Terre de Sorciers- Tome 1

Chapitre 45

Grimelin avait promis qu'il me révèlerait tout ce qu'il savait au sujet de ma naissance et de mes parents après la cérémonie, et j'étais encore plus impatient d'entendre ses révélations maintenant que j'avais découvert mon nouveau prénom. Dès que j'eus fermé la porte, je ne lui cachai pas mon mécontentement.

«  Je vous écoute, dis-je, agressivement.

Il s'assit tranquillement dans le seul fauteuil de ma chambre, et me fit signe d'en faire autant. Je refusai d'un signe de tête.

− J'ai une longue histoire à te raconter et nous n'avons pas énormément de temps puisqu'un banquet est prévu en ton honneur. Tu te dois d'y être à l'heure.

Je finis par obtempérer et pris place sur le lit. Il prit un moment pour se concentrer puis commença :

−Ta mère s'appelait Gwynwen.

Je répondis en haussant les épaules :

−.La seule Gwynwen que je connaisse était reine !

− En effet, répondit-il. C'était bien elle. Il a existé peu de personnes en ce monde ayant porté ce prénom, c'est vrai. Je te raconterai pourquoi elle s'appelait ainsi une autre fois si tu veux bien. En attendant, j'aimerais que tu ne m'interrompes pas à tout bout de champ, sinon je n'aurai pas le temps de terminer. Est ce que je peux poursuivre maintenant ? »

Je hochai la tête tout en essayant de digérer cette première information de taille : ma mère n'était autre qu'une reine mais, connaissant un peu mon Histoire du Lanwen, certains détails ne collaient pas vraiment. Grimelin avait, comme à son habitude, entendu mes pensées, et jugea utile de me préciser :

− Ecoute mon récit du début à la fin, et nombre de tes questions trouveront des réponses. Si ce n'est pas le cas, je te promets de répondre à toutes tes interrogations.

Il marqua une nouvelle pause, puis il reprit :

− Bien. Sache tout d'abord que ta mère, avant d'être une reine, était surtout une puissante sorcière, et j'aurai l'occasion de te parler de ses nombreux talents à d'autres occasions. Personne, à part le roi Kerwen et moi-même ne connaissait ses pouvoirs. A cette époque, comme tu dois le savoir, nous étions en conflit avec les Langreen. Le roi Kriswendall avait déclaré la guerre au Lanwen depuis quelques années, car il en convoitait le trône, ainsi que tous ses prédécesseurs depuis Wendall, fils de Wen le Grand.

Ta mère, grâce à la magie qui coulait en elle, savait qu'elle attendait deux garçons. Nous avions jugé qu'il nous fallait garder le secret à ce sujet. En effet, tu dois apprendre que les souverains, comme leurs héritiers potentiels sont fréquemment la cible de nombreuses attaques, car leur trône est bien souvent convoité par de nombreuses personnes.

Alors qu'elle était enceinte de cinq mois, Gwynwen m'apprit qu'elle ne survivrait pas à la naissance de ses enfants. En tant que sorcière, elle s'était aperçue qu'on l'empoisonnait, mais ignorait qui et comment. Cela s'était fait de façon si insidieuse qu'elle avait mis du temps à s'en apercevoir, et lorsqu'elle le fit, il était trop tard. Malgré ses dons de prescience et son intelligence, elle ne put déterminer par quel moyen on lui faisait ingurgiter la substance en cause. Malgré toutes nos recherches, nous ne pûmes trouver d'antidote, et ne trouvâmes pas, non plus le ou les coupables. Nous découvrîmes cependant la substance qui la rongeait en secret et découvrîmes que d'une façon ou d'une autre, elle était obligée de la supporter jusqu'à la fin ; un sevrage dans son état lui aurait été fatal ainsi qu'aux enfants qu'elle portait. Elle dut choisir pour lequel de vous deux elle devait se battre car sa magie, quoique puissante ne pouvait combattre les effets dévastateurs du poison pendant plusieurs mois pour deux petits. Elle supporta donc durant tout le reste de sa grossesse les assauts de ce lent poison en veillant à ce que l'un de vous vive jusqu'au bout. Elle s'affaiblissait de jour en jour, mais elle répétait que leurs ennemis ne t'auraient pas. J'ai découvert bien plus tard, que c'était une chambrière, espionne achetée par le roi du Langreen, qui l'avait empoisonnée à petit feu grâce à l'aide d'un mage noir auprès de qui elle se fournissait la préparation mortelle. J'ai veillé à ce qu'elle meure mystérieusement quelques années plus tard, mais j'ignore qui fut le mage noir en question.