• Chapitre 2 •

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Naomi

Contrairement à son père. Il ne sourit pas. Il se contente juste de se placer derrière le pupitre, face à nous, sans la moindre expression.
Je suis comme paralysée par la peur ou impressionnée par l'assurance qu'il dégage.
— Bonjour à tous, c'est un plaisir d'être face à vous aujourd'hui. Je ne vais pas m'attarder sur les questions inutiles comme "Qui êtes-vous ?" "Quel âge avez-vous ?" ou encore "Êtes-vous célibataire ?" plaisante-t-il, faisant glousser les quelques femmes présentes. Si je me tiens là, face à vous c'est pour vous montrer tout l'engagement et la détermination que j'ai en ma possession. J'aimerais aborder quelques points cruciaux avec vous, allumez le tableau je vous prie.
Lorsqu'une femme apparaît dans le dos de l'homme. Je reprends peu à peu mes esprits.
Il s'approche du grand tableau électrique et pointe du bout de son doigt, une courbe orangée.
— Ce que je vous montre sur ce graphique, est la position que nous avons en ce jour. C'est une bonne place pour certains mais, cela reste insignifiant. Si nous voulons améliorer nos méthodes, nos actions et nos bénéfices. La place qu'il faut avoir est celle-ci.
La plus haute...Si vous pensez que cela est impossible, c'est que votre place n'est pas ici. Ce que je veux à présent, ce n'est pas du "bon boulot" ni du "très bon boulot" mais de l'excellence, je suis persuadé que nous en sommes capables, merci.
Un tonnerre d'applaudissements résonne dans la pièce mais, cette fois-ci mes mains restent collées le long de mon corps. Mes yeux sont rivés sur cet homme, aux traits congelés par la froideur.
C'était un discours très impressionnant, convaincant et encourageant mais, mon cerveau reste concentré sur une tout autre chose...À quelle sauce, vais-je être dévorée ?
Lorsque la foule se dissipe dans la grande salle, l'ambiance se calme progressivement. J'observe du coin de l'œil tous les binômes qui vont serrer la main d'Adan Brown avec sympathie. Ce dernier leur répond d'un simple signe de tête.
Je me rue sur le bras de Jeff et le pousse dans un coin de la pièce, il est hors de question que je me présente face à lui.
— Qu'est-ce que tu fous Naomi ? s'étonne-t-il.
— Rien, mens-je, j'ai simplement envie d'avoir un peu de silence.
— Quoi ? Il faut que l'on prévienne Rick, viens.
— Non ! m'écrié-je, il ne faut pas qu'il me voit...
— Qui ça ? Rick ? Je plaisantais lorsque que je t'ai dit de te préparer, il...
— Non, pas Rick...le coupé-je en baissant les yeux, honteuse. Notre nouveau boss.
— Pourquoi ? Tu le connais ? T'as couché avec lui, c'est ça.
— Enlève ce vieux sourire salace de ton visage, je m'irrite avant de reprendre d'une petite voix ; En arrivant, j'ai eu un petit accident avec quelqu'un que j'ai vaguement..."insulté" et pour je ne sais quelle raison, il se trouve que ce quelqu'un soit Adan Brown.
Le dire à voix haute, me trouble encore plus. J'ai insulté l'homme le plus puissant ici présent, comment puis-je échapper au terrible sort qui m'attend ? Si seulement je m'étais tue...
— Putain, t'es dans de beaux draps. Sympa Jeff, remue le couteau dans la plaie...Écoute Nao, tu sais que cette prime compte vraiment beaucoup pour moi. Je dois et j'ai besoin de me présenter à monsieur Brown.
— Je sais Jeff, je ne veux pas t'enlever cette chance alors...
— Bon sang, vous êtes là. Je vous ai cherchés partout ! lance Rick d'une voix soulagée, j'essaie d'intervenir, mais il pivote vers moi avec un regard cinglant.
— Naomi on reparlera de ton retard dans mon bureau. Adan Brown est prêt à vous recevoir, faites bonne impression.
Mon sang ne fait qu'un tour, une grande panique me prend aux tripes. Prions pour qu'il n'ait pas aperçu mon visage...Penses-tu ! glousse ma conscience, un bol de pop-corn dans les bras.
La grande main de Rick se pose au creux de mon dos, j'ai la terrible impression qu'elle est couverte d'épines qui, s'enfoncent peu à peu dans ma chair à chaque pas que j'émets.
Plus que quelques mètres avant d'arriver face à mon bourreau.
Les deux femmes qui discutaient avec Adan, lui serrent la main et s'en vont. Nous nous retrouvons l'un en face de l'autre, dans un grand silence orageux.
Je ne saurais comment interpréter son regard. Un mélange entre la surprise, la colère et la malice, raison de plus pour comprimer ma poitrine. Son regard me sonde, chaque partie de mon malaise est exposée à ses yeux d'une couleur d'acier.
— Monsieur Brown. Je me présente, Rick Bills directeur en marketing et communication, se présente-t-il sans être impressionné par l'homme en face de lui. Votre discours était tout bonnement admirable.
— Merci, monsieur Bills.
Un silence se faufile entre nous, je danse d'un pied à l'autre en évitant à tout prix, le regard ténébreux de cet homme à la beauté ensorcelante.
— Et vous, quel est votre nom ?
Il brise ce terrible silence, me faisant relever la tête. Lorsque je croise son regard, je comprends qu'il s'adresse à moi.
— Euh...Naomi Anderson, bredouillé-je, je travaille aussi dans le marketing et la communication.
J'ai l'impression d'être une enfant, ma voix faible et mal assurée doit le faire jubiler.
— Naomi Anderson.
Il répète mon nom sans me lâcher du regard. J'y plonge, comme dans un océan noirci par la profondeur, cet homme est terriblement...Captivant.
— Enchanté. conclut-il.
Il me tend sa large main avec un sourire en coin. Je papillonne des yeux en essayant de me défaire de son emprise mais, c'est un pur échec. Son regard me capture, m'encercle de ronces et m'écrase de plus en plus, entaillant ce qu'il me reste de courage. Pourquoi est-ce qu'il me rend aussi confuse ? Reprends-toi bon sang !
Je détourne les yeux et glisse ma paume au creux de la sienne, sa peau est froide contrairement à la mienne. N'y a-t-il pas une chose qui n'est pas glaciale chez cet homme ?
Un frisson me traverse l'échine. Je fuis cette sensation et retire vivement ma main. Son regard m'étudie, pourquoi me regarde-t-il comme ça ? Mais, surtout pourquoi je ressens tant de choses en sa présence ?
— Monsieur Bills, j'aimerais en savoir plus sur ce binôme.
— Bien sûr.
Je ne parviens plus à entendre la voix de Rick, ni celle de Jeff. Seuls les battements de mon cœur se font entendre. Un vertige vient brouiller ma vision, je cligne plusieurs fois des yeux, essayant de me remettre les idées en place. Mon manque de sommeil a décidé de faire son apparition à ce moment précis, comme pour se venger...
— N'est-ce pas, Naomi ?
Je reviens à moi, suite aux trois regards interrogateurs qui me défigurent.
— Excusez-moi, vous disiez ?
— Nous parlions du marché de Ansoft, qui t'a beaucoup intéressée. souligne Rick, le regard pétillant.
— Oh, oui effectivement.
Habituellement, je suis plus loquace mais la situation ne s'y prête pas vraiment. Rick, Jeff et monsieur Brown se parlent continuellement.
Il n'y a que moi qui suis devenue muette.
Ce n'est pas vraiment mon genre de me taire si facilement. Après tout il ne m'a pas fait de remarque particulière alors pourquoi mon esprit semble-t-il si embrouillé ? Je me pince la peau plusieurs fois et souffle un bon coup.
Le fait qu'il soit si près de moi me permet de l'observer un peu plus. Les coutures de son costume me donnent un avant goût du prix. Le mystère l'encercle, la noirceur de ses cheveux et de ses vêtements éloigne toute personne voulant en apprendre plus sur lui.
La seule chose qui puisse ne pas être impénétrable sont, ses yeux. D'une couleur si claire, si argentée. Il n'y a pas une seule once de brun ou de bleu, c'est...Magnifique.
Après plusieurs minutes à dialoguer sur les nombreuses choses que nous avons faites Jeff et moi. Un homme à la carrure imposante se penche à l'oreille d'Adan. Ses traits deviennent plus durs.
Sûrement une mauvaise nouvelle...
— Toutes mes excuses monsieur Bills, je dois m'éclipser. Ça a été un plaisir.
Il serre énergiquement la main de Rick, se tourne vers Jeff pour une autre poignée de main et finit par se tourner face à moi. J'accroche son regard sans me défaire ce qui me semble, le fait sourire.
Pour être honnête, ce tout premier sourire ne me plaît pas. J'ai comme l'impression qu'il me nargue, il sait qu'il a tous les droits pour me virer et ça me met sérieusement en rogne.
— Mademoiselle Anderson.
— Monsieur Brown. dis-je d'un ton sec.
Il relâche ma main et s'éloigne adroitement vers un petit groupe de personnes. Mes poumons semblent se libérer d'un poids.
C'est comme  si durant notre échange, mon souffle s'était coupé. Je prends de grandes inspirations tout en accorant son dos.
Qui est cet homme, nom de Dieu...

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Haut Niveau - Tome 1 -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant