Terre de Sorciers- Tome 1

Chapitre 44

La cérémonie de mon Namen'Wen se déroula quelques jours plus tard. Tout le château de Lanwenech' s'était mobilisé pour la décoration et la préparation du repas. Nous étions tous surexcités, et j'étais aussi un peu anxieux. Je n'avais jamais eu l'occasion d'assister à cette cérémonie et je m'interrogeais quelque peu sur certaines de ses étapes. Je connaissais les moments essentiels pour en avoir entendu parler, Grimelin m'avait expliqué en détail comment cela se passerait, mais je continuais de m'interroger. Corwen entreprit de me raconter son propre Namen'Wen qui avait eu lieu dès son retour au château paternel. Wynie et son frère y avaient assisté et commentaient tout ce qu'il m'expliquait.

Comme pour compenser le temps qui nous avait tenus éloignés les uns des autres pendant ces quelques lunes, nous étions devenus inséparables, et, lors de rares moments de solitude, il m'arrivait de m'étonner, de cette amitié qui s'était développée entre des enfants royaux, le fils d'un dissident, et moi-même, fils de je ne savais qui, serviteur à Wenlach'. La séparation semblait avoir exacerbé nos sentiments les uns envers les autres, et nous connûmes tous ensemble à cette période le bonheur d'une apparente insouciance. Milie se joignait à nous régulièrement hésitant en permanence entre la poche de Wynie ou la mienne.

Je découvris la teneur de la magie naissante de Wynie, qui, en plus de pouvoir faire apparaître quelques flocons de neige, avait la chance de communiquer avec les animaux et insectes de tous genres. A ma grande surprise, je la vis communiquer avec Milie, et celle-ci semblait vraiment la comprendre. Je savais que c'était une forme que revêtait la magie chez certaines personnes, et Grimelin me laissa entendre, à l'occasion, que ce n'était là qu'un début chez Wynie ; il soupçonnait que le don de la fillette ne se limitait pas à la simple animagie, et qu'il se révèlerait bien plus puissant au fil des années et de son apprentissage.

Quoiqu'il en soit, Wynie m'étonnait toujours autant. Elle avait l'air d'une enfant, mais par bien des aspects, elle réfléchissait beaucoup plus que certains adultes que j'avais pu connaître durant ma courte vie. Lorsque, à l'occasion, je m'ouvris de ces réflexions à Owen, celui-ci me fit remarquer qu'il était aussi étonnant qu'un garçon de mon âge remarque ce genre de chose.

Enfin, le grand jour arriva.

Le matin même on me revêtit de mes habits de cérémonie composés d'une immense cape grise surmontée d'une capuche retombant sur mes yeux afin de symboliser mon ignorance et mon aveuglement d'enfant face à la vie. Le gris était symbole de la neutralité et de la transparence de l'enfant dans le monde des adultes.

Grimelin me guidait en me tenant par le bras. Nokt avait manifesté également le désir de me conduire au prêtre de Wen qui officiait, et Milie se glissa subrepticement dans ma poche pendant le chemin qui devait me conduire devant le prêtre de Wen.

Nous nous arrêtâmes et je supposai sous la capuche qui me recouvrait les yeux, que je me trouvais face au prêtre.

«  Nous sommes réunis aujourd'hui pour célébrer l'entrée d'un enfant dans le monde adulte. Enfant, comment, t'appelles-tu ?

− Milwen, répondis-je.

− Qui présente cet enfant ? demanda-t-il ensuite.

Grimelin et Nokt répondirent à l'unisson :

− Nous présentons cet enfant pour qu'il devienne adulte parmi les adultes.

− Adultes, comment vous nommez-vous ?

− Mon nom est E'wen Lach'Grimelin.

− Mon nom est Galwyn Eklech' Nokt.

− Comment se nommera cet adulte ?