Le 02 Octobre 2015

28 4 3
                                    

Les journées sont plus courtes, la nuit tombe bien plus rapidement et la pluie en abondance. C'est la saison qui veut ça. En tout cas, j'en ai enfin terminé avec cette foutue tour. Le vent commençait vraiment à devenir froid. Je crois bien que bien que j'y choppé une merde, le nez qui coule, la gorge qui pique, que du bonheur.

Le toubib, Patrick, m'a filé des trucs à base de fleurs pour dégager tout ça. Bon, tu as compris je crois, je suis pas au meilleur de ma forme et je n'ai qu'une envie, dormir à côté du feu. Oh ouais, ça fait du bien. Mais pas de bol, on ne me laissera pas peinard.

Les éclaireurs sont revenus au début de la semaine et ont confirmés mes craintes. En fait, c'est même pire que ce que j'avais d'abord imaginé. Il y a une belle bande de bâtards pas loin, à un jour et demi de marche. Ils sont nombreux et ont des armes automatiques, des motocross et des camions bâchés. D'après ce qu'ont rapporté les gars, ils pillent les villages, tuent tous ceux qui résistent et embarquent les autres en même temps que les vivres et tout ce qui est récupérable. Le reste, ils le brûlent, en même temps que les blessés, ça doit les faire marrer. Déjà deux villages y sont passés et ça sera bientôt notre tour. Finalement, j'avais raison. J'ai toujours raison, mais personne ne m'écoute. La loose quoi.

Une chance en fin de compte que nous ne soyons pas les premiers de la liste. J'ai beau être bon à la carabine, je n'aurai pas pu tous les descendre. Bon, je dois l'admettre, nos éclaireurs ont été plus courageux que je l'avais imaginer. Ils ont fait du bon boulot, aussi bien que j'aurai pu le faire sinon mieux. Ouais ouais, de temps en temps, faut reconnaître quand les choses sont bien faîtes. Ils ont fait un petit tour du propriétaire pour savoir où ils cachaient les gens enlevés ou les biens volés. Ils n'ont pas trouvé grand chose à part une tonne de matos, de quoi déclencher une guerre. Non, le reste, ça part à l'Est, vers l'ancienne frontière. Parce qu'aujourd'hui, une frontière n'a plus de sens. Un bordel du diable.

Quand le Conseil des Vieux en a pris connaissance, ils ont immédiatement envoyé des messagers vers nos voisins et leur conseiller de faire comme nous : se préparer. Dans ce merdier, il y a une chose positive, c'est qu'on me prend enfin au sérieux. Du coup, on m'a demandé ce que j'imaginais de mieux pour la défense du village. C'est très simple. Un flingue dans chaque main, des barricades, des postes de tirs sur les toits, des vigies permanentes et des pièges avertisseurs. Bon, s'ils viennent en moto ou en camion, les pièges seront inutiles, mais on ne sait jamais. Mais là, c'est presque beau, tout le monde est prêt. Nos vies menacées, la peur dans tous les ventres et tous les regards, prêts à en découdre. Mais pourquoi au final ? C'est vrai, je me pose la question, nos vies de merde tout ça, à trimer dans le froid, toujours obligés de se battre. La mort, ça doit être plus calme, mais pourquoi on se raccroche comme ça à la vie ?

Tout le monde n'est pas tout à fait dans cet état d'esprit. Un est différent, j'ai nommé le génie tout puissant de la connerie intersidérale ! MICHEL. Le vieux bouc m'a attrapé hier :

« Fait pas le con Vincent, si tenté que tu sois capable d'autres choses »

« C'est pas parce que les gens du village sont derrière toi que tu peux faire ce que tu veux. La violence attire les problème plus qu'elle ne les résout. »

C'est sûr on devrait se laisser faire. Je te jure, il m'énerve. Enfin, je lui ai dit que c'était pour la défense du village, mais il m'a répondu des salades d'un genre nouveau :

« N'allume pas un feu que tu ne sais pas éteindre ».

Ouais, je suis pas pompier quoi. Mon truc c'est de buter des goules ou des mecs qui nous cherchent des poux. Et c'est précisément le cas. Enfin son sermon habituel :

« La violence appelle les cadavres et les cadavres appellent les goules »

Je comprends pas bien où il veut en venir, mais si il veut pas tuer pour se protéger, ma foi, il a qu'à essayer de leur lancer des biscuits... Quel con.

Ils ont des armes automatiques putain. Il faudra viser juste et bien sinon nous n'aurons aucune chance de nous en sortir. D'ailleurs en parlant de ça, s'il y a moyen de mettre la main sur un ou deux de ces flingues, à titre personnel, ça serait plutôt pas mal.

Quoi qu'il en soit, je ne suis pas de garde ce soir. Je devais me reposer mais c'est mort. Quelqu'un est venu frapper à ma porte tout à l'heure, j'ai cru que c'était Clémence, qu'elle voulait un peu de plaisir de ma recette unique mais non c'était Mickael. Avec une grande bouteille de Whisky qui datait de bien avant le cataclysme. Il la gardait pour un grand moment qu'il m'a dit.

« Je vais crever une balle dans la panse, je l'ai vu dans un rêve. Alors je me suis dit, je vais boire ça avec un vieux copain. »

Il est pas beaucoup plus vieux que moi et trop jeune pour mourir que je lui ai dit. Mais ce n'est pas un combattant, son truc c'est éplucher des patates... Pas le meilleur atout dans cette situation hein. Ma foi, je suis convaincu qu'il va s'en sortir. Il a de la ressource l'air de rien.

Bordel. Une bonne bouteille, c'est du baume au cœur et ça me fera du bien pour ma crève et on a trinqué il y a pas dix minutes. D'ailleurs il se demande ce que je gribouille dans ce carnet. Ah.

« A ta mère, la reine des putains »

A ma mère.


Survivance: journal de VincentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant