Blanc

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Dans la vie de Severus Rogue, les choses avançaient de façon tout à fait banales.

Il continuait de donner ses cours de potions à Poudlard, ôtant des points aux Gryffondor - même si sa cible privilégiée n'était plus présente. Il restait le directeur de maison de Serpentard, veillant à ce que les chères têtes blondes restent dans le droit chemin - autant que faire ce peut avec des rejetons de Mangemorts.

Albus l'ignorait désormais. Il n'était plus espion alors il n'avait plus vraiment d'utilité. Surtout que sa tête avait été mise à prix après tout.

Les élèves le craignaient toujours autant, continuant de le dépeindre comme la terreur des cachots. Que Minerva passe du temps avec lui, à converser, ne changeait rien à l'affaire.

Il continuait de suivre les réunions de l'Ordre du Phénix. Sauf qu'il était évincé des réunions confidentielles, celles où les sujets sensibles étaient évoqués.

Étrangement, il n'avait pas été vexé. Il n'avait pas même réagi. On lui avait demandé de ne pas venir, il avait acquiescé avant de se rendre dans la bibliothèque du Square Grimmaud pour s'y installer avec un livre.

Sa réaction avait déstabilisé Dumbledore, qui avait probablement pensé qu'il allait protester. A une époque, Severus aurait probablement protesté parce qu'il se serait senti rejeté.

Alors qu'il fixait le livre ouvert sur ses genoux, les sourcils légèrement froncés, Severus essayait de comprendre pour quelle raison il ne se préoccupait pas de ces fichues réunions secrètes.

Après tout, s'il était là, c'était pour Lily. Pour venger sa mort et protéger son fils. C'était pour elle qu'il avait risqué sa vie quasi quotidiennement pendant la dernière décennie.

Ses pensées dévièrent vers Harry Potter et il se souvint avec une pointe de fierté que le Gryffondor lui avait offert sa confiance. Il aurait pu demander l'aide de n'importe qui d'autre, mais il lui avait offert sa confiance. Harry Potter avait confié sa vie à son exécrable professeur de potions. Celui là même qui l'avait si mal traité pendant sa scolarité.

C'était peut être ça ce qui lui permettait d'ignorer son éviction des réunions de l'ordre. Savoir qu'il était le seul lien de Harry et Drago - les deux adolescents les plus recherchés du monde magique.

Il avait rejoint les Mangemorts pour les mauvaises raisons. Il avait voulu appartenir à un groupe, ne plus être seul. Ne plus se sentir si mal à chaque fois que les Maraudeurs ne l'insultaient. Face à Voldemort, il aurait du être heureux d'acquérir la puissance de se libérer de ses démons. Mais la marque avait été une épreuve, et il avait eu un goût de cendres en bouche, alors qu'il prenait conscience qu'il s'était trompé.

Loin de se libérer il s'était enchaîné de la plus cruelle des façons.

Quand il avait craint pour la vie de Lily, il avait fait la seule chose qui lui paraissait sensée. Il avait couru vers Dumbledore, vers l'homme qui ne l'avait jamais aidé auparavant, pour mendier son pardon et son aide.

Mais Lily était morte malgré tout, et il avait tenu son corps sans vie encore chaud entre ses bras, pleurant sur les erreurs qu'il avait faites.

Il avait juré de venger son amie, la seule femme qu'il avait trouvé parfaite. Il s'en était remis à Dumbledore, parfaitement conscient d'échanger une prison pour une autre.

Dumbledore était un maître moins cruel que Voldemort, mais il était un vieux manipulateur qui l'utilisait sans vergogne.

Severus s'en moquait, il en était conscient, mais il estimait qu'il le méritait. Il devait expier ses fautes et une vie de servitude ne serait pas de trop pour soulager un peu le poids qui pesait sur sa conscience.

Face à son filleul et à Harry pourtant, il s'était senti apaisé pour la première fois de sa vie. Il leur avait prêté allégeance, pas directement puisque le Gryffondor aurait protesté. Mais au fond de son cœur, il avait juré qu'il leur appartenait et qu'il ferait tout ce qu'ils exigeraient.

Sauf que cette fois, il ne s'était pas senti sali ou humilié. Il avait juste l'impression d'être à sa place et de faire ce qu'il fallait.

Et Severus avait pris conscience que depuis qu'il savait où étaient les deux garçons, il n'avait eu de cesse de leur trouver des soutiens. Des gens fidèles. Pas des esclaves comme Voldemort. Pas des subordonnés comme Dumbledore.

Juste un groupe de gens qui croyaient en eux et qui étaient prêts à les suivre jusqu'en enfer...

Il leva les yeux lorsque Remus entra dans la pièce. Avant, il se serait crispé, parce que Remus évoquait toujours le souvenir des Maraudeurs et de leurs farces cruelles. Remus était celui qui avait compris le premier qu'ils l'avaient poussé dans les ténèbres et le loup garou semblait désolé à chaque fois qu'ils se croisaient. Mais Severus refusait d'aborder le sujet, allant jusqu'à ce montrer cruel pour l'éloigner.

Le Mauraudeur s'installa face à lui avec un léger sourire. Quelques secondes plus tard, les jumeaux Weasley entrèrent et fermèrent la porte derrière eux.

Ils se dévisagèrent eux et lui, avant que l'un des deux - il n'avait jamais su les reconnaître, et les avait toujours considérés comme une entité unique - ne pose brusquement une oreille reliée à un long fil blanc, lui même terminé d'une petite oreillette.

Le jumeau prit la parole.

- Oreille à rallonge, invention exclusive Weasley. L'idéal pour assister à une réunion confidentielle à laquelle on est... exclu.

Severus observa l'objet avec fascination, reconnaissant que les deux phénomènes avaient un talent certain. Le second jumeau prit la parole.

- Harry est un frère pour nous, donc... nous ferons notre maximum pour vous aider, Professeur Rogue...

- ... en espérant que nos plaisanteries passées soient... oubliées.

Severus afficha un sourire sarcastique tandis que Remus gloussait doucement. Le Maître des potions hocha brièvement la tête avant de prendre la parole.

- Et ça fonctionne ?

Les deux frères échangèrent un regard et le même sourire amusé prit place sur leurs lèvres.

- Si ça fonctionne ?

- Bien entendu !

- Comment saurions-nous sinon que Dumbledore a demandé à Maugrey d'attendre le dernier moment face à Vous-savez-qui pour tuer son serpent adoré ?

Severus hoqueta.

- Nagini ?

- Celui-là même.

Le maître des potions retint sa respiration un instant, avant que la conclusion logique ne le percute avec la force d'un cognard.

Nagini était un horcruxe.

Magie complémentaireWhere stories live. Discover now