Comme s'il refusait d'y croire, Luther relève son regard vers Pogo, mais il ne peut pas nier, ni même le défendre.
— Pourquoi ? Pogo, pourquoi ?
— Il faut dire que votre père avait beaucoup de qualités, mais la franchise n'était pas l'une d'elles. Après votre accident, il voulait vous donner un but dans la vie. Selon lui, c'était la seule solution.
J'écarquille les yeux, sans voix. C'est comme si des milliards d'épines m'enserraient la gorge. Je souffre pour mon frère, davantage encore depuis que Pogo s'obstine à le défendre, même après tout ça.
— Arrête, je m'écris, hors de moi. Arrête de prendre sa défense !
— Il m'a envoyé sur la Lune pendant quatre longues années, bredouille mon frère, le cœur à vif. J'étais pas satisfaisant comme numéro Un ? C'est pour ça ? J'avais pas le niveau alors il s'est débarrassé de moi ?
J'ai mal au cœur. Pour Luther, parce qu'il a toujours cru qu'une part de bonté existait en ce monstre qu'était notre père.
— Non, ce n'est pas..., tente Pogo en avançant une main vers lui.
— Pogo.
Il se met soudainement à pleurer, et je sens que je risque de péter les plombs si je restes plus longtemps. Mes frères et sœurs sont tout ce que j'ai et je ne supporte pas de voir que ce monstre réussit toujours à nous détruire, même dans la tombe.
— J'ai besoin d'être seul...
Je comprends sans problème que je ne suis pas non plus la bienvenue et pose une main réconfortante sur son épaule en me redressant. Je quitte la pièce, non sans offrir un regard inquisiteur à Pogo, et me dirige vers le salon, et plus particulièrement vers le bar.
Mon regard crocheté à mon verre, je laisse ce liquide ambré, unique source de repos que mon âme puisse connaître, tournoyer contre chaque recoin du cristal. Le bruit des glaçons retentit, comme le seul moyen de me préserver de ce silence qui me terrifie tant, même après toutes ses années. Mais rien n'y fait, j'ai l'impression de plonger, encore et encore, dans l'obscurité de ce maudit placard dans lequel je ne suis jamais vraiment sortie.
Je me noies. Et ça me terrifie.
Lorsque je ferme les yeux, le regard détruit de Luther me revient, et une douloureuse boule se forme en mon sein. Parce que si je ne me suis jamais entendue avec notre numéro Un, il n'en reste pas moins mon frère et je ne peux qu'haïr davantage notre père pour la souffrance qu'il a pu lui adonner toute ses années.
Quatre années de sa vie ruinée pour les caprices d'un vieillard.
Reginald Hargreeves n'a rien d'un humain. C'est un putain de monstre. Le monstre de mes cauchemars.
— Bordel, Gaby, repose moi ça !
Mon verre au bord des lèvres, j'ai à peine le temps de réagir qu'une main, aussi chaude que la braisé, s'empare de la mienne pour l'abaisser. Aussitôt, mon regard capte le sien, se perd dans les différents éclats d'or et de chocolat qui y règne, et mes commissures s'etirent douloureusement devant l'air jugeur que m'offre notre numéro Deux.
— Salut, Diego. T'en veux un peu ?
Il soupire, agacé, et je ne peux que sourire que davantage devant cela.
Parce que entre lui et moi, ça a toujours été ainsi. On se cherche, on s'insulte, on se bat à s'en briser les os, mais c'est exactement ce qu'il m'a toujours fallu. Et si Klaus est ma seconde moitié d'âme, mon frère favori et celui avec lequel je m'entends le mieux, Diego est comme mon opposé et mon exact reflet. Mon Ying, comme mon Yang. Et c'est tout à la fois déroutant et apaisant.
Il me comprend en un regard. M'enflamme en une parole. Me rend folle en une seconde.
— Tu devrais arrêter de boire autant, Gaby. Ce n'est pas ça qui t'aidera à aller mieux.
Ses mots résonnent en moi comme un coup en pleine figure. Je vacille, la chaleur de sa main enveloppant la mienne me brûlant presque l'épiderme, et le laisse me débarrasser de ce nectar qui m'aide tant à occulter la réalité.
Je le sais bien, ça. Mais je n'ai rien d'autre. Tout est bien plus simple, lorsque vos peurs se tarissent dans l'alcool.
— Qu'est-ce qui le fera, alors ? Je demande dans un murmure.
Je ne suis pas une héroïne. Une égocentrique, une faiblarde et une fille facile, ça oui, mais je suis bien loin d'être une femme forte qui sait gérer ses problèmes autrement qu'en s'enterrant. Je n'ai ni la force de Allison ni le sens de la justice de Diego. Je suis le numéro ratée, la déception de mon paternel, et jamais cela ne changera un jour.
Mais Diego n'est pas de cette avis. Et lorsque sa main remonte vers ma joue pire y dégager mes cheveux, bloquant doucement une meche rebelle derrière mon oreille, c'est tout mon être qui s'enflamme. Ma respiration se coupe, mon ventre se tord, et mon cœur, lui, se met à hurler son nom sans jamais se stopper.
— T'as pas besoin de ça, répète-t-il d'une voix rauque. T'es plus forte que ça, princesa. Bien plus que tu ne le crois.
Son souffle frappe contre ma peau, ses lèvres effleurent les miennes, et je me sens tomber plus fort encore, sans jamais arriver à l'atterrissage. J'ai l'impression de brûler. De mourir. De vivre pour la première fois.
Oui, Diego et moi possédons un lien particulier. Il lit en moi comme dans un livre ouvert, et j'ai cette foutue sensation d'être quelqu'un autre que l'alcoolique de service en sa présence. Et malgré sa carapace, malgré son sale caractère et sa manie de se la jouer chef de la bande, Diego est un garçon sensible. Il n'est pas que le numéro Deux de Hargreeves, mais aussi ce petit garçon que maman devait aidé pour qu'il cesse enfin de bégayer. Il est ce garçon gentil qui n'a jamais hésité à me gifler pour me remettre les idées en place.
Celui-là même dont j'étais tombée amoureuse, petite.
— Je serais là pour te soutenir, si seulement tu acceptais la main que je te tends.
— Diego, je m'entends murmurer contre ses lèvres, dans un vibrato pitoyable que je ne reconnais même pas comme le mien.
Bam, bam, bam.
Une terrible litanie.
Une sinistre mélodie.
Mais lorsque son regard trouve le mien, brûlant d'une manière que je ne lui ai jamais vu, j'oublie tout et me laisse porter.
J'oublie papa, j'oublie Luther. J'oublie Klaus. J'oublie la fin du monde.
Ne reste que ce garçon pour lequel mon âme semble avoir été fondée. Ne reste que Diego, l'unique objet de mes désirs et le poison de toute mon existence.
— Tu me rends fou... Tu le sais, ça ?
Sa voix résonne en moi, comme un appel à lâcher prise, et tout devient trop dur, lorsque ses lèvres pulpeuses caresssekt les miennes de la sorte.
— Ferme là.
Je ne tiens plus. Tout mon être s'illumine, sa simple présence me suffit, et mes lèvres s'écrasent contre les siennes dans un besoin désespéré.
Plus qu'un baiser, c'est un véritable supplice. Parce qu'il est mon oxygène, ce que mon âme a besoin pour se sentir enfin bien.
Il me dévore. Me ravage. Et je dois être maso, car j'en demande encore.
Diego Hargreeves est tout ce dont j'ai toujours eu besoin. Et l'apocalypse peut bien avoir lieu, s'il est à mes côtés, je suis prête à me battre sans jamais rien lâcher. Parce qu'il est tour ce dont j'ai besoin. Mon âme, mon poison, ma déchirure et ma faiblesse.
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Ꮜꮇᏼꭱꭼꮮꮮꭺ Ꭺꮯꭺꭰꭼꮇꭹ ///Terminée\\\
FanfictionÀ la douzième heure du premier jour d'octobre 1989, quarante trois femmes à travers le monde donnèrent naissance à un enfant. Le seul facteur commun était qu'aucune de ces femmes n'étaient tombés enceintes auparavant. Sir Reginald Hargreeves, millia...
Chapitre 11
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