Il a gagné la partie avant même de l'avoir débuté.
— Danse avec moi.
Je cligne des yeux, surprise par ce changement de sujet. Il me sourit, ce même sourire pour lequel je pourrais sans nul doute tuer, et tire sur mon bras pour me lever en même temps que lui. Un gloussement m'échappe tandis que j'emporte le drap avec moi, frileuse.
Il n'a pas besoin de parler pour que je comprenne ce qu'il tente de faire, et je ne peux que lui en être reconnaissante. Ange a très bien comprit que je n'étais pas de celle à aimer me livrer et parler de mes sentiments. Alors, quand tout devient trop dur, il adoucit l'ambiance par son idiotie attachante, me libérant de mes peurs et du silence qui ne m'a jamais vraiment quitté, même une fois sortie du noir.
— On est même pas habillés, je geins dans un gloussement.
— Tu n'as qu'à lever tes magnifiques petits doigts et m'habiller pour l'occasion ! Allez, je suis certain que tu rêves de me voir en costume !
Il ricane et je le suis, amusée et follement amoureuse. Ses mains quittent les miennes pour s'avancer vers la radio et lorsqu'il augmente le son de la musique, un frisson m'échappe.
— Danse avec moi, beauté. Offre-moi ce privilège.
Comment refuser ?
Dans un sourire amusé, je soulève mes doigts vers lui, imaginant l'un de ces costumes magnifiques que l'on pouvait voir en 1800. Ma magie me chatouille ,imprègne mon corps, et c'est tout mon corps qui s'enflamme en le voyant ainsi vêtu.
"Magnifique" n'est pas assez puissant pour décrire ce qu'il est. Envoûtant, merveilleux... Magique, seraient plus adéquat.
— Bah ça alors ! S'écrit-il en touchant les pans de son costume, C'était trop bizarre, merde !
Il ricane, observant chaque pli de son costume d'époque, et mon idiot de cœur ne se décroche qu'encore plus. Et lorsqu'il tend sa main vers moi, ses yeux brûlants posés sur mon visage, je sais d'avance que je suis foutue.
— Miss Hargreeves ?
Je suis incapable de taire ce sourire qui décore mes lèvres à m'en faire mal aux joues. Je lève mes doigts vers moi, matérialisant l'une de ces si jolies pièces que l'on peut voir dans les séries victoriennes, et m'avance vers lui pour prendre sa man. Sa seconde main se place dans le creux de mes reins, m'attirant davantage vers lui, et son souffle chaud vient frapper contre mon cou comme un appel à la débauche.
— Tu es magnifique. Une pure merveille, Gabriella. J'ai dû mal à croire que je suis tiens.
Bam. Bam. Bam.
Oh, douce agonie.
Oh, terrible litanie.
Ange Hargreeves m'a complètement détraqué, il n'est plus possible de faire marche arrière. Je suis prise au piège. Prise dans ce sentiment que je ne pensais jamais vraiment pouvoir ressentir.
Quand son corps bouge au rythme de la mélodie, m'entraînant dans une valse d'époque maladroite et hilarante, je ne suis pourtant pas d'humeur à me moquer. Je meurs de chaud, puis de froid, et rien d'autre n'existe appart son regard charbon.
— Je t'aime, murmure-t-il si bas que j'en souffre. Et tu ne pourras pas m'empêcher de le dire, cette fois. Parce que, ouais, je suis amoureux de ta grande gueule, Gabriella. T'es celle qui me faut, aucun doute là dessus.
J'ai mal. J'ai l'impression de brûler, de mourir sous ses mots si doux et si profond. Mais jamais, ô grand jamais, je ne souhaiterais perdre cette douleur.
Ange me détruit et me saccage. Mais tant qu'il est là, alors c'est comme si tout allait bien. Comme si je pouvais tout encaisser.
Soudain, me sortant de cette bulle de réconfort, le visage pâlichon de Diego m'apparaît. Instinctivement, Ange et moi nous séparons, nos regards s'appuyant sur sa silhouette, sur ses sourcils froncés et sa bouche entrouverte. D'un geste - un peu brutal, je l'avoue - de la main, je modifie la radio en un pétale, faisant taire cette musique devenue assourdissante depuis sa présence, et tourne mon regard vers lui.
— Qu'est-ce qu'il fait là, l..., commence-t-il avant de secouer la tête de gauche à droite. Non, en fait je m'en fous. Salut, mec.
Le regard interrogateur de Ange me brûle la peau alors que ma colère, bien trop pesante, se réveille à nouveau.
Je pensais que tout cela était derrière nous, mais c'est comme si lui et moi avions fait deux pas en arrière dans notre relation, pour revenir à notre adolescence, où tout ce qui sortait de nos bouches étaient des insultes ou des vacheries.
— Tiens, y'a fallut que Lila vienne te remémorer les joies du sexe pour que tu me foutes la paix ?
Il entrouvre la bouche, son teint bien plus pâle que d'habitude, et mon cœur s'arrête lorsque je l'entends bégayer comme à l'époque.
— N-non, je... Je...
Alors mon regard se pose sur ses doigts, dont deux d'entre eux ne sont visiblement plus là. Sa main est enroulée dans un bandage de fortune, déjà couvert de sang. J'écarquille les yeux, mon organe vital rate un battement, et je fonce sans lui sans réfléchir, attrapant sa main blessée entre les miennes. Ma colère s'estompe, remplacée par l'inquiétude, et mon regard s'accroche au sien, alors que la peur se lit dans ses grands yeux sombres.
— Qu'est-ce qui t'es arrivé ?!
— C-C'est pas important. Il faut... I-Il...
Devant son bégaiment et sa panique plus que visible, aucune once de colère ne me parvient, seulement de l'inquiétude. Mes mains se posent sur ses joues, attirant son visage vers le mien, alors que je m'efforce à ne pas paniquer de suite, le principal étant de le rassurer.
— Calme toi. Diego, visualise le mot dans ta tête.
Ses yeux s'accrochent aux miens, comme pour rechercher une aide, et mon cœur ne s'accélère que davantage. Il m'enserre, m'empêche de respirer, et les battements de ce dernier éclate contre mes tympans lorsque Diego entrouvre faiblement les lèvres pour parler.
— C'est Stanley... Il a été avalé par le Kugel, m'apprend-t-il sombrement.
J'écarquille les yeux, sous le choc, alors que les mains tremblantes de mon frère se posent sur les miennes, comme s'il cherchait à se raccrocher à moi pour ne pas flancher.
Stanley a été la cible de ce que nous avons créer...
Alors, vivement, je tourne mon regard vers Ange, la boule d'angoisse que j'avais réussi à faire taire revenant presque immédiatement s'acharner contre mes organes. Mais il ne me laisse pas parler, un sourire doux aux lèvres, sans que ses iris ne s'illuminent pour autant.
— Ne t'en fais pas. Laisse-moi simplement le temps de me changer et j'arrive.
Je hoche la tête, la gorge si serrée qu'aucun mot n'arrive à s'échapper d'entre mes lèvres, et quitte ma chambre en trombe, sans même penser à me changer moi-même. Alors, une fois dehors, la main saine de Diego s'accroche à la mienne, me forçant à me tourner vers lui.
— G-Gaby, écoute...
— C'est bon, je le coupe d'une voix douce. Je ne t'en veux pas.
— Mais moi, je m'en veux. Tu as été là pour moi avec Lila, tu m'as défendu contre papa... Tu as été là à chaque fois.
Il s'approche de moi, l'air sombre, et lorsque ses lèvres se déposent sur ma joue dans une douceur que je ne lui ai jamais connu, c'est comme si je venais de chuter du dixième étage d'un immeuble. Tout s'éteint en moi, une boule d'air explose dans mon ventre, et j'entrouvre la bouche, à la recherche d'air.
— Alors pardonne-moi d'être un aussi gros connard, Gaby.
Il s'éloigne, sa main encerclant toujours mon poignet pour me tirer avec lui, et j'en suis incapable de répondre, l'esprit en vrac et le cœur en miette alors que tout s'effondre, encore une fois, sans que je ne puisse en comprendre la raison.
̶P̶o̶u̶r̶q̶u̶o̶i̶ ̶m̶e̶ ̶f̶a̶i̶s̶-̶t̶u̶ ̶s̶i̶ ̶m̶a̶l̶,̶ ̶m̶i̶s̶é̶r̶a̶b̶l̶e̶ ̶c̶œ̶u̶r̶ ̶?̶
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Ꮜꮇᏼꭱꭼꮮꮮꭺ Ꭺꮯꭺꭰꭼꮇꭹ ///Terminée\\\
FanfictionÀ la douzième heure du premier jour d'octobre 1989, quarante trois femmes à travers le monde donnèrent naissance à un enfant. Le seul facteur commun était qu'aucune de ces femmes n'étaient tombés enceintes auparavant. Sir Reginald Hargreeves, millia...
Chapitre 38
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