• Chapitre 80 •

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Adan

Je me réveille en sursaut après m'être rendu compte de ma sieste involontaire.
Depuis combien de temps je patiente devant cette porte comme un idiot ? J'ai eu le temps de voir ses voisins me défigurer comme si je n'étais qu'un sauvage, avachi sur son paillasson. Je ne peux m'empêcher de me dire qu'elle est chez son amie ou son collègue blond car l'idée qu'elle puisse être dans les bras de ce type, me fout la trouille.
Rester ici ne changera rien, Brown. Si elle n'est pas là, elle n'est pas là...
Mon portable ne cesse de vibrer sous les messages inquiets de Flora qui me demande si tout va bien, si j'ai mangé ou même si j'ai dormi dans un lit cette fois. Pourtant, l'âge de mes cinq ans est passé et je n'ai certainement pas besoin d'elle pour me prendre en charge. Je ne suis pas un légume à qui il faut donner la cuillère !
J'envoie un pouce en l'air et range mon cellulaire dans la poche arrière de mon jean. La pluie ne s'est pas arrêtée, elle se déchaîne ce soir. Les taxis roulent toujours cependant...

— Vous êtes arrivé.
— Merci.
Je paie le chauffeur d'un billet de dix dollars et m'abrite sous les vieux balcons de l'immeuble décrépi, de l'eau s'écoule de mes cheveux pour rejoindre le tissu de mon t-shirt lui-même trempé.
Je marche dans le couloir et masse durement mes tempes, mon crâne semble peser une tonne aujourd'hui. Est-ce que j'ai chopé un rhume ?
Arrivé devant la porte de mon pseudo chez-moi, je me fige comme un piquet de marbre. Il y a une femme endormie et pas n'importe quelle femme d'ailleurs mais, Naomi...
Mon souffle s'accélère presque immédiatement. Je n'en crois pas mes yeux, que fait-elle là ? Comment a-t-elle su où je résidais et surtout que fait-elle endormie sur le sol, au pas de la porte ?
Je m'accroupis sans un bruit et tends la main pour dégager quelques mèches de ses cheveux qui recouvraient son beau visage. Que fais-tu là...
— Naomi ? Réveille-toi.
Je murmure et touche sa joue du bout des doigts. Finalement, elle est ici. Pas avec ce Charles mais ici, assoupie devant chez-moi.
Je caresse une nouvelle fois sa joue, retrouvant également la douceur de sa peau et glisse tendrement.
— Hé, tu ne peux pas rester là, tu sais ?
Elle fronce le nez et grogne de désapprobation, comme le ferait une enfant ou un chaton profondément endormi.
Je glousse et passe un bras sous ses genoux puis, le long de son dos. Elle est trempée ! Fait chier.
— Allez, viens par là marmotte.
J'enfonce la clef dans la serrure et fiche un coup de pied à la porte afin de rentrer sans trop de complications. Naomi laisse tomber sa joue contre ma poitrine et je ne peux retenir le courant électrique qui vient me broyer le corps.
Sa chaleur, son visage, son odeur...Elle m'a terriblement manqué.
J'entre dans la chambre presque inhabitée et la dépose sur le lit. Malgré le fait que je me vois mal la déshabiller, il est hors de question qu'elle dorme avec ses vêtements humides. Elle risque d'attraper la mort !
Les doigts tremblants, je dégage les vêtements qu'elle porte pour l'envelopper dans un pull à moi. Il est assez long pour cacher ses cuisses.
La nichant sous les couvertures, je contemple encore plusieurs minutes son visage endormi, elle est mon œuvre d'art la plus précieuse, si parfaite. Comment j'ai pu te quitter ne serait-ce qu'une seconde ?
— Adan...souffle-t-elle, somnolente.
— Est-ce que tu rêves de moi, Anderson ?
Je ricane tendrement et quitte la pièce, préférant la laisser se reposer quelques heures.
Je l'ai retrouvée...enfin.

Naomi

Je change de position pour la centième fois et ouvre les yeux. La pièce est plongée dans le noir, je n'y vois rien du tout. Suis-je rentrée chez moi ?
Je tends le bras à ma droite où il devrait y avoir la table de chevet mais, la seule chose que j'arrive à faire, c'est bousculer de lourds objets qui s'écrasent contre le planché dans un vacarme assourdissant. Mince...
J'extirpe mes jambes des couvertures et retrouve le sol, la chaleur du bois réchauffe mes orteils. Je ne suis pas nue mais couverte d'un pull en laine, d'où est-ce que ça sort ?
Je tends les bras devant moi adoptant la technique de l'aveugle et touche à peu près tout ce qu'il se trouve sur mon passage.
Après mainte et mainte tapotage sur les murs, je finis par mettre la main sur une poignée de porte. La porte ne devrait pas être ici, putain. Je ne suis pas chez moi, bordel je ne suis pas chez moi !
Je passe la tête à travers l'embrasure et observe le salon, éclairé par une simple lampe de bureau.
Je me glisse en dehors de la chambre silencieuse et avance dans la pièce sur la pointe des pieds.
Mon regard s'arrête immédiatement sur le dos d'un homme affalé sur un petit bureau de bois.
Est-ce que c'est...?
— Adan ? Je demande, peu sûre de moi.
Il n'émet aucun mouvement, seul sa respiration difficile se fait entendre.
Je m'approche et penche la tête afin d'observer son visage. Lorsque ses traits apparaissent sous mes yeux, l'idée de plaquer mes mains contre ma bouche me paraît tout à fait adaptée.
Les larmes se logent au creux de mes yeux aussi rapides qu'une chute d'eau en forêt. Ce n'est pas croyable, il est bien là.
Ce sentiment presque qu'incontrôlable que ressent mon cœur après tant de semaines sans lui me fissure en deux.
Je tends la main vers son visage. J'ai besoin de le toucher, de le sentir proche de moi. Je ne veux pas que cela soit un rêve ni une quelconque illusion de ma part. Mon cerveau serait capable de me jouer des tours !
Ma paume capture sa joue mais, à ma grande surprise, il est bouillant.
— Mon Dieu Adan, tu as de la fièvre ! m'exclamé-je brusquement.

•••


Haut Niveau - Tome 1 -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant