Magie complémentaire

Désherber

Molly Weasley s'était levée avec un étrange pressentiment. Lorsque le hibou de son fils arriva, elle prit le parchemin avec un nœud à l'estomac. Mais elle haussa les épaules en se disant que rien ne pouvait arriver à Poudlard.

Cependant, son teint vira à l'écarlate en lisant la lettre de Ron.

Quand son mari descendit prendre son petit déjeuner, il préféra rester silencieux en voyant sa femme habituellement joyeuse poser brusquement sa tasse de café devant lui. Il lui sourit et se dépêcha avant de partir à toute vitesse au Ministère. Arthur avait appris depuis longtemps que le secret d'un mariage heureux avec Molly était de la laisser se calmer avant de discuter avec elle...

Molly tourna en rond une bonne partie de la matinée en marmonnant, furieuse. Plusieurs fois, elle s'apprêta à envoyer une beuglante, mais compte tenu des mots de Ron, impliquant Dumbledore, elle allait devoir modérer ses ardeurs et attendre patiemment pour avoir des explications.

Finalement, la matriarche retrouva son calme en faisant une liste des corvées que sa chère fille aurait à faire pendant les vacances pour expier ses fautes.

Ginny allait probablement se présenter la bouche en cœur, persuadée de passer d'agréables vacances. Mais elle allait découvrir que le jardin avait besoin d'être désherbé, dégnomé. Sans compter tous les menus travaux prévus depuis des lustres mais que les Weasley avaient repoussé faute de temps...

Lorsque Ginny arriva au terrier, joyeuse et insouciante, Molly l'attendait de pied ferme. Et l'enfer se déchaîna au terrier.

Après les cris de colère, vint le temps des explications. Et ce fut une Ginny en larmes qui avoua tout. Oui, elle avait répandu des rumeurs sur Harry parce qu'il ne l'aimait pas. Oui, elle avait espionné son frère et Hermione, persuadée qu'ils savaient où était le Sauveur.

Mais la jeune fille ajouta qu'elle avait suivi les ordres de Dumbledore. Le Directeur de Poudlard lui avait glissé dans l'oreille qu'elle pourrait avoir Harry si elle le collait de près - ce qu'elle avait fait.

Sa disparition avait rendu le vieux sorcier fou de rage et il lui avait glissé dans l'oreille que répandre des rumeurs ferait revenir Harry : ce dernier n'avait jamais su résister à la provocation.

Mais Harry n'était pas revenu.

Alors, Dumbledore l'avait chargé de surveiller les deux membres restant du trio. Parce que selon lui, Harry ne pouvait pas avoir fui seul. Il ne pouvait pas avoir eu simplement l'idée de quitter le combat de cette façon seul.

Après avoir puni sa fille, Molly était restée silencieuse, faisant face à Arthur. Les révélations de leur fille avaient ébranlé toutes leurs convictions.

Depuis des années, ils suivaient le leader de l'Ordre du Phénix aveuglément, croyant chacune de ses paroles. Ils avaient placé toute leur confiance en lui, et aujourd'hui, ils découvraient que peut être l'homme de bien n'était pas si bon qu'il le prétendait.

Molly prit une inspiration tremblante et regarda Arthur, l'air un peu perdu.

- Il s'est servi de ce pauvre Harry. Il nous a utilisé.

Arthur acquiesça lentement, calme malgré la colère qui brûlait dans ses yeux.

Les époux en étaient finalement arrivés à une conclusion : ils ne devaient plus avoir confiance en Dumbledore, et ils devaient informer Remus et Tonks qui se mettraient obligatoirement du côté de Harry.

Une fois la décision prise, Molly se relâcha, et la colère s'évapora pour laisser place à l'inquiétude. Elle laissa échapper un sanglot.

- J'espère que Harry va bien...

La conversation avec Remus et Tonks avait été tendue. Au début l'ancien Maraudeur n'avait pas voulu y croire. Il devait tellement à Dumbledore qu'il ne pouvait pas imaginer que ce dernier se soit montré aussi manipulateur et qu'il ait autant fait de mal au fils de son meilleur ami.

Ils passèrent la nuit à discuter tous les quatre, se faisant l'effet d'être des comploteurs. Et c'était ce qu'ils étaient au final.

Ils s'associaient pour venir en aide à Harry Potter. Le Sauveur. Mais avant tout un adolescent qu'ils avaient appris à apprécier, et qu'ils voulaient sauver.

Au petit matin, Remus n'avait plus aucun doute concernant la duplicité de Dumbledore. Et il s'inquiétait pour Harry, le dernier lien avec James, avec les Maraudeurs.

- Nous allons devoir faire très attention à ce qui se dit pendant les réunions de l'Ordre. A ce que Dumbledore dit. S'il... S'il nous a manipulé de cette façon au sujet de Harry, alors il nous cache certainement énormément de choses.

Tonks avait acquiescé aux paroles de son mari.

Ils s'étaient tous tus, par la suite, buvant le café préparé par Molly. Il n'y avait pas besoin d'ajouter quoi que ce soit après tout.

Ils avaient tous suivi Dumbledore parce qu'il était celui qui s'était élevé contre Grindelwald. Il était celui qui l'avait arrêté. Mais... Mais peut être auraient-ils du se méfier de l'amitié qu'il y avait eu avant cette histoire, se souvenir qu'à une époque, Albus Dumbledore et Gellert Grindelwald avaient été proches et avaient eu un projet en commun.

Maintenant, ils apprenaient que leur leader se servait d'enfants pour espionner d'autres enfants.

Arthur était un homme de peu de paroles. Habituellement, dans son couple, c'était sa femme qui parlait. Cette fois-ci pourtant, il échangea un regard avec Molly, si inquiète, et s'éclaircit la voix avant de prendre la parole.

- Nous devrions prévenir les enfants. Leur dire de continuer de se méfier. Leur dire qu'ils peuvent nous faire confiance.

Tonks soupira.

- Mais ça pourrait être dangereux si Dumbledore lit le courrier des gosses. Nous sommes en temps de guerre et il peut le justifier en prétendant qu'il veut vérifier qu'il n'y ait pas de jeunes Mangemorts à Poudlard.

Molly grogna.

- Alors on les laisse livrés à eux même ? Harry est probablement en danger d'ores et déjà. Ce sont des enfants !

Remus avait l'air malade, et il parla visiblement à contrecœur, en serrant les dents.

- Je déteste avoir à dire ça, mais oui, on va devoir les laisser se débrouiller. Molly, ils sont malins et... Par Merlin... Ils en ont plus vu que n'importe qui d'autre. J'aimerais tant qu'ils soient tous à l'abri, loin de tout ça. Mais nous sommes en guerre.

Ginny entra dans la pièce et quatre regards se posèrent sur elle. Elle rougit violemment et détourna la tête avant de s'enfuir, des larmes plein les yeux.

Tonks soupira.

- Ne soyez pas trop dure avec elle, Molly. C'est encore une enfant. Nous avons tous fait confiance à la mauvaise personne ici... C'est ce qu'elle fera ensuite qui déterminera qui elle est.