Chapitre 91

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— Tout s'explique, déclare Priétée au bout d'un moment, alors que mes larmes viennent tout juste de se tarir.

Parler à mes amis de mes peurs et de ma douleur à l'idée de perdre ma mère m'a fait beaucoup de bien. Que ce soit Priétée, Thétanis, Tiaffa, Jarem, Yaram ou même Nolen, ils m'ont tous écoutée et aidée à aller mieux, que ce soit par leur silence, leurs mots ou leurs gestes.

— De quoi tu parles, ma sœur ? lui demande Tiaffa.

— Les expériences qu'ils mènent, qu'ils menaient, je veux dire, à la Nouvelle Salpêtrière. Ces connards ne comptent ni rester sous des dômes pour l'éternité ni prendre le risque de mourir en respirant l'air extérieur. Ce qu'ils cherchent à trouver, c'est un moyen, un antidote qui leur permettrait de pouvoir retourner vivre à l'extérieur sans avoir une chance sur deux d'y rester... C'est pour ça que Ménée n'est pas tombé dans le coma. Ils ont trouvé comment éviter ça.

— Mais pas comment éviter de transformer en monstres leurs cobayes, lâché-je, acerbe.

Priétée pince aussitôt les lèvres, sincèrement désolée pour moi, et s'excuse du regard pour avoir continuer à parler de ça. Mais je ne lui en veux pas. Au contraire, elle a raison d'en parler, ainsi le sacrifice de ma mère ne sera pas vain. Maintenant, on sait ce qu'ils ont en tête. Tout ce qu'on a à faire, c'est les arrêter. Empêcher qu'ils n'étendent leur influence et leur pouvoir au Monde Libre. Ce monde est à nous, et seule la liberté y règne en reine.

— Bon ! Si on changeait de sujet pour ce soir ? C'est bien ce que veut Ménée, non ? Qu'on profite de la vie ? Alors, profitons-en pendant qu'il en est encore temps. Laisse tout ça de côté pour ce soir, Lénée, tous nos problèmes seront encore là demain.

J'inspire un grand coup et, pour faire plaisir à ma mère qui m'observe du coin de l'œil au loin, de temps à autres, j'acquiesce aux paroles de mon amie en tentant de faire le vide dans mon esprit. Quelque chose que je n'ai pourtant que très rarement réussi à faire jusqu'à aujourd'hui.

Mes pensées... Ces petites phrases intérieures qui ne me laissent jamais en paix. Pourquoi ne me laissent-elles jamais en paix ?

— Tu sais... glisse soudain Thétanis à mon oreille tandis que nos amis se sont lancés dans une discussion plus légère. Il n'y a pas de meilleur moyen pour te changer les idées que de te changer les idées. Pardonner, ça change les idées. Et pardonner la veille d'une guerre, c'est une sacrément bonne idée. A bon entendeur...

Elle me gratifie ensuite d'un petit sourire et d'un clin d'œil complice et par rejoindre Yaram qui se trouve... à côté de Nolen.

Message reçu...

Et comme bien souvent, Thétanis est de bons conseils. Je jette un dernier coup d'œil à ma mère encore à l'écart. Celle-ci m'offre un sourire fatigué qui se veut encourageant et que j'essaie de lui rendre, avant de prendre une grande inspiration et d'aller moi aussi poser mes fesses à côté de Nolen. Comme par miracle, Yaram et Thétanis se mettent à discuter entre eux, ce qui ne laisse d'autre choix à Nolen, s'il veut parler, de le faire avec moi.

— Tout ce que tu as fait à la Nouvelle Salpêtrière... c'est fou, souffle-t-il pour tenter d'entamer la discussion.

Mais je ne veux pas parler de mes prétendus exploits. Je ne veux plus penser à tout ça ce soir et ce n'est pas pour ça que je suis venue m'installer à ses côtés.

— Je suis désolée, lâché-je de but en blanc sans oser le regarder dans les yeux, préférant me concentrer sur les paumes de mes mains pleines de corne et de petits trous laissés par mes ongles. Désolée de ne pas avoir eu l'esprit assez ouvert, désolée de ne pas avoir pris le temps de venir te parler et surtout, désolée pour tous ces coups de fouet...

Tu seras la MortWhere stories live. Discover now