L'ivresse est un plaisir
Qu'on peut vivre sans vin !
Il suffit de se dire
Qu'on le vivra en vain !
Que reste-t-il du temps
Où l'on a titubé
Sinon des tremblements
Et la tête enclumée ?
Que reste-t-il des nuits
Où l'on s'est aviné
Sinon quelques oublis
Bordés d'obscurités,
Sinon quelques remords
Sertis d'absurdité ?
À vivre dans l'alcool
Et rêver qu'on décolle
On oublie que l'alcool
Vous jette mieux au sol.
Alors détourne-toi
De la dive bouteille,
Car ses beaux vœux d'émois
Ne sont que des corneilles
Qui festoient sur tes restes
Quand la matin t'arrête.
Enivre-toi plutôt
De la beauté du monde,
De la vie qui éclot
Parmi les fleurs fécondes !
Gorge-toi du soleil
Qui dissipe les ombres,
Rend le sang plus vermeil,
Chasse ce qui encombre !
Saoule-toi pour finir
De tous ceux que tu aimes
De ceux qui te désirent
De tout ce que tu sèmes !
L'ivresse d'exister
Élève bien plus haut
Que celle des noyés
Qu'engloutissent les flots.