- Vous pensez que ça va le faire ? demanda Jorge, qui commençait déjà à transpirer.
- Ouais, t'inquiète... répondit Zell avec un sourire narquois.
Arthur ne parla pas, mais il sourit. Sa main était posée sur le pommeau d'Excalibur.
Les cinq membres de l'équipe A étaient rassemblés dans une loge, au rez-de-chaussée du grand stade. Celui-ci avait été installé sur la place centrale de Marineford, à la vue de tous. En son centre se trouvait une arène circulaire, entourée de gradins où le public pouvait s'installer. Face à l'arène, en hauteur, trois loges avaient été bâties : celle de gauche pour les grands corsaires, celles de droites pour les « cinq grands » (les vice-amiraux les plus puissants et les plus célèbres de la Marine). Pourtant, alors qu'elle était encore vide, tous les regards étaient tournés vers la loge centrale, celle réservée aux trois amiraux et à l'amiral en chef.
La petite loge de l'équipe A se trouvait au rez-de-chaussée, face à l'arène, dans l'ombre. A leur droite, deux autres loges abritaient les membres des équipes B et C, leurs futurs adversaires. Déjà, les cinq jeunes soldats pouvaient sentir leur sang bouillir sous l'effet de l'excitation et de l'appréhension.
Myr avait été très clair : ce tournoi permettrait au gratin de la Marine, mais aussi au monde entier, d'admirer les progrès de ces recrues triées sur le volet. S'il ne s'agissait en apparence que de rencontres amicales, ces combats avaient malgré tout un enjeu : l'équipe qui en sortirait gagnante recevrait une bourse des plus généreuses. D'ailleurs, l'intégralité des affrontements serait retransmise par escargophone sur écrans géants, aux quatre coins du globe.
Le tournoi se déroulerait de la plus simple des manières : comme les recrues étaient au nombre de seize, elles seraient réparties en huit affrontements individuels. Les huit vainqueurs s'affronteront ensuite, puis les quatre recrues sorties victorieuses de ce nouveau round. Au terme de ce tournoi, il ne resterait que deux soldats, qui s'affronteront en finale pour le titre de vainqueur.
Arthur observait en détail les « cinq grands » : Myr était assis tout à gauche, sur un large fauteuil de velours bleu. Il discutait avec son grand ami Wilelm, le mentor de l'équipe B, un homme sympathique et rondouillard, dont les exploits étaient pourtant nombreux selon la rumeur. Leroy, toujours aussi calme et mesuré, était assis à leur droite, juste à côté du vice-amiral Bang, le directeur du G2.
- Quelqu'un sait qui est ce type, tout à droite ? demanda Arthur en pointant du doigt un homme au complet noir. A son manteau blanc, je devine que c'est un vice-amiral, mais je ne l'ai jamais vu...
- Je pense que c'est le vice-amiral Armstrong, répondit Haru. Il a récemment été promu directeur du G1, et a intégré le corps des cinq grands en remplacement du vice-amiral Edouard qui, lui, est devenu amiral.
- Je vois, répondit simplement Arthur. Il a l'air bien strict, avec sa raie de côté...
Avant qu'il ne puisse renchérir, des trompettes firent retentir leur souffle, et un murmure secoua l'assemblée : les trois amiraux rejoignaient leur tribune, accompagnés de l'amiral en chef.
Les amiraux étaient légendaires. Considérés comme les plus puissants soldats de la Marine, on les disait égaux aux Empereurs de l'océan. Depuis son enfance, Arthur avait été bercé par les récits de ces légendes vivantes.
La première était une femme mince et élégante, qui en dépit de son grand âge avait gardé toute la puissance et toute la fougue de sa jeunesse. On disait que son intelligence au combat n'avait d'égal que son grand cœur. L'amirale Momouma, « la jument mauve ».
- Elle est si belle... murmura Haru. Cette femme a inspiré des générations de jeunes filles à rejoindre la Marine. On raconte qu'elle a affronté chaque Empereur en combat singulier au moins une fois !
Les membres de l'équipe A la regardèrent avec admiration tandis qu'elle rejoignait son siège, et que le second amiral arrivait dans la loge.
C'était un homme râblé, à la carrure solide et aux muscles saillants. Sa longue barbe tombait jusqu'à ses pieds, et le soleil se reflétait sur son crâne dégarni. Malgré sa peau ridée comme une vieille prune, il imposait une aura de puissance brute absolument terrifiante. Il s'agissait de l'amiral Midorizo, « l'éléphant d'émeraude ».
- J'y crois pas, c'est lui ! s'exclama Arthur avec un cri d'excitation. On le considère comme le plus puissant des soldats de la Marine, la moitié des cellules d'Impel Down seraient pleines grâce à lui !
- Les rumeurs sur lui vont pourtant bon train... déclara Jun en s'avançant pour mieux apercevoir le vieil homme. J'ai entendu pas mal de choses en cuisine : on raconte qu'il se fait vieux, et qu'il est très malade. Apparemment, il envisage de partir bientôt à la retraite.
- Ah ? demanda Jorge. Encore un qui part en retraite. Avec Fujitako, il y a six mois, ça ferait deux en moins d'un an...
- En parlant de Fujitako, voilà son successeur ! s'écria Zell en pointant l'estrade du doigt.
Un homme, d'une grâce et d'une beauté absolu, regagnait son siège. Sa jeunesse tranchait avec ses deux prédécesseurs, car on l'eut dit âgé d'une quarantaine d'années à peine, mais l'aura de puissance qui se dégageait de lui imposait, encore une fois, le respect. Ses cheveux pâles tombaient en cascade sur son visage clair, ainsi que sur ses épaules. Sous son manteau blanc de fonction, on pouvait voir son torse musclé criblé de cicatrices. L'amiral Kuroryu, « le dragon noir ».
- Alors c'est lui, le légendaire Edouard ? demanda Jorge. Je n'arrive pas à croire que je le vois de mes propres yeux...
- L'idole de toute une génération, murmura Haru. Le plus puissant et le plus jeune des amiraux. C'est à dix-neuf ans qu'il a atteint le grade de vice-amiral et prit la direction du G1, ce qui est déjà un exploit sans précédent. Mais devenir amiral à son âge, vraiment... Quel homme !
Arthur restait sans voix. Il contemplait son héros, muet, le cœur battant, rêvant du jour où il pourrait se présenter à lui.
Une fois que les amiraux Momouma, Midorizo et Kuroryu furent installer, l'amiral en chef les rejoint : c'était un petit homme ridé et dégarni, marchant avec une canne de bois. On devinait à sa démarche et à ses airs qu'il était humble et sage, mais le spectre de sa puissance d'autrefois se lisait encore sur son visage maigre. Cela faisait plus de vingt ans qu'il dirigeait les forces de la Marine.
L'amiral en chef Seikou salua les trois amiraux, puis s'avança sur l'estrade, pour faire face à l'arène. Il attrapa l'escargophone qui l'attendait, et sa voix chevrotante résonna dans tout le stade :
- Marineford est une terre sacrée pour la Marine. Le cœur de notre organisation, mais aussi sa tête et ses bras. De nombreux soldats ont débuté leur carrière ici, avant de devenir des légendes, à jamais célébrées dans l'histoire. Mais comme vous le voyez, ces légendes sont bien âgées désormais ! dit-il en se désignant, ainsi que les amiraux, entraînant l'hilarité de l'assemblée. Une nouvelle vague de soldats se prépare, une génération plus prometteuse que jamais, les légendes de demain, destinées à prendre la relève. Si nous sommes rassemblés aujourd'hui, c'est pour assister à la naissance de cette nouvelle vague, pour contempler le potentiel et les progrès des enfants qui seront notre avenir. J'invite donc les directeurs de ce programme à se lever et à rejoindre l'arène pour accueillir leurs élèves.
Myr, Wilelm et Leroy se levèrent en vitesse, laissant Bang et Armstrong seuls dans la tribune des vice-amiraux. Lorsqu'ils atteignirent le centre de l'arène, un tonnerre d'applaudissements les accueillit, semblant rebondir dans les gradins du stade alors qu'ils saluaient avec humilité.
Le vice-amiral Bang, qui avait été choisi pour faire office de commentateur, récupéra l'escargophone que lui tendait l'amiral en chef dans ses énormes mains gantées et maladroites. Avec sa toison noire et ses membres proéminents, il ressemblait décidemment beaucoup à un gorille, songea Arthur.
- J'invite donc les seize recrues à se rassembler dans l'arène à mon appel, hurla-t-il dans le combiné. Commençons par l'équipe A !
- C'est à nous, déclara Jorge en poussant légèrement Arthur vers l'avant.
- Voici l'équipe du vice-amiral Myr, commenta Bang alors qu'un tonnerre d'applaudissement accueillait les cinq recrues. Celui qui seconde le vice-amiral : le commandant Arthur, chevalier à la lame d'or !
Arthur haussa le sourcil. Qui lui avait trouvé un surnom aussi dépassé ? Il trouva tout de suite la réponse en voyant le sourire niais de Myr...
- Ensuite, le lieutenant Madeira Zell, le charpentier prodige ! poursuivit Bang. Le lieutenant Haru, la vigie à l'œil de Lynx ! Le lieutenant Jun, la meilleure des cuisinières ! Et enfin, le lieutenant Jorge, le guerrier ursin qui manie la barre de leur navire !
Tous semblaient accablés par la platitude de leur surnom, et seul Jorge en semblait franchement ravi. Ils prirent place dans l'arène, en ligne, aux côtés de leur mentor. Lorsque les applaudissements cessèrent, Bang reprit le fil de sa présentation :
- Enchaînons directement avec l'équipe B ! Voici l'enfant prodige, qui seconde le vice-amiral Wilelm : le colonel Hana, que l'on nomme déjà « l'avenir de la Marine ».
Aussitôt, une vague assourdissante d'applaudissements retentit dans le stade, si bien que l'on eut du mal à entendre la grosse voix de Bang.
- Voilà ensuite le lieutenant Pinsch, médecin de génie ! Le lieutenant Vilot, cuisinier bondissant ! Le lieutenant Mirko, charpentier aux bras d'acier ! Et enfin le commandant Florenze, navigateur et épéiste talentueux !
« Colonel Hana » ? « Commandant Florenze » ? Arthur avait tiqué en entendant ces grades, supérieurs ou équivalents au sien. La seconde du vice-amiral Wilelm était donc déjà si avancée par rapport à lui... Le triomphe réservé à l'équipe B par le public rendit les membres de l'équipe A fort jaloux, et ils détournèrent le regard pour faire mine de rien, comme des enfants boudeurs.
- Vous avez entendu ? L'équipe B a un médecin, chuchota Haru à ses camarades en désignant discrètement un homme maigrichon, qui semblait mal à l'aise.
- « Lieutenant Pinsch, médecin de génie », murmura Zell. C'est bien comme ça que Bang l'a introduit, non ? Si seulement il avait été là sur l'île des cyclopes...
A ces mots, Zell massa sa nuque, où une araignée venimeuse avait planté ses crochets quelques mois plus tôt. Il avait bien failli ne pas en réchapper, faute d'avoir un médecin dans l'équipage.
- Et enfin, hurla Bang dans l'escargophone, je vous demande d'accueillir l'équipe C, menée par le vice-amiral Leroy.
Nouveau tonnerre d'applaudissements dans les gradins, mais bien moins affirmé que pour l'équipe B.
- Cette équipe compte non pas cinq, mais six membres, dont deux sont des utilisateurs de fruits du démon. Il va donc falloir surveiller leurs exploits de près ! Commençons par celui-ci qui seconde le vice-amiral : le colonel Hector ! Vient ensuite le lieutenant junior BBK, charpentier à la force brute ! Le lieutenant Jody Lee, sniper émérite ! Le lieutenant Omar, génie de la cuisine et des arts martiaux ! Le commandant Charlie Blue, trancheur de pirates ! Et enfin... Le commandant Kaju Da, apothicaire prodige !
Arthur manqua de s'étouffer : quelle injustice ! Non seulement l'équipe C avait un membre de plus que la leur, comptait deux utilisateurs de fruits du démon et un médecin, mais en plus Hector avait été élevé au rang de colonel, tout comme Hana. Du trio de tête de début d'année, il était le plus faiblement gradé...
- Qu'ils sont beaux, ces seize petits soldats en ligne ! commenta Bang avec excitation. Ils sont encore dans la fleur de l'âge, mais ils sont déjà si prometteurs... Nous allons pouvoir vous prouver leur potentiel dès à présent.
Aussitôt, deux jeunes clercs rejoignirent les seize recrues, un panier à la main. L'un d'entre eux s'approcha d'Arthur, et lui tendit : de toute évidence, il devait piocher, au hasard. Arthur plongea sa main dans le panier, sentit une multitude de petites boules glisser entre ses doigts, et en tira une. Elle était blanche et lisse, ne délivrait aucune information.
Quand tous les participants furent munis d'une boule, Bang les invita à souffler dessus. Arthur s'exécuta, et aussitôt, un numéro y apparu en lettres d'or, le numéro 2.
- Bien, commenta Bang. Je vais inviter toutes les recrues à regagner leur loge. Lorsque j'appellerai leur numéro, les deux recrues désignées s'avanceront dans l'arène et s'affronteront dans un match amical. Il ne s'agit en aucun cas de tuer, ni de blesser gravement : essayez simplement de neutraliser. Tout participant incapable de poursuivre le combat, sortant de l'arène ou déclarant forfait sera déclaré perdant. Le vainqueur accèdera quant à lui à la phase suivante.
Les seize recrues regagnèrent leur loge en silence, et échangèrent brièvement : tous craignaient de tomber contre quelqu'un de leur équipe, car l'objectif était évidemment d'aller le plus loin possible dans la compétition. Arthur avait donc tiré le numéro 2, et fort heureusement, ce ne fut le cas de personne dans l'équipe A : Zell avait le numéro 3, Haru le 4, Jorge le 6 et Jun le 8. Ils attendirent, tremblant, que la première paire soit appelée. Tandis qu'Arthur frémissait d'excitation, il put apercevoir Myr lui faire un clin d'œil depuis sa loge, dans les gradins.
...
En toute logique, le premier binôme appelé par le vice-amiral Bang fut celui ayant tiré le numéro 1. Le numéro devait donc symboliser l'ordre de passage.
Hector s'avança sur la scène et salua rapidement le public, par obligation et non par envie. Il fut rapidement rejoint par le charpentier de l'équipe B, un grand gaillard borgne et musclé du nom de Mirko.
- Le premier combat opposera donc le lieutenant Mirko, charpentier de l'équipe B, au colonel Hector, second de l'équipe C ! commenta Bang. Messieurs, lorsque le gong retentira, vous aurez quinze minutes pour conclure votre duel.
Les deux combattants se saluèrent, et l'on devina à l'entrain de Mirko qu'il était un jeune homme sympathique. Face à la froideur de Hector, le jeune charpentier souriait et semblait ravi de pouvoir révéler son potentiel à une aussi grande assemblée.
L'un des deux clercs s'approcha du gong avec une grande baguette et déclencha le combat aussitôt que les deux recrues furent en place.
L'affrontement ne dura pas plus de trente secondes. Mirko était grand, costaud et lourd, tandis que Hector, athlétique et agile, était des plus rapides : le charpentier tenta de se défendre en voyant son adversaire fondre sur lui, mais il fut immédiatement frappé au niveau de la poitrine et repoussé hors de l'arène. Bien qu'il fut encore conscient, tout son corps était à présent au-delà des limites imposées.
- Euh... C'est une victoire pour le commandant Hector ! s'écria l'arbitre, hagard.
- Quelle efficacité ! s'écria Bang avec surprise. Je pense que personne dans cette assemblée ne s'attendait à voir un match aussi rapide. Bon, eh bien... Le commandant Hector, de l'équipe B, accède à l'étape suivante !
Hector regagna la loge de son équipe sous un tonnerre d'applaudissements qui ne le fit même pas réagir.
- Et il n'a même pas eu besoin d'ôter son pendentif de granit marin... songea Arthur.
Le résultat n'aurait pas été différent si Hector avait utilisé les pouvoirs de son fruit du démon : le match n'en aurait été que plus rapide, et son adversaire aurait couru un grave danger.
Toujours allongé, Mirko se releva avec difficulté et tapa du poing sur le sol.
- Merde... Je suis vraiment désolé ! sanglota-t-il en regagnant sa loge.
- Ce n'est pas grave, Mirko, le consola calmement Hana. Nous savons tous ce que tu vaux ici.
Arthur entendait pour la première fois la voix de Hana, de la loge d'à côté. C'était une voix douce et posée, qui ne traduisait aucune panique, aucune colère. Elle semblait parfaitement contrôlée. Le jeune homme sursauta lorsque Jorge lui tapa sur l'épaule :
- C'est ton tour, vieux. Ils appellent la paire numéro 2 !
Arthur se ressaisit et ôta sa veste. Il laissa Peck à Zell, souffla un coup, et regagna l'arène, curieux de découvrir son adversaire.
Dès qu'il l'aperçut, il pouffa.
- Oh... Oh, non ! souffla BBK de sa voix lente et niaise.
- BBK, le salua Arthur en ricanant. Comment vas-tu, depuis le temps ? J'espère que tu t'es amélioré.
- Le second combat opposera le commandant Arthur, second de l'équipe A, au lieutenant junior BBK, charpentier de l'équipe C ! commenta Bang. En espérant que ce duel soit un peu plus long que le précédent...
Alors que le gong sonnait, et qu'Arthur dégainait, il se remémora sa précédente rencontre avec son adversaire, plusieurs mois auparavant. Hector et son acolyte BBK avaient capturé Peck, le verplume d'Arthur, pour attirer celui-ci dans un piège. Jaloux de sa place au classement, ils l'avaient affronté pour jauger sa puissance. Hector avait été assez fort pour lui tenir tête, mais BBK avait été écrasé en une fraction de seconde.
Une nouvelle fois, l'exploit se produisit : comme Hector lors du match précédent, Arthur vint à bout de son adversaire en un seul coup. BBK fut frappé par le plat de la lame au niveau de la gorge, sembla s'étrangler un instant, puis s'effondra, inconscient, sur le sol de l'arène. Il fallut une douzaine d'infirmiers pour soulever son énorme corps et l'emmener en dehors du stade : bien qu'il fut sauf et hors de dangers, il semblait malgré tout particulièrement groggy.
- Bon... commenta Bang. Un combat une nouvelle fois très rapide, qui permet à Arthur d'accéder à la phase suivante de la compétition.
On pouvait alors sentir un mélange d'amusement et d'agacement dans l'assemblée, qui espérait des combats spectaculaires et devait se contenter de rencontres bien rapides...
Lorsqu'Arthur regagna sa loge, il fut acclamé par son équipe, dont les membres le félicitèrent tour à tour. Cependant, Zell dut s'éclipser bien vite, car c'était à son tour de briller, en tant que membre de la paire numéro 3.
Il se retrouva nez à nez avec le médecin de l'équipe B.
- « Lieutenant Pinsch, médecin de génie », pas vrai ? déclara Zell pour reprendre la présentation de Bang. Mon gars, tu sais pas ce qui t'attend !
Pinsch était un jeune homme frêle et maigrichon, aux cheveux pâles et à l'allure maladive, et son teint ne fit que blêmir de plus belle lorsqu'il entendit les provocations de son adversaire.
- Je ... J'abandonne ! cria-t-il avant même que le gong ne retentisse.
- Vous abandonnez ? demanda l'arbitre, circonspect. Vous êtes conscient que cela entraînera votre disqua...
- Oui, oui ! le coupa Pinsch. J'en suis conscient !
Puis, sans rien ajouter, il salua Zell et regagna sa loge, comme un enfant terrifié.
- Eh bien... Le lieutenant Madeira Zell, charpentier de l'équipe A, accède à la phase suivante ! déclara Bang sans cacher son agacement. C'est pas vrai, on va avoir droit à un foutu combat, ou non ? maugréa-t-il, impatient.
Zell rejoignit son équipe, et l'on devina à son visage consterné qu'il était terriblement déçu. Le jeune charpentier était un mordu de combat, il aimait se battre et démontrer sa force. En voyant son visage atterré, Arthur et Jorge crurent mourir de rire.
Dans la loge des vice-amiraux, Myr était également plié en deux, pris d'un fou rire qui lui faisait monter les larmes aux yeux.
- Eh bah, Wilelm, c'est une bien belle équipe que tu as là ! Ah !
- C'est ça, moque toi ! déclara Wilelm en souriant aux plaisanteries de son ami. Pinsch n'a rien d'un combattant, il exècre la violence et l'affrontement, mais c'est un médecin de génie. Il nous a sauvé la mise à maintes reprises, tu sais.
- Ouais, je comprends, répondit Myr en essuyant ses yeux larmoyants. Il en faut, des gars comme ça...
...
Déjà, la quatrième paire se retrouvait dans l'arène. Haru caressait la tête de Daisy, son serpent Kuja, pour la rassurer. Aussitôt que le public l'avait aperçue, des murmures avaient traversé l'assemblée, même dans les loges les plus prestigieuses.
- Une Kuja, hein ? commenta Muay Tina dans la loge des corsaires. Ce n'est pas commun, encore moins dans la Marine.
Arlequin éclata d'un rire exagéré, presque hystérique.
- Oh ! Je veux la voir se battre ! Comme je suis curieux...
Tina le toisa en silence. Même parmi les corsaires, cet étrange clown provoquait le malaise... Un frisson parcourut ses bras nus, et elle réajusta sa cape sur ses épaules.
Haru devait faire face à la lieutenant Jody Lee, de l'équipe C, que Bang présenta comme une tireuse d'élite. Au-delà de ses capacités de visée, Jody était également la navigatrice de son équipe. Aussitôt arrivée sur le ring, elle tira de sa ceinture deux énormes pistolets à silex.
- Ne t'en fais pas ma belle, je les ai chargés de balles spéciales en caoutchouc. Ils ne te tueront pas, même s'ils risquent de te faire un peu mal, murmura-t-elle avec un clin d'œil en agitant sa longue chevelure rose.
- Ah oui ? Mes flèches sont les mêmes que d'habitude, pourtant... rétorqua Haru.
Bien que la jeune Kuja fut à son habitude calme et mesurée, elle adorait jouer le jeu de la provocation.
Dès que le gong retentit, Jody Lee fit feu sur son adversaire : les minuscules balles de caoutchouc fusèrent vers Haru, comme un déluge dur et puissant, mais la jeune femme parvint à esquiver tous les projectiles en roulant au sol. Jody en fut déconcertée : elle n'avait sans doute pas l'habitude d'affronter des adversaires ayant développer leur fluide de l'observation, songea Haru.
Forte de son expérience contre les snipers, la jeune Kuja sut, comme une évidence, comment elle devait opérer. Elle adopta la même technique que contre Sagittarius du Zodiaque : distraire, aveugler, frapper.
Tout en esquivant les multiples balles de Jody Lee, Haru tira trois flèches en l'air, qui retombèrent en pluie sur son adversaire.
- Ah ! s'écria Jody. Tu crois m'avoir comme ça ? Mais tes flèches sont trop lentes !
Aussitôt, elle leva ses pistolets et détruisit les flèches de bois avec ses balles de caoutchouc. Satisfaite, elle abaissa ses armes, cherchant du regard son adversaire pour faire feu sur elle, à nouveau. Mais Haru s'était approchée, bien plus que Lee ne le pensait. Elles étaient à présent si proches que la jeune lieutenant de l'équipe C eut d'abord du mal à voir son adversaire. « Merde ! Elle va frapper au corps à corps », pensa-t-elle en adoptant en vitesse une posture défensive.
Mais Haru, en fine stratège, avait anticipé cette réaction, et se contenta, d'un mouvement ample et vif, de faire glisser sa botte sur le sol de l'arène : aussitôt, un nuage de sable vola dans le visage de Jody, la faisant tousser et lui piquant les yeux. Son adversaire était déjà neutralisée, mais Haru voulait offrir au public le dénouement qu'il attendait : elle frappa Lee à l'estomac, de sa jambe gauche, et la jeune femme fut projetée hors du ring. Elle roula sur le sol, dans la poussière et sur le pavé, et toussa comme si elle allait s'étouffer.
- C'est une nouvelle victoire pour l'équipe A ! s'écria Bang. Déjà trois de ses cinq membres sont qualifiés pour la suite. Quelle domination ! On peut remercier la jeune Haru de nous avoir livré une superbe démonstration de pouvoir... Enfin !
Myr, dans les tribunes, applaudissait son élève avec fierté. Ils avaient tous progressé, et l'entraînement qu'ils avaient subi pendant les six derniers mois n'y était pas pour rien : leur douriki avait été considérablement développé. La domination de son équipe était totale.