Le Murmure du Silence [en pause]

51- Ceux que l'on est devenu

Chanson : Waves - Dean Lewis

"Même si on ne peut choisir d'où
l'on vient, on peut choisir où l'on
va à partir de là"

Nate regarda l'horizon, assis sur le toit de sa petite maison. L'océan était agité, le vent y soufflait fort en cette froide journée d'hiver. Les nuages gris emplissaient le ciel sans aucune percée de soleil à l'horizon pour réconforter les cœurs chahuté comme celui de Nate. Le jeune homme regardait le paysage tandis que des maigres flocons tombaient sur ses cheveux sans la moindre once d'émotion. Il n'avait plus envie de rien, de penser, de respirer. Il n'avait que hâte de quitter Marblehead, puis s'installer en Floride en compagnie de Kat probablement. Elle irait y retrouver sa meilleure amie tandis que Nate poursuivrait ses études en médecine. Il avait envie de changement, il n'en pouvait plus de la routine de plus en plus alourdissante qu'il se contentait de vivre continuellement.

Le grand blond ne voulait pas couper les ponts avec qui que ce soit, il voulait garder contact avec tout le monde, mais, surtout, il voulait les voir dans d'autres endroits que le Massachusetts. C'est vrai que Nate aimait cet endroit, la mer, le phare, le magasin, la cabane et même l'école. Il redoutait de passer à l'étape supérieure, de faire le grand saut et aller étudier ailleurs. Pourtant, il se sentait prisonnier. Le jeune homme savait que s'il ne quittait pas cette ville au plus sacrant, il risquait de ne jamais en sortir. Il risquait de finir comme Simon, son grand frère qui avait mis toutes ses ambitions personnelles de côté de façon à rester avec sa famille. Bien qu'il respecte ce choix, Nate ne l'avait jamais compris.

Il n'aimait pas ne pas comprendre, il détestait ne pas être en mesure de savoir ce qui pousse les gens à commettre certains actes au lieu de d'autres. Ne pas être en mesure de comprendre les décisions des gens le mettait en rogne. À l'époque où il lisait beaucoup plus qu'aujourd'hui, il arrivait à Nate de se fâcher et de râler après des personnages fictifs pour avoir pris de bien trop mauvaises décisions. Une fois, il était même jusqu'à aller écrire un courriel à un certain auteur comme quoi la fin de son roman était fâcheuse et irréaliste. Il n'avait jamais eu de réponse d'ailleurs.

Malgré ses airs nonchalant et un peu idiot, Nate était doté d'une étonnante pensée critique. Même ses amis les plus proches semblaient l'oublier parfois. La vision du monde qu'avait le grand blond était authentique et inébranlable. Il se disait qu'en gardant ses plus profondes opinions pour lui, personne n'arriverait jamais à les changer. À le changer lui.

C'est au moment où Nate allait se lever qu'il vit, du coin de l'œil, une jeune fille s'asseoir près de lui. Il se retourna et vit, sans surprises, qu'il s'agissait de Daphné. Le jeune homme ne prit même pas la peine de la saluer, toujours fâché contre cette dernière. Alors que Nate était au plus bas il y a à peine deux semaines, le soir où il était parti se réfugier chez Kat, Daphné n'avait pas tout à fait tenu son rôle de meilleure amie. Nate l'avait appelée, lui demandant s'ils pouvaient parler car, il en avait besoin. La jeune fille lui avait répondu qu'elle n'était pas d'humeur et qu'ils en reparleraient le lendemain. Chose qui ne s'était, soit dit en passant, jamais produite.

- Écoute Nate, j'ai vu que tu étais fâché alors je tenais à m'excuser, elle dit doucement.
- Il est pas un peu deux semaines trop tard pour ça? cracha le grand blond.

Le ton froid qu'avait utilisé Nate fit mal au cœur à Daphné. Si seulement il savait ce qui se tramait dans sa vie à cet instant, peut-être serait-il davantage compréhensible envers elle. Tout d'abord, il y avait tous ces problèmes entre elle et Gabriel. Aussi, elle s'était tout récemment disputée avec son père; chose qui n'était jamais arrivée auparavant. Là encore, il était question de Gabriel. Son père lui reprochait de s'empêcher de vivre à cause des frictions entre elle et son copain. Bien qu'elle sache que Gabriel n'était pas tout dans la vie, c'était difficile, voir impossible pour la jeune fille de se figurer une vie sans lui.