Le soleil était en train de se coucher calmement, comme nous étions en début de soirée, tandis que je tirais une taffe sur ma cigarette, j'avais longtemps voulu arrêter cette merde, mais sans jamais réellement réussir. Chaque fois que j'avais les nerf, que j'avais besoin de réfléchir ou que j'étais triste j'avais besoin de fumer, c'était devenu une habitude. Je m'en étais beaucoup voulu après la mort du bébé, j'avais l'impression que c'était de ma faute, pourtant j'avais arrêté durant la grossesse, mais je ne pouvais pas m'empêcher de me dire que le souci venait de moi. Pas de lui. Les médecins m'avaient garantis le contraire pourtant, à de nombreuses reprises, mais je ne les avais pas cru, du moins je n'avais pas voulu les croire. Ça me donnait une raison de me haïr, comme ça j'étais en colère, au lieu d'être triste. Quoi qu'au final je ressentais ces deux émotions simultanément à longueur de journée. Agacée par les pensées noires qui me hantaient je jettais ma cigarette du haut du balcon, la regardant jusqu'à ce qu'elle atterrisse par terre, virevoltant tantôt à gauche tantôt à droite, puis s'écrasant brusquement sur la chaussée. Ce fût à cet instant que la porte claqua juste derrière moi, me faisant comprendre que quelqu'un venait de faire son entrer sur le petit balcon. Les pas étant casiment silencieux je reconnu facilement l'international espagnol, beaucoup moins grand que mon frère, également beaucoup moins lourd, donc moins bruyant. Cependant je ne fus réellement sûr de ça qu'au moment où ses deux bras, bronzés, entourent mes épaules et mon cou par derrière. Il me dépassait d'une petite tête et déposa un baiser dans le creux de ma nuque. D'un d'un geste pur et innocent, sans arrière pensée, j'en étais sûre.
-Tu vas bien ? T'as l'air pensive, me demanda-t-il inquiet.
-Nan ça va merci. Il est où Rob ?
-Il est allé acheter des bières à la supérette, il revient dans une quinzaine de minutes.
Je hochais la tête simplement puis la nichais dans son cou.
-Ça à vraiment pas l'air d'aller, tu veux en parler ?
-Nan nan, c'est par rapport à une vieille histoire que j'ai énormément de mal à digérer, ça va aller t'inquiète.
Il ne répondit pas, il savait de quoi je parlais car, comme beaucoup de monde il était au courant de la perte de mon bébé, Kevin avait fait une conférence de presse, expliquant pourquoi est ce qu'il allait arrêter le football, ça avait ému un certain nombre de gens et nous avions eu énormément de messages de soutient. Cependant je ne voulais pas de la pitié des gens, je refusais de parler à mes amis, à l'époque je n'avais pas de famille, je voulais être seule, pour évacuer ma peine. Juste après l'accouchement j'avais même rompu avec Kevin, en y repensant c'était peut-être débile, immature, idiot, mais sur le coup ça me paraissait logique, avec du recul j'avais regretté, mais jamais je n'avais fait le premier pas, espérant qu'il le fasse de son côté, un an et demi avait passé, puis sur Instagram il avait posté une photo avec une jolie brune "Bébé" il y avait marqué. Comme tous le monde je n'étais pas dupe, c'était sa nouvelle petite-amie. Bien sûr ils n'étaient peut être plus ensemble à l'heure d'aujourdhui, mais pour moi c'était trop tard.
-Tu veux pas rentrer Ju ? Il fait hyper froid.
-Ouais.
Alors on fit demi-tour pour aller dans le salon, on s'installa côte à côte sur le grand canapé beige qui trônait au milieu de la pièce face à la télévision allumée.
-Thiago ?
-Oui ?
-Je sais que tu attends beaucoup de choses de ma part, mais j'aimerais que tu saches que tout de suite je peux pas. Il y a quelque chose qui me bloque.
-Tu as peur ?
-Ouais, je crois.
-Laisse moi t'aider à ne plus avoir peur alors. Je prendrais tous le temps qu'il te faudra.
Je hochais la tête, heureuse qu'il soit compréhensif puis je nichais à nouveau la tête dans son cou, laissant son bras gauche encercler ma taille.
