Le complotiste jouit quand la foule panique,
Car sa voix dans le bruit prend des accents tragiques :
Fini le gris du monde ! Tout est noir ou bien blanc,
Et qui s'oppose à lui est idiot ou bien ment !
Il est tellement vain d'argumenter le troll
Quand le troll se repaît de toute résistance
Pour gueuler, pour semer les graines de démence
Qui empoisonnent tout et la raison immolent !
Comprendre est fastidieux, réfléchir épuisant :
Il est bien plus aisé de juger, d'inventer,
Et on se sent puissant à plier dans l'instant
La vérité du monde à notre foi figée !
Le fantasme qui prend le pouvoir sur la science,
C'est le cerveau humain qui en toute puissance
S'affranchit du réel pour mieux le dominer,
Se soustrait en rebelle à l'univers trop laid !
Qu'importe que les faits contestent ses croyances,
Puisque seul son avis édicte le réel ?
Qu'importe que les autres rient de sa démence,
Puisque certains le croient, chantent sa ritournelle ?
L'humain est décevant, qui à chaque naissance,
Doit toujours réapprendre à chacun de ses pas
Ce que ses devanciers ont établi par science
Mais qu'il est bien trop fier et ne reconnaît pas.
Alors, à la bougie, le sage en la tempête
Chasse inlassablement les assauts de la nuit
Qui revient, invaincue, envahir toute tête,
Et souffler sur la flamme vacillant sans bruit...