Magie complémentaire

Ananas

Harry et Drago étaient installés à la petite table, face à face, mangeant en silence un gâteau à l'ananas. Ni l'un ni l'autre n'était friand de la pâtisserie, mais Hermione l'avait cuisiné avant qu'ils ne partent. Une vie plus tôt presque.

Lorsque Hermione avait préparé ce gâteau, Harry était persuadé qu'il allait mourir mais que tout irait bien pour Drago. Il était certain que la mort de Voldemort réglerait tous les problèmes et qu'après la fin de la guerre, le monde magique entrerait dans une période de paix bienheureuse.

Et voilà qu'ils étaient cachés de nouveau. Harry avait survécu et s'il avait culpabilisé d'avoir eu pour une fois de la chance alors que beaucoup avaient perdu la vie, il en était heureux. Sans lui, Drago serait déjà à Azkaban ou mort, il n'avait aucuns doutes sur ce point.

Après avoir fui le champ de bataille, lorsque Tonks était venue les prévenir que Drago était en danger, Harry avait paniqué et l'avait entraîné dans Poudlard. Il n'avait pensé qu'à la salle sur demande, se souvenant qu'ils ne pourraient pas être trouvés s'ils ne le voulaient pas.

Et Harry ne voulait pas que Drago lui soit enlevé. Pas quand il avait enfin la perspective d'un avenir agréable.

Une fois à l'abri, ils s'étaient disputé. Après tout, ils ne changeaient pas. Ils restaient eux-même. Harry et Drago.

Le Serpentard s'était enfermé dans un silence maussade pendant de longues minutes, recroquevillé dans un coin, semblant pensif. Harry l'avait laissé, sachant parfaitement qu'il avait besoin parfois de s'isoler un peu pour faire le point dans ses pensées.

Harry pour sa part allait et venait nerveusement, se sentant bouillir. Il n'avait pas eu le temps d'assimiler tout ce qui s'était passé. Ils s'étaient battus contre Voldemort. Il était mort, au moins quelques instants. Drago avait pu tuer Voldemort, et avait neutralisé les Mangemorts - d'une façon qu'il n'avait pas encore comprise. Puis, il était revenu à la vie, probablement parce que Drago l'avait voulu et que leurs magies étaient liées.

Avant qu'ils n'aient le temps de se réjouir d'avoir mis fin à la guerre interminable qu'ils avaient connu toute leur vie, leur monde avait basculé une fois de plus. Loin d'être enfin libres, ils devaient se cacher encore pour d'obscures raisons...

D'un coup Drago se leva.

- Tu devrais les rejoindre. Tu ne risques rien toi.

Harry fronça les sourcils.

- Je ne te laisse pas. Toi et moi, tu te souviens ?

Le blond leva les yeux vers lui et son regard semblait éteint. Il haussa les épaules d'un air indifférent.

- Tu mérites de vivre libre, pas d'être obligé de fuir pour rester à mes côtés.

C'était à cet instant que la dispute avait commencé. L'un et l'autre ne cédait pas un pouce de terrain, les deux refusant de s'expliquer. Enragé à l'idée que Drago ne soit arrêté alors qu'il s'était montré héroïque, Harry l'avait bousculé prêt à se battre avec lui.

Et d'un coup, ils s'étaient calmés, se dévisageant.

Drago n'était pas du style à étaler ses sentiments, préférant rester secret. Harry n'était pas forcément à l'aise pour parler de ce qu'il pensait, mais il avait pris l'habitude de s'ouvrir pour pouvoir communiquer avec son ami plus facilement. Alors, il obligea le jeune homme à venir dans ses bras.

- Je reste avec toi, je te l'ai déjà dit.

- Stupide Gryffondor borné.

Harry avait gloussé et s'était laissé aller dans les bras de Drago, les yeux fermés, heureux de le sentir contre lui.

Puis, Severus était arrivé, un long moment plus tard. Il les avait observé sans un mot puis avait soupiré.

- Mieux vaudrait que vous retourniez dans votre cabane quelques temps. Au moins le temps que les choses ne se tassent un peu et que l'ordre ne revienne dans le monde magique.

Drago n'avait pas répondu, de nouveau maussade. Harry avait haussé les épaules.

- Les autres sont en sécurité ?

- Minerva s'en est assuré. Les Serpentard qui sont restés ne portent pas la marque et Miss Granger s'est montrée très... claire sur leur aide inestimable pendant la bataille.

Depuis qu'ils étaient revenus dans la cabane, ils n'avaient pas encore échangé un mot. Ils se regardaient, hésitaient, mais ne parvenaient pas à se décider à aborder le sujet qui les préoccupait.

Drago craqua en premier.

- Tu pourrais être en train de savourer la gloire d'avoir sauvé tout le monde.

Harry leva un sourcil surpris avant de grogner d'un air agacé.

- Ou je serais déjà à Azkaban pour la traîtrise dont j'ai été accusé en survivant une fois de trop...

Ils se défièrent du regard avant de se mettre à rire brusquement. Ce n'était pas un rire joyeux, c'était plutôt le déchargement de leurs émotions.

- Ce gâteau est ignoble.

Harry se redressa et poussa sa chaise brusquement avant d'aller enlacer Drago.

- Ne te sens pas coupable, je voulais rester à tes côtés.

- Nous ne pourrons pas fuir éternellement, Potter. Et tu sais parfaitement que tu ne supporteras pas de vivre en reclus loin de tes amis !

- Cesse de penser que je suis incapable de...

- Tu es capable de tout, Harry, je le sais parfaitement. Mais je sais aussi que tu es un héros dans l'âme et que tu es toujours prêt à te sacrifier. Dois-je te rappeler que tu t'es précipité au devant de la mort ?

- Et donc ? Que proposes-tu Drago ?

- En premier lieu, ne sois pas impulsif. Nous pouvons toujours nous... reposer un peu ? Après tout, nous avons passé de bons moments ici, à notre arrivée ?

Harry se mit à rire en serrant Drago un peu plus fort entre ses bras.

- Bien entendu que nous avons passé de bons moments, et nous n'étions pas amis encore !

Drago hésita.

- Et sommes nous amis, maintenant ?

Harry se mordilla la lèvre, rougissant. Puis, il secoua la tête en signe de négation et Drago se dégagea brusquement, soudain pâle.

Mais le Gryffondor ne lui laissa pas la possibilité de s'écarter réellement.

- Non Drago. Nous ne sommes pas amis. Nous sommes tellement plus que ça.

Les yeux de Drago étincelèrent, brillèrent, devenant tel du mercure liquide à l'instant où il prit conscience des mots de Harry. Le Serpentard se laissa attirer contre le torse de Harry en pensant que finalement, ils arriveraient peut être à trouver le moyen d'être heureux. Tant qu'ils restaient ensemble.