12- "Avec quel aplomb elle m'a menti !" 1/2

29 5 14
                                    

"Quand je pense avec quel aplomb elle m'a menti !
Je n'en reviens toujours pas !"
Yerón, blessé dans son amour propre.


La nuit s'étirait, interminable. Cela faisait plus d'une heure que personne n'avait pipé mot. Ceux qui n'étaient pas plongés dans des pensées moroses somnolaient au rythme du pas de leur monture.

Yerón tira sur le bandage de fortune qui protégeait son bras droit. Il était déjà bien imbibé de son sang. Craignant de voir le ciel pâlir alors qu'ils seraient toujours en chemin, il fit avancer sa jument au niveau d'Eliz qui chevauchait en tête aux côtés de la princesse. Alors que cela faisait presque un jour entier que Razilda et elle-même n'avaient pas dormi, la fatigue ne semblait pas encore l'avoir rattrapée

– Où allons-nous ? demanda-t-il. Tu ne nous as rien dit.

– Pour l'instant, le plus loin possible de la carrière, répondit-elle. Les Sulnites pourraient y revenir pour chercher toutes informations que nous aurions pu laisser en arrière. Ensuite, une fois qu'on aura pris un peu de repos... Je suis encore en train d'y réfléchir.

– Nous pourrions aller à la Grande Bibliothèque, intervint alors Hermeline.

Eliz fit une moue dubitative.

– Cela fait effectivement partie des destinations que j'envisageais, mais aller jusque là-bas en plein hiver.... j'ai quelques réserves.

– Si elle contient réellement toutes les connaissances du monde, je pense que nous pourrions tous y trouver notre compte, insista Hermeline. Et jamais les Sulnites ne pourront imaginer où nous nous rendons.

Eliz hocha la tête lentement, et tourna la tête vers Yerón qui la regardait fixement, ses grands yeux bleus dilatés en une mimique de supplication irrésistible. Elle ne put retenir un sourire.

– Eh bien, pourquoi pas ? Si tout le monde est d'accord, tentons le coup.

Après tout, songea-t-elle, qui sait ce qu'ils pourraient y découvrir, en plus des informations sur la Cérémonie de Transmission ? Les plans d'une arme secrète redoutable, le point faible des Sulnites, des informations à monnayer contre de l'aide militaire, le plat préféré de Soltan... Tous les espoirs étaient permis. Et de l'espoir, ils en avaient désespérément besoin.

Voyant que les lueurs de l'aube commençaient à éclabousser l'horizon de rose et d'orangé, Eliz leur fit forcer l'allure. Ils traversèrent une prairie perlée de la rosée du matin et suivirent une pente douce qui menait vers un bosquet touffu, niché au creux d'une cuvette. Là, ils découvrirent, totalement invisible de l'extérieur, une chaumière abandonnée aux murs envahis de lierre. Imitant Eliz, tous mirent pied à terre. Ils attachèrent leurs chevaux sous le auvent de guingois, accolé à un mur du bâtiment et s'en occupèrent en silence.

Lorsque cette tâche fut accomplie, ils pénétrèrent dans la chaumière. L'intérieur était poussiéreux, vide et délabré. De nombreuses fissures s'ouvraient dans les murs, par lesquelles la végétation commençait à s'infiltrer.

– Alors, c'est pas mal comme refuge, non ? annonça fièrement Eliz les poings sur les hanches. Quand j'étais encore dans l'armée, mon escouade et moi étions tombées dessus par hasard alors qu'on recherchait une bande de faussaires.

Elle s'accroupit devant son sac et commença à en tirer une couverture pour s'installer. Elle ajouta :

– L'histoire est amusante d'ailleurs, je vous la raconterai une prochaine fois.

– Et pourquoi pas maintenant ? interrompit Saï en pleine installation dans un coin de la chaumière.

Eliz leva un sourcil.

Poussières de TerresWhere stories live. Discover now