50- Comme une première fois

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Chanson : California - Charlotte Cardin

"Quand je t'ai vu, j'ai eu peur
de te rencontrer. Quand je t'ai rencontré, j'ai eu peur de
t'embrasser. Quand je t'ai
embrassé, j'ai eu peur de t'aimer"

S'il y avait bien une chose à savoir sur Chuck, le joueur de hockey, c'était que, pour lui, chaque prétexte était bon pour faire une fête, même Ernest qui prétextait s'ennuyer; le grand blond baraqué ne manquait jamais de virer ses parents de la maison afin de montrer à tous à quel point sa demeure était grande et belle. Ernest ne trouvait pas qu'il profitait de son ami, il adorait faire la fête et célébrer, puis boire. N'empêche, ce soir il devrait se tenir à carreau le plus possible, ne serait-ce que pour Ray.

Cette fête n'était qu'une mascarade, un paquet d'acteurs présent dans le seul but de créer la mise en scène parfaite. Ernest se serait cru dans l'un de ces films d'espionnage dans lequel tout le monde est manipulé sans même le savoir où le comprendre. Le grand brun se sentait comme un super espion, un agent double. Il adorait le sentiment que cela lui procurait, cette sensation machiavélique et à la fois si satisfaisante. Anna ne cessait de lui répéter qu'il n'était pas subtil, à se cacher derrière les divans et comptoirs, se déplaçant à l'aide de roulades peu gracieuses à même le sol, mais il s'en moquait, cela l'aidait à se mettre dans le bain.

Toute la journée, il avait appréhendé ce moment, le moment où il aurait droit au baiser de la bouteille le plus authentique depuis des lustres. Tout était près, tout était planifié. Il fallait d'abord s'assurer que tout le monde ait bu suffisamment pour que rien ne paraisse louche, il fallait prendre une bouteille précise que Ray s'était entraîné à tourner toute la journée afin qu'elle arrive pile devant lui, faire en sorte que Gabriel soit assis en face de lui, puis laisser le charme opérer. Avec un peu de chance, ils finiraient tous deux dans une chambre au deuxième étage, de préférence. Même si la musique était forte, il n'était pas rare d'entendre des bruits désagréables.

Seul problème, Ernest se connaissait, comme il connaissait Anna. Il savait que la majorité de leurs plans, même les mieux échelonnés, finissaient inévitablement par tomber à l'eau. Le latino espérait réellement que, cette fois, ce ne serait pas le cas. Ray tenait réellement au fait de faire un pas en direction de Gabriel et, puisqu'il n'osait pas le faire par lui même, c'était tout naturel pour ses amis de l'y aider.

Anna regardait Ernest faire le con tout en surveillant la porte. Elle adorait voir le grand joueur de hockey se ridiculiser, cela lui procurerait une satisfaction sans égale. Il avait l'air d'avoir cinq ans, mais c'était plutôt divertissant. La blonde ne s'en lassait jamais. Elle dut toutefois détourner les yeux de ce dernier comme Gabriel venait d'entrer dans l'immense habitacle. Anna alla prévenir Ray qui, à cet instant, s'était improvisé barmaid. Il laissa ce poste à son amie près de lui avant de se diriger dans l'entrée, retrouver celui qu'il attendait tant depuis de longues minutes.

Le grand brun sourit en le voyant près de lui. Il haussa les manches de son chandail noir puis s'approcha de Ray, quoiqu'en laissant une distance respectable entre eux. Il ne voulait pas paraître trop intéressé, surtout qu'il savait Anna dans la même pièce qu'eux et qu'il ignorait tout de sa relation avec Ray. Ne sachant pas comment commencer la conversation, il dit la première chose lui passant par la tête en cet instant.

- Sam et Lou sont là? demanda Gabriel.

Ray tenta de cacher sa déception, il aurait préféré que ce ne soit pas la première question que lui pose le joueur de baseball en arrivant ici. Cela démontrait, en quelque sorte, qu'il n'en avait pas grand-chose à faire de lui. Agacé, Ray n'eut qu'envie de lui dire en pleine face que s'il ne s'était pas envie de le voir, il n'aurait pas dû venir.

Le Murmure du Silence [en pause]Where stories live. Discover now