Chapitre 48 (partie 1)

95 21 3
                                    

Alors que Jarem, Thétanis et moi sommes tranquillement en train de déjeuner en discutant de tout et de rien, Tiaffa débarque et annonce de but en blanc de sa forte voix :

— Je pars demain soir. Et j'aurais un petit service à vous demander. Enfin, je voulais le demander à ma tomate albinos préférée puisqu'elle m'a déjà prouvé qu'elle avait une bonne paire d'ovaires, mais comme j'ai d'autres infiltrés sous la main, autant que je le leur demande aussi.

— C'est pas ton genre de tourner autour du pot, lui fais-je remarquer, étonnée. Qu'est-ce qui nous vaut cette prise de pincettes ?

Tiaffa hausse les sourcils et affiche un air réellement choqué. Puis elle jette un regard à Thétanis.

— Mais quel type d'entraînement vous lui avez fait subir en une matinée pour que le changement soit déjà aussi visible ?

— C'est l'effet Thétanis, ça, plaisante Jarem.

— Vous vous moquez, mais en attendant, grâce à moi, elle a foutu un coup de genou du tonnerre dans les parties de Shallan ! Et franchement, j'aurais manqué ça pour rien au monde !

Cette fois, Tiaffa écarquille les yeux plus grand qu'elle ne l'a jamais fait tout en se retournant vers moi.

— Tu as fait quoi ?

— Il... il m'a énervée... m'expliqué-je.

Tiaffa pouffe de rire.

— Mais pourquoi personne ne m'a appelée pour que je puisse voir ça ?

— Ma sœur, si je t'avais connue plus personnellement et si j'avais su que tu voulais y assister, sois sûre que je t'aurais envoyé un pigeon, se marre Thétanis.

— Et si on mettait de côté le coup que j'ai donné à Shallan ce matin pour savoir ce que tu voulais me demander ? rappelé-je gentiment à l'ordre Tiaffa, désireuse d'en savoir plus.

— Ah oui, oui, je vois, donc maintenant que t'as libéré ta voix, tu n'hésites plus à t'en servir ! Bien, me voilà prévenue ! Je voulais donc simplement te demander de veiller sur la prunelle de mes yeux.

Je la fixe sans comprendre et jette un coup d'œil à l'intérieur de ses iris. Rien ne me semble clocher. Sans parler du fait que si elle part, je ne pourrai plus les surveiller...

Je vois Tiaffa lever les yeux au ciel face à ma réaction.

— Je voulais parler de cette délicieuse créature que tu vois là-bas, ajoute-t-elle en me montrant du doigt une femme à peine plus vieille qu'elle en train d'apporter plusieurs nouvelles corbeilles de pains. C'est ma femme. J'ai jamais rencontré personne d'aussi gentil et bienveillant, mais elle ne sait pas se battre. Il faut que quelqu'un la protège pendant mon absence qui... risque d'être beaucoup plus longue que d'habitude.

Sa femme ? Intriguée, je jette un coup d'œil à Jarem. Il comprend mon interrogation sans que j'aie besoin de la formuler et hoche discrètement la tête d'avant en arrière. Les femmes, comme les hommes, peuvent donc elles aussi tomber amoureuses entre elles. Ce nouveau monde que je découvre depuis que je suis ici me semble plein de choses que je ne connais pas, que je croyais interdites ou que je n'aurais tout simplement jamais pu imaginer de moi-même. Mais quand je constate que Jarem et Tiaffa font aujourd'hui partie des plus belles personnes de mon entourage, je ne parviens pas à trouver leurs amours « mauvais » ou « déplacé », comme ce serait sûrement le cas des Hommes d'Avant. Je ne sais pas si je serai capable de veiller sur « la prunelle de ses yeux », mais ce que je sais, c'est que je ne vois pas ce qui m'empêcherait d'essayer de le faire.

— D'accord, je ferai mon possible pour la protéger, lui réponds-je, et un sourire rassuré illumine son visage.

Je ne comprends pas pourquoi le simple fait que je ne l'aie pas laissée derrière dans la zone rouge lui fait avoir autant confiance en moi, mais ce qui est sûr, c'est que c'est quelque chose auquel je tiens et que je ne trahirai pas. Ces femmes sont devenues les sœurs que je n'ai jamais eues. Ma nouvelle famille, plus précieuse que l'ancienne. Et je ne veux pas qu'il arrive malheur aux personnes que j'aime ni à celles qui leur sont chères.

Tu seras la MortWhere stories live. Discover now