Chapitre 40

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Lorsque je retournai auprès du vieux sorcier, il semblait agité et son état semblait s'être brusquement aggravé. Je me dépêchai de lui administrer son remède, mais j'avoue que je n'avais plus grand espoir. Tout ce que je souhaitais désormais était que Nokt revienne au plus vite afin d'aider notre ami. J'ignorais encore comment cela serait possible, car si j'en croyais ce qu'il avait dit avant de perdre connaissance, son mal avait pour origine la magie noire, et à ce titre ne pouvait être soignée par un simple médico-mage. Le seul à mes yeux qui aurait pu soigner Grimelin n'était autre que lui-même. Lui seul possédait suffisamment de savoir et de magie en lui pour arriver à combattre ce mal, mais il semblait déclarer forfait.

Il faisait un froid glacial, et je me refusai à allumer un feu. Pour le réchauffer, je m'allongeai près de mon maître et étendis ma cape sur nous deux. Ce faisant, je collai mon front contre le sien.

Un tourbillon m'emporta. De violentes lumières multicolores m'assaillaient de toute part. Je fermai les yeux.

Je ne savais plus qui j'étais, je possédai soudain l'omniscience, puis je me perdis, épuisé avant de déborder de vie et d'énergie. Le tourbillon finit par se ralentir, et je me risquai à ouvrir les yeux.

Je reconnus immédiatement l'endroit : le Désert de Feu. Elle était là. La Lechwyna semblait quelque peu mal en point, mais je sus instantanément que sa victime était au plus mal. Grimelin était là, ou plutôt, je me trouvais en lui, et je compris à ce moment là que son inconscience était le résultat de sa transkrin'h'. Depuis quand avait-il décidé de se rendre dans le Draï N' Flech' ? Je gageai qu'il en avait décidé ainsi à partir du moment où nous l'avions allongé sur la civière. Pourquoi prendre ce risque ?

« Ca l'a occupée un moment, l'entendis-je me répondre.

Puis il reprit dans un murmure :

− Je ne sais pas si je dois me réjouir de ta présence ou pas. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée de me rejoindre, mais maintenant que tu es là, peut-être peux tu te rendre utile en me redonnant un peu de force.

Je l'entendais, mais je savais qu'il ne parlait pas, j'étais dans son esprit, mais n'osai lui répondre de peur de trahir ma présence d'une façon ou d'un autre ; je n'avais aucune idée de ce qu'il s'était passé ni de quelle façon je me retrouvais dans les pensées de mon maitre et ami.

Par les yeux de Grimelin, Je regardai la sorcière. Elle fulminait. Elle hurlait :

− Où est-il ? Qui est-ce ?

Seul le silence lui répondait.

− Cela fait quelques temps qu'elle s'énerve, mais je la fais patienter. Il faut que tu te mettes à l'abri petit. Donne-moi un peu de forces encore pour te donner le temps. »

A ce moment là, je ressentis une douleur intense. Mon corps brulait de l'intérieur, je hurlai, puis je m'aperçus que ce n'était pas moi qui subissais ce châtiment, mais le vieux sorcier. La douleur avait été atroce, et je savais pour l'avoir subie quelques lunes plus tôt, qu'on ne pouvait y résister bien longtemps. J'avais alors mis plusieurs jours pour m'en remettre. Je me demandai comment Grimelin pouvait être encore en vie, car j'étais persuadé que la sorcière ne lui avait laissé aucun répit depuis qu'il s'était rendu ici.

Du fond de son esprit, car c'était bien là que je me tapissais, je pus tout observer : la colère de la sorcière, le Désert de feu, l'épuisement de mon maitre et ami, et je découvris, émerveillé à quoi la magie qui l'habitait encore ressemblait. Dès que je la vis, je l'identifiai. Je la voyais briller, de ci, de là, étincelles fluides et clairsemées circulant encore faiblement. Je devinai immédiatement, qu'en temps normal elle habitait ce corps tout entier, elle coulait en lui comme le sang dans ses veines, irradiant dans tout son être, et je compris comment lui redonner des forces. Il m'avait toujours dit que la magie bouillonnait en moi ; je comprenais désormais ce qu'il voulait dire, et lui envoyai tout ce que je pouvais. J'étais jeune, mon corps la renouvellerait, il m'en avait expliqué le processus quelques temps auparavant, alors que nous étions encore à Lach'Khan.

Mais alors que je lui insufflai toute l'énergie magique dont je disposai, la lechwyna, excédée par sa résistance, tenta de le posséder.

J'agis par pur réflexe ; je me ruai à l'extérieur de ma cachette pour le protéger. Je sentis l'énergie de la magie noire se heurter violemment à moi, puis je la vis littéralement assaillir celle de qui elle était née. La Lechwyna hurla et disparut dans un nuage scintillant de poussières de cristal de Nach'.

Terre de Sorciers- Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant