Au secours de l'Arwen [Wattys2022]

34 - Une lueur dans la tourmente

« Les hyènes des neiges sont endémiques du Désert de Glace, même si quelques spécimens ont été aperçus dans la Plaine Blanche après le Grand Blizzard qui a enseveli la cité de Falconskot. Leur pelage blanc présente la curieuse particularité d'émettre une lueur bleutée qui attire les proies éventuelles. »

Prédateurs du Wolfyre, par Steinir Brokson.

***

13 Flammeciel, quelque part dans le Désert de Glace.

Yrjö dormait encore lorsque Styrmir se réveilla et c'est avec un pincement au cœur que le capitaine entreprit de le réveiller. Incapable de le secouer, il préféra glisser la main dans ses cheveux emmêlés et ne put s'empêcher de sourire lorsque les yeux si bleus s'ouvrirent pour croiser les siens. Une charmante rougeur colora ses joues mangées de barbe broussailleuse et Styrmir recula à regret.

— Il est temps de repartir, je le crains. Les heures nous sont comptées.

Sans protester, Yrjö s'extirpa de son sac de couchage qu'il replia en quelques gestes habitués. Il ne fallut guère de temps pour que la tente soit démontée et chargée avec les autres sur le traîneau. Les deux marchandes humaines avaient les traits creusés mais elles tenaient le coup et la Demi-Elfe semblait aller beaucoup mieux avec une tenue adaptée à l'effort et à la température.

Ils partirent d'un bon train, motivés par la proximité de la Barrière qu'ils espéraient atteindre le lendemain soir, un jour avant la tombée totale de la Nuit. Le ciel était de plus en plus sombre, désormais plus bleu marine que rose, et leur visibilité se réduisait à quelques kilomètres à peine. Moins quand la neige commença à tomber. Dès les premiers flocons, Yrjö se tourna pour échanger un regard inquiet avec Styrmir. S'il se mettait à réellement neiger, ils n'y verraient plus rien et devraient se contenter d'avancer à l'aveugle, beaucoup moins vite.

Malheureusement, les quelques flocons timides des premières heures devinrent vite plus nombreux et plus gros alors qu'un vent du nord se levait, charriant avec lui des éclats de glace soulevés de la banquise. Ils furent obligés de ralentir l'allure et de rabattre leurs capuches pour se protéger des milliers d'aiguilles glacées que le vent jetait vers eux. Avancer devint vite un véritable calvaire mais ils devaient persévérer car, s'ils s'arrêtaient, ils ne pourraient pas repartir et ils perdraient un temps précieux. Avancer lentement valait mieux que ne pas avancer du tout.

En milieu de journée, la tourmente était si épaisse qu'on ne voyait plus à deux mètres. Au lieu de cavaler droit devant, Taïga restait auprès du traîneau, veillant sur leur progression hasardeuse. Elle ne s'éloignait jamais assez loin pour totalement disparaître. Yrjö allait envisager d'ordonner la halte pour changer l'attelage du traîneau lorsque les Elfes se redressèrent, soudain en alerte.

— Il y a quelque chose devant, indiqua Inarsyl d'une voix tendue. On dirait... de la lumière ?

Interpellé, Yrjö releva la tête en fronçant les sourcils, imité par le reste de la troupe. Ils étaient encore trop loin pour que les Humains puissent voir quelque chose mais Styrmir remarqua lui aussi une lueur bleutée droit devant eux. Ce qui n'était pas bon signe, d'autant que Taïga revint en grondant, les babines retroussées et les oreilles rabattues en arrière.

— Je ne vois rien, maugréa Yrjö. Que voyez-vous exactement ?

— Une vague lueur, décrivit Aeled. Comme celle d'une pierre de lune. C'est gris bleu, mais c'est peut-être dû à la neige. Qu'est-ce que... que pensez-vous que ça puisse être ?

Ils avaient ralenti au point de s'être presque arrêtés et Yrjö plissa les yeux en essayant de mieux voir, mais peine perdue, son acuité visuelle n'était pas assez bonne. Cependant, il n'y avait pas beaucoup de choses qui pouvaient faire de la lumière au milieu d'une tempête de neige dans le Désert de Glace.