2- "J'ai bien aimé le spectacle." 2/3

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Saï profita du brouhaha pour se pencher vers Hermeline, assise à côté d'elle et lui glissa :

– Dis-moi que je n'ai pas la berlue. Saphir, ce ne serait pas... un homme, par hasard ?

La princesse parut soulagée.

– Tu me rassures ! dit-elle en riant. Je pensais être la seule à m'en être aperçue !

Razilda avait entendu leur échange et ne put s'empêcher d'intervenir.

– Qu'est-ce qui vous fait dire ça ? s'étonna-t-elle. Pour moi, la question ne se pose même pas. Je vous accorde qu'elle est grande, mais j'espère que ce n'est pas un critère déterminant à vos yeux !

– Sa taille n'a rien à voir, se défendit Saï avec embarras. Ça me parait évident, sans que je puisse l'expliquer ! Aidez-moi, les garçons, qu'est-ce que vous en pensez ?

Les interpellés sursautèrent. Yerón se tourna vers la scène et rougit jusqu'à la racine des cheveux.

– Je... je ne sais pas... C'est difficile à dire, grommela-t-il avec gêne en gardant la tête obstinément détournée de ses compagnons.

Il était impossible à Saï de se contenter d'une telle réponse, aussi Kaolan fut-il obligé de se sentir concerné par la discussion.

– Femelle, selon les critères de votre espèce, dit-il sans hésiter.

Saï haussa les épaules, évidemment même sur ce genre de sujet, il ne pouvait pas être d'accord avec elle.

– Eliz ne nous a pas donné son avis, glissa Razilda avec malice avec un regard en coin à la Rivenz.

Ignorant le débat qui animait ses amis, celle-ci avait attaqué le repas qui leur avait été servi entre-temps.

– Oui, Eliz, départage-nous ! supplia Saï avec empressement.

La guerrière était en train de se tartiner une épaisse tranche de pain d'un pâté de campagne dont l'odeur mettait l'eau à la bouche. Elle reposa son couteau à regret et considéra ses compagnons avec perplexité.

– On s'en fout, non ? dit-elle en haussant les épaules. Qu'est-ce que ça change ? Tout ce qui compte c'est que sa voix est magnifique.

Saï cligna plusieurs fois des yeux, sans comprendre la réaction de son amie.

– Qu'est-ce que tu racontes ? Le sexe d'une personne c'est important, insista-t-elle, ça te dit qui tu es et comment se comporter avec les autres.

Eliz fit une moue sceptique.

– Je veux bien te concéder que c'est un détail physique qui a autant d'importance que la couleur de tes cheveux. Pas plus que ça.

Elle sourit alors, sûre de la supériorité de la démonstration qui allait suivre. Pointant son couteau sur son amie, elle déclara :

– Dans plusieurs années, quand je raconterai notre histoire, comment préfèrerais-tu que je te décrive ? « C'était une fille avec les cheveux noirs. » ou « Sans sa bonne humeur et son lien avec un griffon, le voyage n'aurait pas été le même. »

Saï se renfonça dans sa chaise avec une moue boudeuse.

– C'est de la triche, si tu présentes les choses ainsi.

Eliz étouffa un rire satisfait en mordant dans sa tartine, mais elle croisa le regard de Razilda qui la gratifiait d'un sourire étrange.

– Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-elle la bouche pleine, aussitôt sur la défensive.

Poussières de TerresWhere stories live. Discover now