Chapitre 31

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Je m'éveillai dans un lit moelleux. Ma tête était lourde. Je sentis que l'on me mordillait le lobe de l'oreille. Milie !

Meywen et Wynie étaient là aussi, le regard inquiet. Lorsqu'ils me virent ouvrir les yeux, Wynie partit en courant sans un mot. Meywen me sourit.

« Alors, Sorcier, on fait des frayeurs à ses amis ? Quoiqu'il en soit, bon retour à Lach'Khan.

Je regardai autour de moi. La chambre était en désordre, mais elle était spacieuse et claire. Je n'avais jamais vu une telle chambre en dehors du château. Meywen y semblait à l'aise, habitué qu'il avait été au confort, mais, paradoxalement, je n'aurais pu en dire autant. Le lit était agréable, mais je ne m'y sentais pas à ma place. Je voulus me lever, mais j'esquissai à peine un geste que tout mon corps protesta violemment. Meywen me repoussa doucement sur l'oreiller :

− Du calme, me dit-il. D'après ce que m'a dit Grimelin, tu as accompli un exploit l'autre soir avec Corwen, et c'est un miracle que tu sois encore vivant. »

J'aurais aimé répondre et en savoir un peu plus sur ce que j'avais raté depuis ce soir là, avoir des détails sur la bataille à Wenlach', mais parler me semblait au dessus de mes forces.

Meywen, constatant ma faiblesse, reprit :

« Wynie est allée chercher Grimelin.

J'ouvris les yeux de surprise.

− Oui, nous avons réussi à le libérer, ce fut une sacrée bataille, et la sorcière était folle de rage, crois moi. Pour l'instant, il est avec Corwen. Tu sais, nous nous sommes fait beaucoup de soucis pour vous deux et Wynie n'arrêtait pas de pleurer surtout quand elle venait te voir ; je crois qu'elle est amoureuse de toi. C'est bien un truc de fille, ça ! »

Je fermai les yeux d'un air accablé. Je n'avais pas la force de protester, et Meywen l'avait compris. Il souriait.

« T'inquiète pas, ça lui passera continua-t-il en riant franchement cette fois.

Grimelin entra dans la chambre à ce moment là. Il fit signe au Prince de partir et nous restâmes seuls.

− Alors petit, comment te sens-tu ?

Je répondis par un vague geste de la main. J'aurais aimé le serrer dans mes bras tant j'étais heureux de le revoir, mais même si j'avais été valide je n'aurais pas osé.

− Laisse-moi t'examiner, alors.

Il souleva mes couvertures et passa ses mains sur toutes les parties de mon corps, ainsi que je l'avais fait pour Corwen. Je dus prendre un air étonné car il m'expliqua :

− Ce que tu as fait avec ton ami, c'était de la folie pour qui n'est pas formé à l'art de la guérison. Tu aurais pu y rester. Toutefois, je dois avouer bien à contrecœur, que sans cela, il n'aurait pu supporter le voyage. Je n'aurais pu accomplir ce que tu as fait ce soir là. J'étais alors moi aussi très faible et nous n'avions pas vraiment le temps de nous attarder au pied du château. Grâce à toi, ses blessures sont en voie de guérison, et il sera bientôt sur pied. En absorbant sa douleur, car c'est ce que tu as fait, tu as permis à son corps de récupérer suffisamment pour se reconstruire. Je n'aurais rien pu faire sans cela. Ce qui m'intrigue, c'est comment tu as su ce qu'il fallait faire. »

Il posa sur moi son regard interrogateur. Je voulus lui répondre par la pensée mais j'eus l'impression qu'un éclair traversait ma tête de part en part. Grimelin avait entendu mon essai.

« Tu es incapable de komkrin'h pour l'instant. Cela reviendra, et alors tu pourras répondre à toutes mes questions.

En parlant, il avait poursuivi son examen et dit pour conclure :

− Tu nous as fait une belle peur, mais tu es plus costaud que tu n'en as l'air, comme ton ami. Vous faites une belle pair tous les deux ! Maintenant tu vas te reposer, tu n'as besoin que de cela. Nous avons beaucoup de choses à nous dire, mais cela attendra que tu sois complètement rétabli. »

Je passai ainsi plusieurs jours entre le sommeil et l'éveil. Mon esprit m'emmenait souvent voir Maïwyna dans le monde qu'affectionnait tant mon amie d'autrefois. La fillette était malheureuse et j'aurais aimé pouvoir l'aider. Elle dessinait sans arrêt, et tout ce qu'elle tentait de représenter me rappelait des paysages ou des détails de Castelach'. Il ne pouvait s'agir d'une simple coïncidence.

Régulièrement, lorsque je m'éveillai de mes étranges songes voyageurs, Meywen et Wynie se trouvaient à mon chevet. J'entraperçus également Dame Nokt et Grimelin à plusieurs reprises, et je crus même entendre le vieil Owen du fond de mon sommeil !

J'avais perdu le fil du temps et j'ignore combien de temps il me fallut pour commencer à émerger vraiment de cette léthargie perpétuelle.

Je finis cependant, par retrouver peu à peu quelques forces et je pus recommencer à parler. Je demandais régulièrement des nouvelles de Corwen. On me dit qu'il se remettait lui aussi petit à petit, mais qu'il était approximativement dans le même état de fatigue que moi. Puis je me levai un peu. Je voulus aller voir mon ami, mais une fois dans le couloir, sa chambre me parut si loin que j'abandonnai l'idée.

Mes forces avec le temps continuèrent de se reconstituer, et je pus marcher de plus en plus longtemps. Un jour, enfin, je trouvai le courage de me rendre jusqu'à la chambre de Corwen.

Lorsque j'entrai, il était assis dans un fauteuil, le regard dans le vague. J'eus du mal à le reconnaître. Il avait maigri, ses cheveux normalement longs et bouclés avaient été rasés et commençaient à peine à repousser. Cependant, lorsqu'il me vit, son regard s'éclaira et un sourire apparut sur ses lèvres. Il voulut se lever, mais il s'en trouva incapable. Je m'avançai vers lui et, avec le soutien de Meywen, je me baissai vers lui pour le serrer dans mes bras. Il m'étreignit très fort en retour, et je sentis ses larmes mouiller sa chemise. Mes yeux débordèrent à leur tour. Puis, je m'assis face à lui. Nous parlâmes un peu de nous sans aborder l'essentiel. Puis, sentant que la fatigue se faisait sentir pour nous deux, je repartis en promettant de lui faire désormais une visite chaque jour. Il me semblait qu'il mettrait beaucoup plus de temps à guérir que moi.


Grimelin, voyant que je me remettais, jugea qu'il était temps d'aborder les sujets que nous avions évités jusque là. Il savait dans les grandes lignes les péripéties de notre évasion de Wenlach' avec Meywen, le prince et la princesse lui ayant raconté l'essentiel. Il avait eu d'autres détails par dame Nokt, mais certains éléments lui semblaient encore obscurs.

Terre de Sorciers- Tome 1Tempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang