Panneaux

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Lucius perdit son air assuré en retournant au Manoir Malefoy. Même s'il avait montré une façade impassible devant Severus, il devait avouer qu'intérieurement il était inquiet.

Il avait conscience de jouer avec le feu, de se tenir sur la corde raide. Il n'avait pas l'expérience de Severus pour le rôle d'espion, ni son sang-froid. Mais comme il l'avait dit, il voulait que la guerre se termine au plus vite.

Severus n'avait pas donné de détails sur ce qu'étaient les objets qu'il lui avait remis. Mais il se doutait qu'ils étaient importants. Extrêmement importants.

Il était loin d'être stupide et il se pensait qu'ils pouvaient avoir une importance capitale sur le déroulement de la guerre. C'était probablement la seule façon de mettre fin à toute cette folie.

Lucius ne pensait pas risquer grand chose en se débarrassant du crapaud rose du Ministère. Voldemort ne l'appréciait pas réellement après tout. Et elle n'avait qu'un rôle mineur dans les plans du Maître. Mais il y avait toujours un risque, puisque parfois les réactions du Seigneur des ténèbres étaient imprévisibles. L'homme devenait de plus en plus fou. Il s'enfonçait dans un tourbillon de cruauté sans fin et même les plus aguerris parmi les Mangemorts avaient parfois des hésitations à obéir aux ordres.

Mais tous avaient bien trop peur pour s'opposer à lui.

Le Manoir était silencieux. Voyant les lieux désert, Lucius se crispa, espérant n'avoir rien manqué d'important.

Pour une fois cependant, il eut l'impression que la chance était de son côté. Le Maître était dans le petit salon, à siffler Merlin sait quoi à son immonde serpent. Profitant de l'occasion, l'aristocrate observa l'animal avec soin.

Il n'avait pas peur des serpents mais cet immense reptile lui avait toujours donné la chair de poule. Peut être parce qu'il était empli de Magie Noire comme le lui avait confirmé Severus. Peut être parce qu'il avait une façon trop humaine de dévisager les gens. Peut être parce qu'il pressentait que Nagini était plus qu'un simple familier.

Celui qui fut un homme et son serpent semblaient converser comme deux vieux amis. Il était évident que Voldemort n'avait confiance qu'en l'animal. Et qu'il l'adorait, au delà de tout.

Il nota dans un coin de son esprit qu'il faudrait mettre fin à la vie de Nagini juste avant l'attaque finale. Quand Potter serait prêt - s'il pouvait être prêt un jour.

A cette pensée, Lucius pensa brièvement à son fils. Quoi qu'il pense de Drago, il ne pouvait pas nier qu'il était intelligent. S'il avait choisi Potter, alors qu'ils n'avaient jamais été amis, c'était qu'il devait avoir vu quelque chose chez le Sauveur. Une possibilité.

Il se raccrochait désespérément à cette idée, puisqu'il avait lui-même envoyé Narcissa dans le camp adverse pour la protéger. Puisqu'il avait pris la décision de jouer les espions, au péril de sa vie.

Voldemort l'aperçut et le fixa, songeur.

- Luciusssss ?

- Maître.

- As-tu des nouvelles ?

Lucius s'obligea à relever la tête et à afficher un léger sourire suffisant.

- J'ai bien peur d'avoir eu à... faire taire définitivement Madame Ombrage.

Voldemort se tendit, et Lucius put sentir les vagues de rage qu'il dégageait. Froidement, le seigneur des Ténèbres exigea des explications.

Malgré son cœur battant la chamade et la sueur coulant le long de son dos, l'aristocrate gardait un visage détendu, cachant ses craintes sous un air bravache.

- Cette... femme ne cessait de me faire des avances. J'ai estimé que vous préféreriez perdre un pion sans importance pour garder ma réputation intacte au Ministère...

Contre toute attente, Voldemort éclata de rire. L'air joyeux et fou de son Maître fit frissonner Lucius et il sourit, s'interdisant de montrer sa peur. Même si le serpent la sentait probablement.

- J'essspère que ta réputation resssstera bien intacte, mon cher. Ssssinon tu resssteras un long moment dans les cachots.

Lucius se redressa légèrement, les sourcils froncés.

- Je n'ai pas laissé de panneaux indiquant qui s'était débarrassé d'elle. Et cette femme avait suffisamment d'ennemis pour que rien ne permette de remonter jusqu'à moi.

- J'essspère pour toi, Luciussss.

Le silence retomba et l'aristocrate resta immobile, attendant. Il savait que Voldemort n'en avait pas terminé avec lui, et qu'il attendait le moindre signe de faiblesse pour attaquer.

Finalement, le seigneur des ténèbres reprit la parole.

- J'ai une nouvelle misssssion pour toi.

Lucius crispa les doigts sur sa canne, mais ne pipa mot. Avec un rictus satisfait, Voldemort continua.

- Je veux que tu te débarassssses de Dumbledore. Csssse vieux fou me défie depuis trop longtemps.

Le souffle coupé, l'aristocrate tenta de protester mollement.

- Mais il est retranché à Poudlard, Maître. L'école est imprenable.

Voldemort eut un rictus et échangea quelques sifflements avec son serpent. Lucius ne put retenir un regard inquiet et il craignit un instant de se retrouver plus rapidement que prévu dans ses propres cachots, torturé une fois de plus.

Il en était presque à saisir sa baguette pour tuer le serpent, histoire de tomber avec honneur, quand son Maître laissa échapper un rire amusé.

- Et bien trouve une excuse, Luciussss. Je ssssuis csssertain que tu trouveras la motivation nécssséssssaire pour ne pas me déçsssevoir.

Lucius s'inclina, raide. Puis il prit congé sans un mot de plus. Il ne sut pas comment il put regagner ses quartiers - son oasis au sein de sa propre maison. Il avait l'impression de se déplacer dans le brouillard, ses pensées bloquées sur la mission suicide dont il venait d'être chargé. Car c'était de ça dont il s'agissait : Dumbledore était intouchable.

L'esprit vide, il se précipita sous une douche brûlante, pour essayer de détendre ses muscles noués par la peur.

Lorsqu'il fut propre et plus calme, il examina la situation, d'un œil le plus critique possible. Il devait tuer Dumbledore. Le chef même de l'Ordre du Phénix. La symbole et le leader du côté de la Lumière.

Dans un premier temps, il allait devoir informer Severus de cette nouvelle mission. Puis il devrait trouver une solution pour se sortir de la situation instable dans laquelle il était plongé bien malgré lui.

Probablement qu'il devrait gagner du temps. Faire patienter Voldemort en lui faisant croire qu'il progressait. Faire courir des rumeurs comme quoi Dumbledore avait subi des attaques.

Promettre sans donner. Et puis attendre le lendemain en priant voir le soleil se lever.

Magie complémentaireWhere stories live. Discover now