Monsieur Univers. Sa voix impérieuse. Ses propos ambigus. Un Néandertal. Un homophobe. Un misogyne.

Mais pourquoi chaque fois que je le vois, mes hormones sont-elles aux quatre cents coups ?

La petite boule de glace qui pèse sur mon cœur grandit, grandit. Que fait-il en ce moment ?

Au mieux, il traîne avec ses armes et Adler. Au pire, il louche sur les seins de Daphné !

Je me redresse d'un bond, me sentant blessée, trahie et en colère. La petite boule s'est transformée en iceberg. 

C'est trop tard, trop tard, trop tard !

Je me précipite au château. À l'ombre des parasols, assise sur un transat, la mère de Sam plume des oiseaux et dépèce des lapins, en compagnie de madame Adler et de la mère de Medhi.

Pourquoi Daphné n'est-elle pas avec elles ? La bouffe, c'est son boulot après tout !

— Vous savez pas où je pourrais trouver Sam ? demandé-je, l'air innocent.

Madame Adler me jette le genre de regard que maman me réserve parfois, puis sourit.

— Je l'ai pas revu depuis tôt ce matin, je crois qu'il est parti chasser avec Medhi.

Quelle conne de me mettre dans des états pas possibles pour ce débile ! Ce mec ne me réussit pas.

— Si vous voulez, je peux vous aider en l'attendant !

La mère de Sam m'adresse un regard ravi. Sans le vouloir, j'ai marqué un point avec la belle-mère. Je m'avance vers les trois femmes et les cadavres d'animaux. Figée sur place, je contemple les petits corps, muette d'horreur. Les dépouilles me rappellent celles des deux hommes que Sam a froidement descendus. Mais ces animaux étaient innocents, eux !

Les jambes en caoutchouc, je frissonne. Quand est-ce que j'apprendrai à me taire ?

En tout cas, je me suis trouvé une sacrée diversion ! Aucun dépit amoureux ni aucune jalousie mesquine ne pourront jamais résister à une telle puanteur : du sang âcre, de la viande capiteuse, des tripes pestilentielles, des abats incommodants...

Tueur de MondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant