La nuit

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C'était une nuit noire. L'orage grondait au dehors, faisant frémir les murs de ses éclairs. J'étais assis comme d'habitude sur mon canapé, jouant à un de mes jeux préférés sur mon ordinateur, on me reprochait bien souvent d'avoir une addiction à ces derniers. J'ai en général reconsidéré mon amitié avec les gens qui m'avaient suggérés cette idée. Je ne considérais pas que j'avais réellement besoin d'amis, je nécessitais seulement une présence humaine de temps à autres, histoire de ne pas tomber dans les abysses du mutisme. Je n'aimais pas tant que ça parler, mais cela m'était utile pour me détendre, pour me faire oublier ma vie qui commençait, du haut de mes 20 ans, et qui me semblait pourtant déjà close, achevée par un monde monotone, morne, emplie de douleurs et de désolation.

Ouais, je haïssais le dehors.

Après quelques heures de jeux, je décidai d'aller me coucher. Il devait être aux alentours de 3 heures du matin. L'orage s'était calmé et il ne régnait maintenant dans ma maison que le calme, et les bruits de pas, mes bruits de pas, résonnants dans les couloirs lugubres de ma demeure. J'étais seul pendant 2 semaines, parents en vacances, soeur chez une amie, vie sociale envolée. Deux semaines parfaites pour moi jusqu'à ce soir là.

J'allais tranquillement dans la salle de bain lorsque quelque chose me parut étrange : il me semblait avoir aperçu du mouvement au fond du couloir, comme un tissu blanc ayant du mouvement. Rien de bien concret, certainement un des fantasmes de mon imagination. Fantasme ... Si j'avais connu sa signification ancienne ce jour-là, j'aurais peut-être évité de l'utiliser. A ce moment-là, un bruit, presque imperceptible, un bruit d'air, de mouvement. Je pensais avoir rêvé, mes oreilles grésillaient encore de batailles virtuelles intensives et de leurs bruits dans mon casque.

Je me suis lavé tranquillement les dents, me surprenant moi-même à jeter des coups d'œils furtifs au-dessus de mon épaule, comme si je m'attendais à trouver quelqu'un me regardant derrière moi. L'ambiance était lourde, j'étais tendu. Je mis ça alors sur le compte de la fatigue, mais j'ai compris plus tard que mes instincts étaient à vifs à cause d'une présence inconnue, furtive, discrète, mais bien réelle dans mes couloirs.

Cependant, ce furent les évènements qui découlèrent qui me plongèrent dans ma paranoïa actuelle, dans ma torpeur permanente, dans cet effroi implacable qui glace mon sang à chaque bruits. Je ne suis plus que l'ombre de moi-même depuis, je l'attends.

Je me dirigeais vers ma chambre lorsque j'ai réellement senti cette présence, cette ombre parmi les ombres qui me scrutait. Son souffle froid dans mon cou. J'ai sursauté, je me suis retourné. Personne. Évidemment. J'étais à cran, et je ne désirais alors qu'une seule chose, me coucher. Mais cette présence était toujours là, je la sentais. Elle m'observait, elle se délectait de ma peur, de mes craintes. Je pouvais sentir cette tension dans l'air. Je savais que j'aurais dû partir, mais je suis resté.

Je me suis installé dans mon lit, j'ai éteint la lumière, me plongeant dans la pénombre. C'est là qu'ont commencé mes tourments, il me semblait voir des formes fantomatiques, qui auraient pu être sorties des plus grands romans fantastiques. Elles me tournaient autour, semblaient me juger, réfléchissant à quoi faire de moi. J'étais apeuré, je ne pouvais bouger, plongé dans une léthargie singulière. Puis elle est apparue. Cette forme blanche, en face de mon lit. Elle s'est jetée sur moi, je me suis débattu. La lutte a duré 5 minutes peut-être, avant que je la repousse contre un mur et qu'elle disparaisse.

J'ai allumé la lumière. Sur mon torse, des traces de griffures. Je me suis regardé dans un miroir. En plus de ma pâleur, elle avait gravé quelque chose sur mon front : "Je reviens".

Depuis ce jour, je suis victime d'insomnies, je vis désespérément dans la crainte qu'elle revienne me prendre, me libérer. Je suis trop effrayé pour en parler, mais je me suis renseigné sur Internet. Je ne suis pas le seul à avoir vécu ça, nous sommes des milliers dans le monde à l'attendre, notre vie à tous n'est qu'attente, désespoir, douleur, effroi.

Et pendant ce temps-là, je sais qu'elle frappe ailleurs, peut-être viendra-t-elle chez vous ?
Ne restez plus seuls.

Don't Read at Night | Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant