2- "Se dévouer à ce point, c'est gênant à force." 2/2

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Saï était plutôt fière du porridge qu'elle avait réalisé pour Razilda. Du pain rassis, de l'eau, quelques épices et des petits bouts de viande séchée pour donner du goût. Ce plat avait même aiguisé l'appétit de tout le monde et ils avaient tout englouti en un temps record. Le repas désormais terminé, la jeune fille observait ses compagnons assis sur les larges pierres disposées autour du feu de camp. Tous étaient pensifs, les yeux perdus dans les flammes qui pétillaient.

Eliz était venue, avait rapidement mangé avec eux, puis elle était repartie avec le bol destiné à Razilda. Non sans avoir laissé tomber la révélation sur laquelle Yerón méditait encore.

– D'accord, les Jultèques détiennent bien un pouvoir particulier, déclara le jeune homme. Mais qu'en est-il des Jezzerans ?

– Ils peuvent tout à fait le garder secret, comme les Jultèques, proposa Hermeline en haussant les épaules.

– Saï, quand tu incarnais Charif, n'y avait-il rien dans ses paroles ou dans son esprit dont tu te souviens et qui pourrait nous donner des indices ? lui demanda Yerón, insistant.

Saï y réfléchit sérieusement. Malheureusement, rien ne lui revint.

– Il aurait fallu en parler à Jabril, regretta-t-elle. C'est le seul Jezzeran que nous ayons croisé.

– Rien ne nous dit qu'il est au courant ou qu'il aurait bien voulu nous en faire part, fit remarquer Kaolan avec un certain ressentiment vis-à-vis de leur amie jultèque.

Saï se frotta le menton, songeuse.

– Jabril me fait systématiquement penser au dieu Burkan. Il ne jurait que par son nom, et j'ai toujours trouvé ça bizarre qu'un dieu aussi important pour lui ne soit pas lié avec les Dieux Aînés ou les Dieux Puînés. C'est unique comme cas, non ?

Ces paroles eurent un effet instantané. Yerón se leva subitement. Son regard avait un éclat fébrile tandis qu'il se mettait à déambuler autour du feu.

– On y est presque, j'en suis sûr, s'excita-t-il. Allez-y, dites tout ce qui vous passe par la tête. Je vais voir si on peut en tirer quelque chose.

– Saï disait que le grand prêtre jezzeran des Disparus ne parlait jamais de Burkan, fit remarquer Kaolan.

– Parce que c'était un dieu rival ? proposa Hermeline. Parce que son culte n'existait pas à l'époque ?

Yerón interrompit aussitôt sa marche.

– Bon sang ! s'écria-t-il en frappant son poing dans la paume de sa main. On en revient toujours aux fameux Disparus ! Je refuse de croire que c'est une coïncidence !

– Le fils de Judith Ire n'aurait pas manié une Arme de Loyauté aussi ? lança Saï comme une boutade. On aurait pu l'interroger en même temps qu'Améthyste, si on va jusqu'à la réserve d'épées.

– S'il en avait une, elle a dû s'évanouir avec lui dans les entrailles de la terre, observa Kaolan avec bon sens.

– Attendez un peu ! les interrompit Hermeline, les yeux brillants soudain d'excitation. Nul besoin d'aller chercher si loin, nous possédons la mémoire des Soltanhart à nos côtés !

Elle se retourna, tâtant derrière elle à la recherche de son épée. Elle saisit le fourreau qu'elle installa sur ses genoux et en tira doucement la lame.

– Bien le bonsoir, Soleil Triomphant, commença-t-elle courtoisement, j'ai une question importante à te poser, à toi qui es la mémoire de notre dynastie.

Poussières de TerresWhere stories live. Discover now