Les nuits du Fof

Étreinte

Depuis sa naissance pratiquement, Drago Malefoy avait été habitué à se débrouiller seul. Ses parents lui offraient tout ce dont il pouvait rêver - parfois même avant qu'il n'en rêve - mais en contrepartie, il était la plupart du temps seul. Narcissa était trop occupée avec ses bonnes œuvres - de bon ton dans l'aristocratie anglaise - et Lucius jonglait entre la gestion de ses affaires et sa participation à la Chambre des Lords sorciers.

Ainsi, en arrivant à Poudlard, il était apte à éviter les profiteurs et à mener ses camarades Serpentard comme le futur Lord qu'il serait un jour. Par contre, il n'était pas habitué aux étreintes et embrassades et refusait les contacts physiques.

Parfois, il enviait la troupe bruyante des Gryffondor qui ne manquaient jamais une occasion de se sauter dessus et de se serrer mutuellement dans leurs bras. A Serpentard, ils avaient plus l'habitude d'une attitude digne et froide.

La guerre avait changé bien des choses, et maintenant que Drago était libre il était décidé à changer légèrement. Il ne deviendrait pas aussi sentimental qu'un fichu Gryffondor, mais il pourrait être moins... glacial.

Avec un soupir, le jeune homme se posta au bord du lac noir, les yeux fixés sur l'horizon. Étrangement, il était de retour à Poudlard pour une dernière année. Il était déterminé à obtenir ses Aspics et à avoir les meilleurs résultats possible pour faire oublier la marque noire sur son bras.

Et s'il était là, c'était à cause de Potter. Ou plutôt grâce à lui, même si ça lui arrachait la bouche de l'avouer.

Sa mère lui avait recommandé de se montrer correct avec le Sauveur. Après tout, il les avait aidé, et ça méritait une trêve dans leurs petites bagarres mesquines. En bon fils, Drago avait obéi et avait enterré la hache de guerre.

Il entendit des pas arriver derrière lui, et il sourit, persuadé de reconnaître la démarche de la personne qui venait à sa rencontre. Cependant, il n'eut pas le temps de se retourner.

Le Calamar sortit brusquement un tentacule de l'eau et l'enroula autour de la taille de Drago, le serrant dans une étreinte étouffante. Il glapit - pensant stupidement que c'était ridicule comme réaction - et se sentit décoller alors que le tentacule s'agitait en tout sens.

Il aperçut la silhouette sur le bord du lac et constata avec soulagement que son instinct ne l'avait pas trompé ; c'était bien la démarche de Potter qu'il avait reconnu. Oubliant sa fierté - déjà bien malmenée - il hurla au Gryffondor de l'aider. Il le supplia littéralement de lui porter secours.

Comme le brun ne bougeait pas, il supplia, lui promettant n'importe quoi pourvu qu'il le sorte de l'étreinte mortelle de cette fichue bestiole.

Horrifié il se rendit compte que Potter - ce traître - éclatait de rire et se moquait allègrement de lui et de ses malheurs. Drago haleta, désespéré, et se demanda s'il allait mourir stupidement dans les tentacules du calamar que tous les étudiants de Poudlard connaissaient après avoir survécu à la guerre et à Voldemort. Ce serait particulièrement ironique qu'il succombe à une étreinte, lui qui avait toujours refusé les contacts physiques avec ses camarades.

Alors que l'air commençait à lui manquer, il gigota de plus en plus fort, et poussa un hurlement digne d'une banshee - loin d'être le cri le plus viril qu'il ait eu.

Il sentit un effleurement sur son épaule, et il cria d'autant plus, persuadé que c'était un second tentacule qui venait le saisir et le serrer jusqu'à ce que mort s'ensuive.

Une gerbe d'eau glacée l'éclaboussa et il ouvrit la bouche essayant de reprendre son souffle. Il se laissait complètement envahir par la panique... Alors il ferma les yeux de toutes ses forces, espérant qu'il ne souffrirait pas trop et que ce serait rapide. Il n'était pas vraiment quelqu'un de courageux après tout.

D'un coup, il entendit la voix de Potter à son oreille et il ouvrit les yeux, surpris.

Drago cligna des yeux lentement, regardant autour de lui d'un air surpris, avant de reprendre pied dans la réalité. Il leva une main pour repousser ses cheveux en arrière et les trouva trempés.

- Hey ! Tu m'as arrosé !

Harry laissa échapper un léger rire.

- Il fallait bien ça pour te réveiller. J'avais beau te secouer tu continuais de te débattre et de hurler.

Le Sauveur le dévisageait avec attention, l'air un peu inquiet bien que ses yeux émeraude brillaient d'amusement face aux réactions grognonnes de Drago.

- Cauchemar ?

Drago agrippa la couette et la remonta un peu sur son torse, frissonnant légèrement. Puis il détourna le regard, honteux et hocha la tête.

Harry se redressa et déposa un baiser sur son épaule, sans le quitter des yeux. Puis il eut un léger sourire.

- Tu me racontes ? Ça devait être assez impressionnant vu les hurlements que tu as poussé.

Drago grogna et rougit légèrement. Comment expliquer à son copain que pour la première nuit qu'ils passaient à dormir ensemble il avait confondu son étreinte à l'attaque du calamar du lac noir ?