Haut Niveau - Tome 1 -

• Chapitre 6 •

Naomi

— Mhm...
C'est la tête lourde comme une pastèque que je me relève du canapé.
Je ne devrais peut-être pas aller travailler aujourd'hui. J'ai l'impression qu'une partie de moi, se décroche au fur et à mesure que je fais un pas devant l'autre mais, je me vois mal manquer le travail alors qu'hier je suis arrivée en retard.
Rick ne va pas être très content. Surtout qu'à cause de ses déplacements de la veille, il n'a pas pu me disputer sur mon retard. Alors, si je ne suis pas présente aujourd'hui, je risque de creuser ma tombe plus tôt que prévu.
C'est avec un effort qui me semble insurmontable, que je me redresse du canapé pour aller prendre une douche chaude bien méritée.
J'enfile un chemisier blanc noué au col par un nœud noir et une jupe rose pale évasée.
J'attache ensuite mes cheveux en une queue de cheval bien serrée et dépose un chaste baiser sur le crâne de Gribouille.

En poussant les grandes portes vitrées, l'air chaud des climatisations se frappe contre mes joues. La jeune femme aux longs cheveux bruns, assise derrière le grand comptoir en marbre blanc, lève les yeux dans ma direction.
Elle se redresse et sourit. C'est à moi qu'elle sourie ?
Je jette un coup d'œil penaud derrière moi. Personne...
Sans trop savoir quoi faire, je lui souris en retour et fais un pas en avant. Mais avant d'avoir la possibilité de m'approcher des ascenseurs, elle m'interpelle.
— Mademoiselle Anderson ?
Elle connaît mon nom ? Je n'ai pas le souvenir de lui avoir déjà parlé.
— Il serait préférable de prendre vos affaires avant de...Monter. Mes affaires... ?
— E...Excusez-moi ?
Je bafouille.
Elle semble embarrassée voire contrariée de ma réponse.
— Je me suis permise d'amener vos affaires ici, pour votre...Bureau.
Mon bureau ? De quoi parle-t-elle ?
— De quelles affaires...Et, de quel bureau parlez-vous ?
Elle sourit de toutes ses dents puis contourne le meuble avec élégance. Juchée sur ses talons hauts, elle lance :
— Suivez-moi, je vous prie.
Elle attrape dans ses bras, une large boîte en carton et me la tend. Je la prends sans trop savoir quoi dire...Elle fait erreur sur la personne, je crois.
Je la suis dans l'ascenseur et l'interroge, toujours confuse par la situation qui se déroule sous mes yeux.
— Attendez, pouvez-vous me dire ce qu'il se passe ?
— N'avez-vous pas reçu le mail ? Quel mail bon sang !
— Non, je n'ai reçu aucun mail.
— Êtes-vous bien allée à la réunion ?
— Oui, je...
— Votre adresse mail est bien "Anderson.Naomi@emailB'SE.com" ? Me coupe-t-elle.
— Oui mais...Laissez-moi en placer une !
— Vous êtes l'assistante de monsieur Brown, directeur de la Brown'sEntreprise. Dit-elle en tordant ses lèvres pour un sourire innocent.
J'ouvre la bouche plusieurs fois, laissant passer de légers bruits d'incompréhension. Moi ? Son assistante ? Est-ce que c'est une mauvaise plaisanterie ?
— Il doit y avoir une erreur. Je n'ai pas été prévenue et puis, ce poste ne me correspond pas du tout...
Je suis abasourdie. Mes mots fusent plus rapidement qu'une Formule 1 sur une piste de course. Elle me dévisage, stupéfaite.
— Il n'y a pas d'erreur mademoiselle, un mail vous a été envoyé la veille. Monsieur Brown a longuement étudié votre dossier et les compétences tenues sont tout à fait correctes pour que vous assistiez ce poste. Si je peux me permettre, c'est une très belle opportunité pour vous mademoiselle.
Une très belle opportunité ? A-t-elle au moins conscience de la personne qu'est Adan Brown ?
Je déglutis péniblement.
— C'est...Il...Monsieur Brown...Il...Est.
Je patauge dans le semoule et l'ascenseur s'arrête, mettant fin à cette conversation.
La jeune femme sort de l'ascenseur sans m'attendre. Je l'imite et répète que c'est un énorme malentendu mais elle a l'air de bien se ficher de ce que je peux dire.
Elle finit par ouvrir une porte en bois ébène. J'entre gauchement à l'intérieur et analyse la pièce au complet. C'est un grand bureau, vide. — Où suis-je ?
— Dans votre bureau mademoiselle. Quoi ? Mon bureau ? Ce n'est pas un bureau ça, c'est une suite dans un palace ! Vous pourrez par la suite, modifier la décoration à votre guise. Je vous laisse vous installer, monsieur Brown ne devrait pas tarder. Oh ! Et, tenez. Elle pose sur le bureau, un lourd bouquin. C'est quoi ça ? Je vous conseille de le lire attentivement, vous y trouverez toutes les choses à savoir sur le fonctionnement de ce poste et également les choses à respecter. Je vous souhaite une bonne journée, mademoiselle.
Non, ne m'abandonnez pas comme ça ! Implore ma conscience, les mains jointes.
Je vais pour l'interrompre mais, elle détale comme un lapin.
Me voilà seule, dans un immense bureau dont le sol pourrait me servir d'assiette. Comment en suis-je arrivée là ? Rick était-il au courant ? Là tout de suite, attendre n'est pas la solution. Il me faut des réponses !
Rick doit être au courant de tout ça, je dois lui en parler le plus rapidement possible.
Je dépose le lourd carton sur un coin du bureau et sors de la pièce d'un pas décidé. Il est hors de question que je sois son assistante, il faudra qu'il se trouve quelqu'un d'assez docile pour suivre ses moindres petites directions stupides ! Fourré dans un costume hors de prix, cet homme se croit au dessus de tout le monde. C'est furieusement énervant...
Arrivée à mon étage, je fonce dans l'open Space comme une lionne perdue dans la savane. Mes collègues me regardent d'un œil indiscret.
Je m'arrête à mon bureau, le cœur battant.
Il est vide...Complètement vide. Qu'est-ce que c'est que ça ? Je reste figée quelques secondes avant de me faire surprendre par une voix féminine.
— Je peux t'aider ?
Je tombe nez à nez avec une jeune femme blonde, au regard espiègle.
— Oh...Euh.
— Jenna ! S'exclame-t-elle soudainement, aillant remarqué mon trouble.
Elle me tend la main avec un grand sourire, je l'accueille et essaye de lui en offrir un en retour mais, ce n'est pas gagné.
— Enchantée Jenna, je...Naomi. Dis-je embarrassée, tu...Viens d'arriver ici ?
— Oui, c'est mon premier jour.
J'ouvre la bouche pour lui répondre la forte voix de mon ami, me coupe l'herbe sous le pied.
— Naomi !
— Jeff...Je murmure, toujours sous le choc de voir mon espace adoré, complètement désert.
Il me fonce dessus à grandes enjambées, les yeux exorbités.
— C'est quoi ce bordel ? T'es la nouvelle secrétaire de direction ?
Je le dévisage sans moi-même comprendre ce qu'il se passe. Secrétaire de quoi ?
— Je ne sais pas, une femme m'a parlé d'un poste, d'un bureau mais j'ai aucune idée de...
— Rick s'est enfermé dans son bureau, impossible de le voir.
Dans son bureau ?
Laissant la panique et la confusion prendre part en moi, je me précipite vers la pièce aux stores fermés. J'ouvre vigoureusement la porte de mon manager et écarquille les yeux en remarquant la présence d'Adan, posté devant la baie vitrée. Il se retourne immédiatement après le boucan que je viens d'émettre.
— Naomi. S'étonne Rick, peiné.
— Mademoiselle Anderson, bonjour. Bonjour ? C'est tout ce qu'il a à ma dire après le chantier qu'il met dans ma vie !
Mon regard passe de Rick à Adan.
— Entre Naomi et ferme la porte, s'il te plaît.
J'obéis. Mon souffle se fait de plus en plus court tandis que, mon corps se tend comme un arc. J'ai envie d'hurler sur ce type avec une telle puissance que mon souffle lui décollera les poils du crâne.
— Je suppose que tu es au courant de la situation ? J'acquiesce vivement la tête. Si tu avais ouvert ta boîte mail, ça aurait été plus simple.
— À partir de ce jour, vous êtes mon assistante. Vous allez devoir gérer des dossiers, des contrats et des signatures, vous m'assisterez et m'accompagnerez lors des voyages d'affaire et...
— Navrée de vous dire cela, monsieur mais je vais devoir refuser.
Je l'interrompe.
Il ouvre la bouche et pousse un léger rire, narquois. Mes yeux dans les siens, je ne faiblis pas. Si tu crois que je vais accepter aussi vite, tu te fourres le doigt dans l'œil.
Il serre la mâchoire, croise les bras contre sa poitrine et réplique avec omnipotence.
— Vous n'êtes pas vraiment en position de refuser. Quoi ?

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