Chapitre 29

1K 133 10
                                    

FERN

Le lendemain, je me réveille avec un mal de tête atroce et un poids au creux du ventre. Je n'ai pas assez dormi, trop perturbée par la proximité d'Elik et l'éloignement de Nell. Ajoutez à cela le ronflement d'Hailey. Comment fait-elle pour laisser ses problèmes de côtés et trouver le sommeil ? Ça m'est tout bonnement impossible.

Tandis que je me questionne sur mes capacités à oublier, je sens ce que je prenais pour un poids bouger sur mon ventre, glisser sur ma taille et finir sur ma hanche. Je suis pétrifiée sur place en me rendant compte que c'est en fait la main d'Elik qui se balade sur mon corps. Et je le suis d'autant plus d'adorer l'effet que ce simple geste me procure. C'est si désintéressé et innocent. Si doux que j'en perdrais presque la tête. Je risque un regard dans sa direction et me rend compte qu'il ferme les yeux, que sa respiration est maitrisée : il dort encore. Et, moi, je ne suis plus rien. Rien qu'une poupée désarticulée, qui n'ose plus faire un geste, de peur de le réveiller et rompre le sort.

Je m'en veux d'un côté d'apprécier autant : une partie de moi à l'impression de donner raison à la jalousie de Nell. Tandis qu'une autre partie est catégorique : elle ne bougera pas. Elle se sent bien, comme une fleur au printemps. C'est ce moment qu'Elik choisit pour grogner dans son sommeil. Je me fige à ce simple son, encore une fois si pure et involontairement sexy. Mais merde à la fin, Fern !

-Tu comptes le mater encore longtemps ? s'amuse Hailey qui se réveille à peine, à l'autre bout de la pièce.

Je me redresse brusquement, faisant sursauter Elik au passage. Il me lance un regard noir et me tourne le dos pour se rendormir. Merci beaucoup, Hailey, lui dis-je d'un simple regard. Je ne me suis jamais sentie aussi humiliée et sale à la fois. Je ne peux pas lui en vouloir. Même si mon couple n'est pas parfait, je suis tout de même prise. Je ne peux pas fixer aussi intensément Elik et aimer ça... Et puis lui aussi il est pris, il sera toujours pris par Sawla, qu'elle le veuille ou non. Je décide finalement qu'il est l'heure de me lever et grogne en sentant la douleur se propager tout le long de ma colonne vertébrale.

Avant que je puisse me faufiler discrètement hors de la chambre, Elik me retient par la main, toujours en me tournant le dos :

-J'espère que tu passeras une bonne journée, Fern...

Il a la voix pâteuse, rauque et encore toute endormie quand il me dit ça. C'est si spontané que je me demande ce qu'il veut dire au juste. C'est une phrase pleine de douceur et d'attention. Et à la fois si simple... je n'y suis tellement pas habituée que je pourrais presque lui demander de répéter pour être sûre.

Je sors de la chambre, presque en courant.

                             ***

Je retrouve la bande seulement sur les lieux du concert. Je m'en suis sentie incapable plus tôt, suite aux paroles et aux gestes d'Elik. Je me suis bien trop laissée distraire... il me fallait un peu d'air et d'isolement.

Il est un peu plus de six heures de l'après-midi quand j'arrive enfin et je les retrouve en train de se vêtir de leur costume de scène. Ils ont tous l'air un peu préoccupé, bien qu'Elik le soit plus et Thaïs totalement ailleurs. Quand enfin j'arrive dans leur champ de vision, ils se précipitent vers moi en me hurlant :

-Mais où étais-tu passée ?!

-Je... j'ai laissé un mot sur...

-La table de nuit, termine Elik, et ? Tu crois qu'un simple « je reviens vite », suffi quand on ne te voit pas revenir au moment de partir pour le concert ?!

-Elik..., commence Hailey, tu devrais te calmer un peu, elle doit...

Il lui lance un regard si noir qu'elle ne peut plus prononcer un mot. Mon ami s'avance lentement vers moi, d'un air menaçant qui me fait reculer jusqu'à ce qu'on soit seuls, dans un coin sombre des coulisses. Il pose ses mains de part est d'autre du mur, derrière ma tête. Il me regarde avec colère, mais semble tout de même se calmer enfin, comme s'il avait besoin de me voir pour se détendre. Quand il fait mine de prendre la parole, je souffle :

-Je ne voulais pas te... vous... faire peur.

-J'ai l'impression de me retrouver face à Thaïs, qui fait sa garce et tout ce qui lui chante. Qui ne pense qu'à elle et rentre quand elle le décide. Mais, Fern... je me fiche pas mal de la disparition de Thaïs. Toi... toi ça m'a détruit.

Je baisse le regard. Quand je trouve la force de le regarder à nouveau, il a les yeux embués :

-Je...

-Tu n'imagines pas le nombre de cauchemars que j'ai pu faire suite à la rupture avec Sawla... mais toi, Fern, c'était un cauchemar réel. Bien vrai. Pas du genre qui disparaît au lever du jour. J'ai cru que tu nous avais laissé pour de bon.

-Pourquoi est-ce que j'aurais...

Il pose un doigt sur mes lèvres et le fait glisser le long de ma nuque. Je déglutis avec difficulté quand il murmure :

-Pour ça, Fern. J'ai eu peur que tu partes à cause de ça, de ce truc qui nous attire l'un vers l'autre... alors... alors qu'on est aussi attirés ailleurs. J'ai eu tellement peur que ça te fasse du mal, que ça soit trop et... je ne voulais pas y aller trop vite hier et... ce matin.

Il fixe lentement son doigt, toujours sur mon cou, puis mes lèvres et, enfin, mes yeux. Il s'avance tout aussi lentement et quand je crois qu'il va m'embrasser, il se recule bien trop rapidement en murmurant :

-Je...

Il secoue la tête, tout en se passant les mains dans les cheveux. Je suis incapable de lui venir en aide en cet instant : je suis tout aussi perdue que lui.

-Ecoute... je ne veux pas te compliquer les choses, Fern. Bien au contraire. Je te veux tant de bien que c'en est affolant, tu n'imagines pas tout ce que je serai prêt à t'offrir. Mais...

Il a un petit rire.

-Il y a toujours un « mais » dans ce genre de situation, hein ? Notre « mais » à nous, Fern, c'est qu'on est tous les deux des grosses mauviettes. On a bien trop peur de se ratatiner à nouveau.

Et il disparaît, afin de rejoindre le reste du groupe. Je reste contre le mur, me ressassant ses paroles. Tu n'imagines pas tout ce que je serais prêt à t'offrir. J'ai presque envie de courir à sa suite et lui demander de m'expliquer comment il fait. Comment est-ce qu'il peut être aussi désinvolte et passionné à la fois...

We start againOnde histórias criam vida. Descubra agora