Chapitre XII

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Rien n'avait changé dans leur appartement, il en fut profondément rassuré. Elizabeth l'observait comme inquiète de ce qu'il avait à dire, néanmoins Salim n'avait rien à prononcer. Etrangement il ne désirait qu'une chose, prendre sa femme dans ses bras et savoir si elle lui pardonnait son infidélité, cependant elle ne l'évoqua pas. Saphira n'exista pas pour elle. C'était devenu un sujet tabou, et le futur enfant aussi. Elizabeth le surnommait intérieurement « le démon ». Salim raconta en quelques phrases l'attaque, sa blessure et sa captivité, puis il finit par sa chevauché longue et intense. Elizabeth le félicita et lui prit les mains. Elle les embrassa une par une. Salim en profita pour saisir la tête de sa femme et de l'approcher du haut de son torse. Il la prit dans ses bras et posa ses lèvres sur ses cheveux. C'était comme un signal pour dire « Saphira n'est plus rien pour moi, c'est fini, ne t'inquiète plus jamais », et ce fut de cette manière qu'Elizabeth interpréta ce geste de tendresse inattendue. Elizabeth s'écarta doucement de son époux et lui dit :

-Je dois aller à Macan dans une heure. Les Ronoriens ont pris d'assaut la forteresse Norring ce matin.

-Et que vas-tu faire ?

-Exécuter Ronor pendant la nuit. Mais avant je vais lui parler et lui faire avouer où sont ses complices, je ne sais pas qui il protège avec autant de ferveur.

Salim pensa à Lana Ronor dont Cyril s'était entiché. C'était sûrement elle que Charles Ronor protégeait. Salim n'avait rien contre la peine de mort, elle était toujours d'actualité en Auguste et Ronor était un monstre sanguinaire qui avait abattu les Moscov, donc la famille de la mère du Prince :

-Je te soutiens quoi qu'il arrive. Dit Salim en souriant.

-Comme tu m'as manqué. Avoua Elizabeth soulagée par la présence de cet homme si bon.

De nouveau ils s'enlacèrent. L'un contre l'autre le monde ne semblait plus existé. Salim trouva ce nouveau sentiment fou et pénible à la fois car il ne le connaissait pas. Ce n'était pas de la passion comme avec Saphira, ou de l'amitié, comme avec Sélène, ou du respect, comme avec Vladimir, non c'était vraiment nouveau. Il se sentait bien, en sécurité, calme, presque heureux. Il aurait pu rester comme cela toute sa vie, dans les bras d'Elizabeth. Brusquement un flot de désir prit possession de tout son être et en fut choqué. Il repoussa doucement la jeune femme et recula de quelques pas :

- Que se passe-t-il ? Demanda-t-elle. Tout va bien ?

- Oui, oui. Murmura-t-il. C'est juste que...

- Que quoi ?

- Je...Je crois que...Mon amour pour Saphira est mort pendant ma captivité et...

- Et ? S'impatienta Elizabeth.

- J'étais aveuglé par mon amour pour elle et je ne pouvais percevoir celui que j'ai pour toi. Il a fallu qu'elle devienne une femme que je ne supporte pas pour que je comprenne que...je...tenais réellement à toi

Il balbutiait ses paroles, comme perdu dans sa propre réflexion sentimentale. Il s'excusait presque d'avoir été aussi idiot dans ses émotions, de n'avoir pas compris que son attachement spirituel à Saphira bloquait son affection pour Elizabeth. Cette dernière ne put s'empêcher de sourire, et son sourire grandit jusqu'à dévoiler toutes ses dents. Elle frappa dans ses mains, Salim sursauta :

- Cette garce aura au moins servit à quelque chose ! S'écria-t-elle. Je devrais lui envoyer une lettre de remerciement.

Salim se mit à rire :

- Tu dis n'importe quoi. Dit-il.

- C'est toi qui me fais dire n'importe quoi. Plaisanta-t-elle.

Les Seigneurs de Fallaris   Tome 1: AllénieWhere stories live. Discover now