Magie complémentaire

Muselière

Lorsque Severus arriva Square Grimmaud, il devina tout de suite qu'une réunion était en cours. Une de ces réunions desquelles il était évincé maintenant. L'endroit était désert, au lieu de l'agitation permanente habituelle.

Tout était sombre et les portes étaient fermées. Pourtant, il entendait un léger murmure signe que quelqu'un parlait, sans pour autant comprendre ce qui se disait.

Il hésita un bref instant à faire demi-tour, mais Dumbledore lui avait demandé - ordonné - de venir, et il ne voulait pas attirer l'attention. Se mettre Albus davantage à dos n'aiderait en rien, aussi, mieux valait qu'il continue de faire profil bas, même si tout son être se rebellait de la situation.

Le maître des potions n'avait aucun doute que ce n'était pas une coïncidence qu'il soit appelé pendant une réunion, pour lui montrer qu'il était mis à l'écart et l'humilier un peu plus.

Il n'eut que le temps de faire quelques pas dans la demeure sinistre qu'il fut attrapé par deux tornades rousses et entraîné rapidement dans la bibliothèque.

Une porte verrouillée et un sortilège de silence plus tard, il se tenait, bras croisé et visage fermé, face aux jumeaux Weasley. Loin de s'inquiéter de son air sombre, les deux rouquins eurent un large sourire.

- Professeur...

- C'est une joie de vous revoir.

Severus grogna et les fusilla du regard. Il détestait leur manie de terminer les phrases de l'autre autant que leur air éternellement joyeux. Indifférents à son humeur, ils reprirent.

- Pourriez-vous nous donner des nouvelles...

- De Ron, Hermione et Harry ?

Le maître des potions soupira.

- Ils iront bien mieux que vous, si vous ne cessez pas de parler ensemble.

Un gloussement lui répondit, mais l'un des deux - Fred, à moins que ça ne soit George - fut le seul à parler.

- Donc, comment vont-ils ?

- Parfaitement bien compte tenu des circonstances. Et ils sont toujours en sécurité.

Les jumeaux gloussèrent, mais Severus nota l'air sérieux dans leurs yeux et il pensa soudainement qu'ils cachaient bien leur jeu ces deux-là. Sous leurs airs de comiques insouciants, ils étaient finalement plus au fait de la situation que leur entourage ne voulait bien le penser.

Severus dut avouer que ces deux là avaient l'étoffe pour être de parfaits espions, finalement. Insoupçonnables. De par leur facéties, ils se faufilaient n'importe où, et tout le monde les ignorait.

Ils étaient si pénibles que personne ne trouvait étrange de les voir traîner aux endroits où ils ne devraient pas être. Et personne ne pensait un seul instant que les deux garçons puissent faire attention à ce qui se passait.

D'un coup, le professeur de potions qui avait détesté les avoir comme élèves les regarda sous un nouveau jour. Presque comme des égaux. En tous cas, avec bien moins d'agacement qu'avant.

Les deux garçons échangèrent un regard et se penchèrent vers lui avec des mines de conspirateurs.

- Nous avons des informations.

- Des informations capitales je dirais.

Severus leva les yeux au ciel.

- Personne n'a jamais pensé à utiliser de muselière sur vous ?

Loin d'être vexés, ils ricanèrent. Finalement, Severus grogna et capitula.

- Quelles informations ?

Les deux garçons échangèrent un regard amusé, et s'approchèrent un peu plus de Severus.

- Il est possible que tout à fait par hasard...

- Même sans le vouloir...

- Nous ayons surpris une conversation.

Leur sourire se fit rusé. Severus, les bras croisés sur sa poitrine, leur jeta un regard noir pour les décider à parler plus rapidement. Finalement, les deux garçons reprirent.

- Dumbledore s'est vanté auprès de ce cher Fol'Oeil qu'il avait un certain objet en sa possession.

- Un objet important pour Vous-savez-qui.

Les jumeaux se turent, les yeux pétillants, attendant probablement une explication. Severus n'hésita même pas à assouvir leur curiosité. Il avait décidé durant leur court entretien qu'ils étaient dignes de confiance, tout autant qu'ils auraient largement eu leur place à Serpentard.

Il étira ses lèvres en un semblant de sourire.

- L'objet est un horcruxe. C'est de la Magie Noire, qui vise à diviser son âme pour en placer une partie dans un réceptacle.

Les deux garçons eurent une expression révulsée.

- Merlin ! Pourquoi quelqu'un voudrait il faire une chose aussi atroce ?

Severus haussa les épaules, essayant de prendre un air nonchalant bien qu'il ressente toujours autant de dégoût face à la méthode.

- Pour une parcelle d'immortalité. Tant que ces choses ne sont pas détruites, il pourra revenir. C'est pour ça qu'il n'est pas mort la dernière fois.

Les jumeaux se regardèrent en silence, et Severus eut l'impression qu'ils avaient un échange silencieux, compréhensibles d'eux seuls. Lorsqu'ils reportèrent leur attention sur leur ancien professeur de potions, ils étaient un peu plus graves que précédemment.

- C'est donc une information capitale pour Harry ?

- Effectivement.

Ils échangèrent un nouveau regard et hochèrent la tête simultanément avant de se tourner vers Severus.

- Donc il serait utile de pouvoir l'avertir au plus vite de ce genre de choses ?

- Bien entendu, mais...

Severus allait leur rappelait que Potter devait rester caché et injoignable quand le second jumeau prit la parole avec un rictus amusé.

- Tout en gardant les règles de sécurité qui le maintiennent en vie. Bien entendu.

Le maître des potions fronça les sourcils, ce qui eut pour seul résultat de les faire gloussa. Un bref instant il songea s'énerver mais il devait avouer qu'il trouvait rafraîchissant de se trouver face à quelqu'un qui ne s'émouvait pas de son air renfrogné. Il savait qu'ils n'avaient jamais eu peur de lui, même à Poudlard, mais il s'en rendait réellement compte à cet instant précis.

Il soupira et hocha la tête.

- Bien entendu. Quelle est votre idée ?

Les jumeaux se claquèrent dans la main, visiblement ravis.

- Nous sommes en train de travailler sur un moyen de communiquer à distance...

- Harry nous a beaucoup parlé des technologies moldues...

- Et nous avons pensé l'adapter en partie.

Severus plissa le nez.

- Communiquer à distance ? Comme par hibou ?

- Plus quelque chose d'instantané Monsieur. Qu'ils puissent appeler à l'aide ou recevoir des nouvelles.

- Et vous avez la solution ?

- C'est en cours de développement, Monsieur...

- Et nous pourrons vous présenter le produit d'ici quelques jours.

Le professeur de potions fronça les sourcils.

- Le produit ?

- Bien entendu...

- Vous n'imaginez pas ce que c'est utile de pouvoir tester en situation pratique...

- Ça facilite énormément la commercialisation...