Chapitre 30 (partie 1)

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Deux heures plus tard, Tiaffa, Joshué, Bahini et moi-même sommes encore sur la route. Après notre discussion, Fianée a annoncé la mauvaise nouvelle concernant ma mère à tout le camp et j'ai vu les visages se déconfire.

Apparemment, ce que m'a dit la cheffe est vrai : Ménée est appréciée.

En ce qui me concerne, la seule chose qui tourne en boucle dans ma tête depuis qu'on a quitté le camp à dos de cheval, c'est le mot qu'elle m'a laissé dans la montre couplé aux révélations de Fianée.

« Elle t'aime, Lénée, elle t'a toujours aimée. »

Nous traversons une forêt d'arbres centenaires aux feuilles aux couleurs de l'aube. Quand le ciel se parent de teintes de roses, de violets et d'oranges. Beaucoup de bruits inconnus parviennent à mes oreilles, probablement des cris d'insectes et d'animaux cachés dans les fourrés. Lorsque je lève la tête et que je vois ce ciel aucunement limité par des murs en verre, une impression d'infini apaise mon cœur. Comme si je n'étais qu'une poussière dans l'univers, sans entraves, sans angoisses, car je sais qu'il y a bien plus grand et important que moi. Me sentir si petite me remet les pieds sur terre. Peut-être que les Hommes de l'Enceinte devraient eux aussi regarder le ciel de temps à autre. Ça leur ferait du bien. Ils arrêteraient peut-être de se prendre pour les maîtres du monde.

— A quoi tu penses ? me demande soudain Tiaffa en approchant son cheval à côté du mien tandis que Bahini ouvre la marche et que Joshué la ferme.

— A bien trop de choses, comme toujours, soupiré-je.

— Et c'est une mauvaise chose ?

Je hausse les épaules.

— On m'a appris que oui, mais j'ai l'impression que j'ai besoin de tout réapprendre.

— Mais ce qui est bien, c'est que cette fois, tu pourras te servir de tout ce que tu apprendras et personne ne te reprochera jamais de trop penser. Penser, c'est bien. Et j'ai l'impression, moi, que tu es bien plus futée que ce qu'on a bien voulu te faire croire dans l'Enceinte.

Je lui souris timidement. Je n'ai jamais reçu un tel compliment.

— On arrive en zone rouge, annonce alors sérieusement Bahini.

Les traits de Tiaffa se tendent et je sens l'ambiance devenir plus pesante.

— A partir d'ici, il vaut mieux rester le plus silencieux possible, me dit-elle tout bas. Nous avons environ une heure de route à faire pour en sortir, avec un peu de chance, nous ne rencontrerons aucun mutant. Mais si c'est le cas, Lénée, ne réfléchis pas. Ne pense pas à nous, pense à toi et lance Babylone au triple galop. D'accord ? Peu importe que tu n'en aies jamais fait, tu talonnes ton cheval, tu t'y agrippes comme à ta propre vie et tu fonces toujours tout droit.

Je déglutis, mais hoche la tête quand nous pénétrons dans une forêt beaucoup plus sombre que la précédente. Il doit être à peu près midi, il soleil brille haut dans le ciel, mais très peu de ses rayons parviennent à percer la canopée qui nous surplombe. L'obscurité environnante ajouté aux bruits des animaux qui se font plus rare me provoque un frisson d'appréhension. Je ne vois pas grand-chose et je ne sais pas à quoi m'attendre.

Bientôt, plus aucun son ne se fait entendre hormis celui des sabots de nos cheveux. Je crains que ce ne soit déjà trop.

Soudain, un cri perçant.

Je sursaute et Babylone m'imite, manquant de me faire tomber, mais je me retiens de justesse à sa crinière, le cœur battant la chamade.

— C'était quoi, ça ? me puis-je m'empêcher de demander à voix basse.

Tu seras la MortWhere stories live. Discover now