3- "Une mission un peu trop simple." 2/3

115 18 78
                                    

Eliz et Saï marchaient à bonne allure sur le chemin. Un simple baluchon sur l'épaule suffisait à rassembler les possessions des deux femmes. Elles conversaient avec entrain, elles avaient tant de choses à découvrir l'une sur l'autre. Malgré la hâte d'Eliz à mettre son projet en œuvre, elle avait dû attendre d'être sûre que le moindre effort ne rouvrirait pas ses blessures avant de prendre la route. Tempête batifolait autour d'elles. Il courait dans la poussière du sentier, zigzaguait entre leurs jambes, bondissait parfois dans les buissons pour y attraper un mulot, et en ressortait invariablement bredouille et les plumes ébouriffées. Tant que le chemin était désert, Saï le laissait faire avec attendrissement. Pour l'heure, elle avait décidé d'en apprendre plus sur un sujet qui la fascinait particulièrement.

— Donc, elle est vivante ?

— Oui, en quelque sorte, vu qu'elle a une conscience, on peut dire ça... dit Eliz comme si cela lui coûtait de l'admettre.

— Comment ça, en quelque sorte ? glapit une troisième voix. Tu crois que ça t'est réservé d'être vivante, espèce de guerrière au rabais !

Accrochée au côté d'Eliz, Griffe Écarlate l'épée bâtarde n'avait pas l'habitude de mâcher ses mots. Et même si les présentations avaient déjà été faites, Saï ne se lassait pas de ses interventions. Au contraire de la guerrière qui, blasée, ne releva même pas l'insulte.


– Et... toutes les armes sont comme ça sur ton île ? demanda Saï avec avidité.

– Oh non, grâce aux dieux, ce n'est pas le cas ! Sinon on ne s'entendrait même plus parler avec des casse-pieds pareilles.

— Hé ! Je t'entends, tu sais ! Le métal dans lequel je suis forgée est extrêmement rare, alors un peu de respect.

Eliz sourit.

— C'est exact. Un métal qui n'est trouvé que dans une seule mine dans le monde ! Et les armes ainsi forgées ne sont destinées qu'aux plus courageux, aux plus vaillants serviteurs de la Couronne ! On les appelle les Armes de Loyauté.

Eliz se tut, ménageant un silence mesuré. Prévisible, la question qu'elle attendait fusa aussitôt.

– Et alors ? Et alors ? Qu'est-ce que tu as fait pour mériter cet honneur ?

– Ah, c'est une vieille histoire, répondit la guerrière d'un ton faussement blasé.

« C'était il y a cinq ans, je n'étais encore que sergent dans l'armée régulière. Une partie de chasse avait été organisée pour les gamins de la cour, évidemment les enfants royaux y participaient. Un détachement de la garde royale devait accompagner la chasse pour assurer leur protection. Mais... tu vas voir comme cela tient à peu de chose... les trois quarts des gardes étaient au lit avec une ... euh ... indigestion monumentale. Donc, ce fut un petit groupe de soldats qui fut choisi pour les remplacer.

« J'étais plutôt flattée mais tout de même très mal à l'aise d'avoir été choisie. Tu imagines un peu : jouer les gardes du corps pour une bande de gosses surexcités pendant toute une journée, ça ne faisait pas vraiment rêver.

« Mais tout se passait bien. Les enfants avaient déjà tué une bonne dizaine de lapins et commençaient à vouloir s'attaquer à un gibier « un peu plus digne de leur rang ». Nous avons donc commencé à nous enfoncer plus profondément dans la forêt. Difficile de faire entendre raison à un gamin qui te dit que si tu le contraries, son père va te faire mettre aux arrêts.

« Parmi tous ces enfants, il y avait le jeune Mayuna, le fils d'un chef de tribu.

Eliz s'interrompit un instant, son récit allait devenir plus compliqué qu'elle ne l'avait prévu si elle devait se lancer dans des explications politiques.

Poussières de TerresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant