Chapter 82.5

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Normalement, j'avais promis de transmettre la musique qui a longtemps inspiré les regrets de Hakan pour son cousin. Je vous la laisse ici, ayant malencontreusement oublié de vous la partager dans le chapter 81, comme c'était initialement prévu.

Bonne lecture ! 

En sortant du cimetière, nul Sherlock, pas plus de Baron. Mon cœur, déjà éprouvé par ce que j'ai enduré dans le caveau, loupe d'abord un battement avant de palpiter d'inquiétude. Dans mon état paranoïaque, j'imagine déjà tous les pires scénarios : ils se sont perdus, ils sont rentrés, ils ont été enlevés ?

Je saisis mon téléphone portable dans la seconde, m'attendant déjà à recevoir des indications pour une demande de rançon. Oui, c'est stupide, mais vous ne pensez pas à des choses stupides quand vous êtes en état de panique, vous ?

Un message, de la part de mon colocataire.

SH : « Parti dans le parc à côté. SH »

— Je vais le farcir avec le sel de la ville et me servir de son corps comme d'un chasse-neige ! Je fulmine en me dirigeant vers le parc le plus proche.

Pour cela, je dois contourner le cimetière, ce qui est assez long. Au moins, si quelques traces de mes sanglots pouvaient encore se voir, maintenant, mon visage ne laissait plus rien paraître. J'étais redevenue cette femme au faciès de marbre et aux yeux d'acier.

Comme s'il avait tout fait pour être trouvé, John et moi repérons très vite le fuyard, au loin. Il a délogé la poudreuse d'un banc et s'est assis là, en regardant Baron lui rapporter un bout de bois. Le temps de réduire la distance qui nous sépare entre le parc et le trottoir du cimetière, je vois qu'il se lève, lance le morceau de tronc que le chien lui rapporte, avant de s'asseoir à nouveau. De temps en temps, il taquine le canidé, en faisant mine de le lancer ailleurs, de feindre de l'avoir envoyé loin, alors qu'il dissimule ce jouet improvisé sous sa veste. Cependant, Baron n'est pas dupe. Il s'appuie sur les pattes avant en jappant, signe qu'il veut jouer, encore.

Quand je passe le portail du parc, je saisis un peu de neige fraîche au sol et envoie une boule, un peu molle, qui heurte le trench de mon colocataire.

— Je vois que vous m'avez trouvé facilement, se réjouit-il.

— Il n'y a pas trente-six parcs dans les alentours non plus, je déclare. Mais je vous déteste tout de même.

— Je vous ai prévenue, geint-il pour se défendre.

— Vous savez que cet endroit est interdit aux chiens, même en laisse ? Je le houspille

— Personne n'a rien vu.

— Si on allait se réchauffer ? Propose John pour mettre fin à la dispute.

Je siffle Baron, qui accourt et se laisse rattacher sans aucun problème. Il halète beaucoup, mais il est content d'avoir pu jouer les chiens fous un moment. Il a tendance à oublier que ce n'est plus un chiot.

— S'il fait une crise cardiaque avant de rentrer à la maison, je mets en garde mon charmant cohabitant, je vous jure que je vous en tiens responsable. Je vous le ferais payer jusqu'à la fin de vos jours.

— Étant donné notre différence d'âge, note-t-il à voix haute, il est de toute façon évident que vous me survivrez.

— Ne me poussez pas à vous survivre tout de suite, je le menace en tournant les talons.

Puisque le rhodesian n'est pas d'humeur à tirer sur la laisse, j'en profite pour sortir une dernière fois mon portable et envoyer un message ou l'autre. D'abord à Quentin, pour annoncer que j'achève ma mission, mais que nous allons prendre quelque chose de chaud avant de rentrer, mais aussi un message d'adieu à Klaus. C'est stupide, mais c'est comme pour mettre un point final à cette entrevue difficile. Comme pour dire : c'est terminé, pour le moment. Je ne dis pas que je vais me sentir mieux demain, ni après-demain. Néanmoins, je me sens déjà plus légère. Bon sang, que c'est agréable.

— Tu dis ça, mais tu ne t'en remettrais pas s'il lui arrivait quelque chose, se moque John qui marche à ma gauche.

— Qu'on se le dise, je confesse avec sérieux, je ne suis pas prête pour assumer un autre deuil pour le moment, qu'importe la personne qui finirait entre quatre planches.

— Donc, cela veut dire que vous ne me tuerez pas, me nargue Sherlock qui m'avait emboîté le pas.

Je les conduis tacitement à l'adresse que je n'avais pas oubliée, tout en mettant fin au débat.

— Effectivement, je confirme, cela veut également dire que vous devez être prudents, tous les deux, et tâcher de ne pas vous faire tuer dans les mois, voire les années à venir. C'est compris

— Je pensais que tu ne faisais pas dans le sentimental, me titille le médecin.

— On peut essayer de faire au mieux, promet le détective en éludant la remarque.

Finalement, je ne sais pas ce qui est le pire : John qui s'amuse à mes dépens en permanence, mais à qui j'accorde de tout sans jamais m'énerver, ou alors, le fait d'avoir constaté que l'idée même de perdre mon colocataire m'achèverait, car je m'accroche à lui désespérément, chaque jour un peu plus. 

Question à laquelle vous n'êtes pas dans l'obligation de répondre.

Un peu comme Hakan a toujours gardé le numéro de son père ou de Klaus dans son téléphone, vous avez déjà gardé des numéros, comme ça ? Des numéros dont vous n'aviez plus l'utilité, mais que vous conservez tout de même, sans raison particulière ? 

Des bisous et à bientôt pour la suite !

Une colocataire irascibleOpowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz