Chapitre 19A:Le ghetto.

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La file immense s'étendait dans les rues encore libres de Varsovie,se vidant d'une partie de sa population convergeant en son centre.Nous n'habitions pas très loin de la zone,ce qui permettait à ma mère de chercher la vaisselle à la maison,ayant encore le temps,sous étroite surveillance de nazis(elle s'éloigne,elle meurt).Nous avions le temps jusqu'à ce soir...

Je ne saurais pas trop comment décrire la réaction des deux franges de la population.Je n'ai pas vu beaucoup de juifs souriants,c'était une population maussade qu'elle était devenue à présent.Les autres,je ne sais pas dire non plus.ceux qui n'étaient pas concernés,les polonais comme certains d'entre nous les appelaient,comme si ils n'en étaient eux même pas.Certains les disaient,et les disent,toujours,heureux de nous voir mourir,comme si c'était la seule compensation dans leur malheur.

Pas au début.Au début,ils nous regardaient avec compassion,pour certains,même si la plupart d'entre eux regardaient cette collone comme une curiosité,voire avec indifférence,on voyait bien que certaines personnes laissaient partir un ami inavoué,une relation dont ils avaient honte au regard de la morale chrétienne.

Mais il y a ceux que je n'ai pas voulu voir.Mais que j'ai vu.Ces salauds de pauvres,incultes et abreuvés comme à la campagne d'un mélange zobrowka eau bénite,grâce à qui je t'ai vraiment vu sous un autre angle.Sans ces chers connards,je ne serais pas là,ici pour témoigner devant vous,Panne.

Alors que nous avions presque terminés notre premier voyage,j'ai vu l'étoile de salive d'une grosse mégère crachant son venin sur les autres,déjà bien assez à terre comme ça,du genre celle qui te fait changer de trottoir quand tu la vois:

-Allez-y!C'est tout ce qu'ils méritent!

-Zamknij sie!Tu comprends pas qu'après eux ils s'en prendront à nous!

Et après cet échange,la femme blonde qui tirait des valises devant moi,tomba sur le sol,penchée sur la gauche,ployant sous un projectile.

-Mais enfin,qu'est ce qu'il vous arrive?demanda Maman.

Voyant le garçon devant moi tendre son majeur bien haut aux  graines de racailles qui s'éclataient à lancer des grosses pierres sur des sous-êtres dont ils veulent le départ (très loin,et si possible dans le pire endroit existant),j'ai compris que oui,nous étions indésirables ici.

-Attendez madame,j'ai un truc pour vous.

-Hmmmm...Espèce d'enfoirés...

Alors que je me penchais pour l'aider,son fils se pencha aussi sur elle,nos doigts se touchèrent au-dessus de sa plaie(c'est pas super romantique,hein?enfin,si,pour moi oui).

Je resserrais mon emprise sur ce bout de tissu de chemise que je pressais contre son front,et lui tenait la main de sa mère.C'était un vrai canon,aux cheveux lisse brillant et d'une couleur blonde et rousse noisettée,aux grands yeux marrons expressifs,à  la peau claire,ils étaient bien musclés et exerçait une sorte de fascination sur la fille moyenne.Mais ce garçon,je le connaissais.

C'était Waldek Brejnakowski .Je l'ai toujours trouvé très énervant,mais là je l'ai trouvé super beau.Hélàs,ce rêve éphémère prit fin,quand ils sont arrivés pour nous menacer,j'ai entendu cliquer la sécurité,et nous avions dû nous lever.Le père de Waldek a pris sa femme sur son épaule,et on a continué notre route.

Une sourde angoisse recommençait à torturer le fond de mon esprit,vers ces recoins inavouables où se retrouvent tous les manques de courage et de dignité dont j'ai fait preuve.Il fallait que je tienne bon,par égard pour les autres.

Tu me manques,Waldek,c'est atroce,j'aimerais plus que tout revenir en arrière et te voir,au milieu des cadavres,et des cendres de glace.T'adresser un dernier petit signe d'encouragement.Et même avant,quand tu m'énervais profondément,et que tu étais le seule à savoir qu'un jour je finirais par t'aimer,alors que tu ignorais tout autant que moi ce qui m'attendait.

J'ai eu raison de m'attacher.De l'aimer,de le lui montrer.

Quand nous avions retrouvé Maman à la fin de son deuxième voyage,nous étions toujours avec la famille de Waldek.Il y avait tant de gens autour de nous qui cherchaient un logement,tant de gens qui étaient là à cause de ce qu'ils étaient.

Parmi,tous ces gens,il y a ceux que je ne peux pas oublier.Celle qui nous a sauvé.

Je me souviens de cette porte d'immeuble en verre,entourée de bois sombre,où nous observait une juive religieuse aux longs cheveux noirs,couverts mais pas assez pour les dissimuler entièrement,assez petite,la peau cuivrée avec un petit grain de beauté sur la joue,un pantalon havane aux genoux s'arrêtant au dessus du genou,après elle porte un collant noir et de grosses chaussures rouges.Elle se tenait accrouppie à la petite rampe d'escalier qui menait à l'entrée,en nous disant:

-Entrez,entrez vite!

-Tous?

-Oui!

Je me demande encore aujourd'hui ce qui l'a poussée à nous accueillir chez elle,durant tout le temps que je passais au ghetto de Varsovie.Nous étions des milliers et des milliers à défiler sous sa fenêtre,et la plupart avaient plus besoin d'aide que nous.Mais le hasard voulait que nous étions les plus proches de chez elle,et ça s'est fait comme ça.Nous neuf,nous sommes montés dans son appartement,avec toutes nos affaires.Un simple hasard du destin.

Les bourgeons de la Haine [Between shades of gray fanfic]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant