16- "Je dois d'abord digérer toutes ces révélations." 3/3

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Ses amis jetaient à Eliz des regards navrés, mais aucun d'eux n'osa intervenir. Yerón pressa une main contre son crâne. Malgré la sphère de cristal qui confinait Tilmaën, tous sentaient peu à peu une migraine insistante battre à leurs tempes, en plus du vertige dans lequel les révélations des esprits les avaient plongés.

Dans le silence qui s'éternisait, Kaolan se décida alors à parler. Il devait savoir si son périple avait été voué à l'échec dès son départ.

– Si mon peuple n'est rien d'autre qu'une tribu de Derujins, est-il possible de créer un pouvoir pour lui ? demanda-t-il, le cœur serré.

L'esprit turquoise posa ses mains sur sa taille et se dressa.

– Nous n'avons eu aucune consigne, mais j'imagine que vous êtes désormais suffisamment différents pour qu'un nouveau pouvoir ait un sens. En connais-tu le prix ?

Kaolan hocha gravement la tête et le silence tomba parmi les esprits qui chahutaient encore autour de la sphère. Ils s'immobilisèrent et se tournèrent vers les voyageurs, attentifs.

– As-tu bien réfléchi à ce dont ton peuple a le plus besoin ? demanda l'esprit turquoise. Choisis sagement, tu n'auras pas d'autres occasions.

Kaolan hocha la tête une nouvelle fois.

– Avance-toi vers la sphère.

Le jeune homme obéit lentement, laissant derrière lui ses amis horrifiés. Il n'osa pas se retourner vers eux, certain qu'il perdrait tout son courage s'il voyait des mains tendues pour le retenir ou des yeux noyés de larmes. Les esprits silencieux s'écartèrent devant lui, formant une haie d'honneur sur son passage. L'esprit en charge agita son bras et des degrés translucides apparurent contre la sphère.

– Vas-y, ordonna-t-il en voletant jusqu'au sommet.

Kaolan posa un pied sur la première marche. Sa poitrine se souleva convulsivement. Il ferma les yeux et rappela à lui la douleur qui était la sienne au départ de son clan, sa colère contre les humains qui détruisaient leurs forêts.

Son devoir était là, il le savait. De lui dépendaient la survie et l'avenir de son peuple.

Il gravit une nouvelle marche.

Saï le suivait des yeux, épouvantée. Autour d'elle, aucun de ses amis ne faisait mine d'intervenir. Tous étaient paralysés par l'inéluctabilité du sacrifice du jeune homme. Lorsque Kaolan parvint au sommet de la sphère, elle ne put plus le supporter. Elle se précipita vers le piédestal de pierre.

– Kaolan, non, ne fais pas ça !

Sa voix se déchira sur ces mots. Tempête hulula lui aussi sa détresse.

Kaolan se retourna lentement. Les spirales d'énergie captives projetaient sur son profil une lueur verdâtre. Il baissa les yeux vers eux.

– Je t'en prie, Saï, supplia-t-il. C'est déjà assez difficile comme ça. C'est le choix que j'ai fait, j'y suis résolu. Ne m'en empêche pas.

La jeune fille se lança sur les marches pour le retenir.

– Bien sûr que si, je vais t'empêcher de commettre ce sacrifice inutile ! Tu me connais si mal que ça ?

– Alors tu condamnes mon peuple à mort.

– Non ! Je suis sûre qu'il y a un autre moyen ! Réfléchis ! Réfléchissez, vous tous !

Elle se retourna pour prendre ses amis à témoin.

– Nous avons accompli ce que personne n'avait fait avant nous. Nous avons trouvé la Bibliothèque, nous avons... trouvé la solution pour lier Razilda et Améthyste...

Poussières de TerresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant