— Youhou ! Par ici !
— Ramène tes tentacules par là, mon gros lardon ! Crie à son tour Klaus pour l'attirer.
Les coups pleuvent, pourtant je ne m'arrête pas. Ma fratrie s'active, attirant l'attention de ce monstre de chair pour l'empêcher de me voir, et j'accélère le pas en montant sur la balustrade, au dessus de ce dernier. Assez haut pour le surplomber dans son ensemble. Assez haut pour le détruire entièrement.
Je ferme les yeux quelques secondes, le cœur en feu, et inspire. J'oublie alors tout ce qui m'entoure. La douleur, ce frère que je m'apprête à tuer de mes propres mains, ce que j'ai été et ce que je ne serais jamais. J'oublie Ange et la vie qu'il m'a offert. J'oublie qu'en tuant Ben, je tuerais la dernière chose qui me restait de lui. J'oublie Diego et la douleur dans son regard.
J'oublie tout, parce que les sentiments sont un frein dont je dois me passer.
Je soulève alors mes doigts et rouvre mon regard vers la masse, me concentrant uniquement sur cette énergie bouillante que je ressens en travers, me dessinant mentalement ces petites bulles de matières que je dois modifier à tout jamais.
« Concentrez-vous, numéro Huit », réussis-je même à entendre la voix de Hargreeves m'ordonner cruellement.
Alors je concentre mes forces, oubliant ma douleur et mon cœur qui en crève. Ma magie me brûle les doigts, fulmine dans chacun de mes pores, et lorsque le cri difforme de Jennifer s'élance, je redouble d'effort. Un "bip" assourdissant m'écorche les tympans et je ressens sans mal la chaleur de mon propre sang s'écouler de mes oreilles, mais je ne relâche rien.
« Recommencez ! », crie papa dans ma tête.
— Gabriella !
Je suis le numéro en trop. Je suis superficielle, trop faible et égoïste. Ni une héroïne, ni une bonne personne. L'erreur de Hargreeves, ni plus, ni moins. Mais ma famille, c'est tout ce que j'ai. Je veux revoir Diego embrasser ses enfants, écouter Klaus chantonner ces chansons idiotes qu'il met à chaque karaoké et écouter Luther pleurnicher comme un gamin sans raison apparente. Je veux continuer d'embêter Cinq, continuer à me disputer avec Allison.
Un hurlement m'échappe alors que je ressens l'énergie combiné du Marigold et du Durango s'effacer pour de bon. La masse s'écroule au sol, lâchant un faible gémissement à peine humain, et lorsque tout disparaît enfin, c'est comme si une partie de mon âme s'était envolé avec eux.
Je l'ai tué...
« Ça aurait dû être toi ».
— Gaby !
Mon souffle bourdonne dans mes oreilles alors que tout ce que je souhaite, c'est mourir. Je baisse la tête, à bout de tout, alors que leurs voix me parviennent si difficilement que je crois rêver un instant.
Je n'en peux plus.
Je ne peux plus de ce vide intense, de cette douleur et de ma propre existence. Je n'en peux plus d'être moi, tout simplement.
— Alors c'est fini ? Chuchote faiblement Allison.
Pourtant, je relève la tête, parce que c'est bien loin d'être le cas. Et que, malgré cette déchirure qui me fait si mal, je n'ai pas le choix que de continuer à avancer.
— C'est le Marigold qui causera toujours ces fins du monde... Et ça continuera tant que ces particules vivent en nous.
Péniblement, ce simple mouvement me coûtant bien trop, je relève mon regard vers celui de Viktor. Les yeux bordés de larmes, évitant mon regard comme pour me cacher sa douleur, il acquiesce faiblement.
Je sais ce qu'il pense. Ce qu'ils pensent tous. J'ai tué Ben, je ne vaux pas mieux que notre père.
Quelle ironie, putain... Je l'ai tant hait, alors que je suis sans doute celle qui lui ressemble le plus.
— Elle a raison. Quand je tenais le bras de Ben... Il m'a montré un futur. Un endroit paisible... Où nos pouvoirs n'existeraient pas.
Dès notre naissance, nous avons été élevé pour combattre la fin du monde. Des expériences, des êtres dotés de magies. Et c'est de ça dont nous devons nous débarrasser.
— Je dois effacer la moindre particule de Marigold en chacun de nous, j'explique sombrement, l'esprit vidé. Ou alors, Ben sera mort pour rien.
Et je n'aurais plus rien pour apaiser cette douleur en mon sein.
— Je vais t'aider, s'exclame Lila en s'avançant vers moi. Je vais te copier.
— Je peux me débrouiller.
— T'es à deux doigts de te briser, réfute Diego en posant sa main sur mon épaule. Accepte l'aide qu'on te porte.
Pourtant, cette souffrance, je la mérite. Pas la mort, bien trop douce pour une personne comme moi, mais bien une vie entière de douleur. Peut être même plusieurs.
Mais lorsque la chaleur de Diego brûle l'épiderme de mon épaule, la respiration que je prends me semble moins lourde, et je hoche la tête sans m'en apercevoir. Je m'avance alors vers Lila, qui acquiesce comme pour me soutenir, et lève un regard vers ma fratrie pour obtenir avant tout leur aval.
— On a déjà vécu sept ans sans nos pouvoirs, fait remarquer Luther simplement. Une vie entière, ça me paraît faisable.
— Fais-le, Gaby. Débarrasse-nous de ces merdes, m'encourage gentiment Klaus.
Mes pouvoirs ont été la cause de bien trop de souffrance. Et si le monde ne peut être sauver qu'en éradiquant à jamais le Marigold de nos êtres, alors soit.
J'inspire, une migraine frappant douloureusement contre mes tempes, alors que j'entreprends d'effacer chacune de ces particules qui nous ont tant fait souffrir. Lila m'imite, éliminant les traces magiques de mes frères, et lorsque tout disparaît, son regard se pose sur le mien, si doux que je le ressens comme un coup de poing dans l'estomac.
Je ne mérite pas cette douceur.
— Prête ?
— Prête.
Je soulève mes doigts pour la dernière fois vers elle, concentrant mes forces sur ces particules virevoltant en elle, et ma belle-sœur m'imite alors. À mesure que son énergie se dissipe, la mienne m'échappe, et ma migraine s'étale. Tout se floutent, mon audition se bouche, et tout autour de moi se met à tourner. Et lorsque toute trace de cette magie qui a été mon essence pendant toute ma vie s'envole, mes forces me quittent et je m'écroule. Ma vue se brouille, tout se teinte de noir, pourtant, c'est bien la chaleur brûlante et rassurante de Diego que je sens me retenir alors que tout s'écroule en moi.
J'ai sauvé le monde... Mais à quel prix ?
̶P̶o̶u̶r̶q̶u̶o̶i̶,̶ ̶m̶o̶i̶,̶ ̶j̶e̶ ̶n̶e̶ ̶s̶u̶i̶s̶ ̶p̶a̶s̶ ̶m̶o̶r̶t̶e̶ ̶?̶
— T'es bien plus qu'une Hargreeves, Gaby, me murmure-t-il, sa bouche pressée contre ma tempe, t'es notre espoir à tous. Notre héroïne, la meilleure chose qui pouvait nous arriver. Alors laisse-toi aller, je suis là pour te soutenir. C'est une promesse, princesa.
Je ressens parfaitement ses lèvres brûlantes contre mon front, comme une brise réconfortante dans un braiser, alors que tout s'écroule en mon sein, que tout disparaît et ne devient qu'un ramassis de souffrance. Dans ses bras chauds et rassurants, dans la douceur de ses paroles et accompagnée par les battements frénétiques de son cœur, je me laisse aller à ce silence assourdissant et à ce vide dantesque et sinistre qui me terrorise tant.
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Ꮜꮇᏼꭱꭼꮮꮮꭺ Ꭺꮯꭺꭰꭼꮇꭹ ///Terminée\\\
FanfictionÀ la douzième heure du premier jour d'octobre 1989, quarante trois femmes à travers le monde donnèrent naissance à un enfant. Le seul facteur commun était qu'aucune de ces femmes n'étaient tombés enceintes auparavant. Sir Reginald Hargreeves, millia...
Chapitre 56
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