Chapitre 33B:Candidats à la disparition.

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Novembre 1941.

Je me trouvais encore dans ce bureau quand je l'ai appris.A jouer pour eux.Une partition de Beethoven s'était retrouvée rapidement entre mes mains,car c'était jouer du piano qu'ils exigeaient de moi maintenant,et il était hors de question de leur préciser que je préférais de loin chanter.Mais même la tentation de laisser cette mélodie se faire entendre fut trop forte,et sans me vanter ils ont pris un plaisir que je n'aurais pas aimé qu'ils prennent.

C'était,c'était toujours cette même mélodie qui revenait,toujours cette même mélodie qu'ils voulaient que je joue.Il m'était impossible de comprendre pourquoi,et la vision de mon ancienne prof de maths paniquée,ses pieds nus patinant sur la glace alors qu'elle essayait d'accéder au bureau pour me prévenir d'un évènement grave,m'empêcha de jouer.

Ils ont fini par flancher,ils ont fini par laisser entrer Petys,et je ne pus m'empêcher d'admirer le changement que la déportation avait opéré sur elle.Elle s'était investie,certes pas autant que ma propre mère,d'une mission d'éclaireuse.Un flambeau humain entre les différentes strates de brouillard,dont la mission est d'éclairer les autres brebis égarées.Je lui fus reconnaissante de m'annoncer elle-même la mauvaise nouvelle:

-Lana!C'est ta petite soeur!

Je commençai à esquisser les premiers gestes d'un retour vers ma hutte,mais l'on m'en empêchée.Aucune dérogtion n'était possible,c'était ainsi que les choses fonctionnaient.

Petys m'a attendue pendant tout ce temps là.C'était une force de la nature,je m'en rends compte seulement maintenant,et cela explique peut-être pourquoi elle était tellement crainte.Elle avait la peau qui bronzait tout l'été,de longs cheveux noirs,des muscles dessinés,et elle mesurait 1M84,taille que peu d'hommes lettons atteignaient.Les premiers jours elle a toujours du succès auprès des garçons,avant de retourner dans le vrai monde.

Ma mère m'attendait depuis longtemps au chevet de Gaëll,toujours aussi gracieuse dans sa fragilité naine,malgré toute la chair qu'elle avait perdu,sacrifiée à un régime qui ne voulait pas d'elle.Mais ce qui me pétrifiait aujourd'hui,c'était ces marques sur le splendide visage de Gaëll.

-Tu sais ce qu'elle a?je demande.

-Honnêtement,non.Ce que je craignais le plus est sans doute arrivé,elle a dû attraper une infection.La pauvre petite est complètement épuisée.

-Tu ne t'en es pas rendue compte?me reprocha Lavra.

-Je sais pas comment j'ai pu ne rien remarqué avant,je réponds d'un air coupable.Qu'est-ce qu'on va faire?

-Je ne sais pas,Lana,fit maman,Lavra et moi allons rester auprès d'elle,toi,essaie de trouver Madame Sessimis.Nous allons devoir compter uniquement sur nous-même.

Depuis qu'elle est née,le 12 avril 1934,elle ne cessait de répéter qu'elle n'était qu'un poids dans la vie de la famille,simplement parce qu'elle entendait dans les livres que le dernier bébé était le plus mal perçu,le plus victime de jalousie.Ma pauvre enfant.Tu ne pèses pas bien lourd mais dans nos coeurs tu ne laisseras que du vide après toi.

J'ai essayé de demander quatres rations de pain,pour chaque femme de la famille,mais vous savez comment sont les soviétiques.On ne peut absolument rien leur demander.Une petite dispute avec eux pourrait nous entraîner dans nos pires cauchemars.

Sous un vent violent charriant les neiges du Nord,j'ai essayé de les convaincre de m'en donner une quatrième,pour ma petite soeur.Elle n'avait pas le droit à la nourriture,s'étant évanouie,littéralement tuée à la tâche qu'il lui avait confiée.Je leur ai précisé qu'elle était malade,qu'elle était petite et donc plus sensible,mais rien n'y a fait.Gaëll devait mourir,et ils n'allaient pas arrêter le processus en si bon chemin.

Les bourgeons de la Haine [Between shades of gray fanfic]Where stories live. Discover now