Sans Toi

Page cent

Lundi 27 mai 2019

J'ai écrit à Louis finalement. Je n'arrivais pas à dormir cette nuit, alors je lui ai envoyé un message pour lui demander si ses petites soeurs avaient aimé les vernis à ongles. Il ne m'a pas répondu. Je m'y attendais un peu, mais pourtant ça m'a quand même déçu. J'aurais bien aimé savoir, car je l'ai aidé à choisir ces cadeaux. S'il ne va pas bien, je ne peux pas lui en vouloir de ne pas me répondre. Peut-être qu'il est comme moi, que quand quelque chose ne va pas, il ne veut voir personne et il n'a pas envie de parler.

Depuis que j'ai recommencé à lire, j'en suis à mon troisième livre. Il n'y a pas grand chose à faire ici, alors ça m'occupe et ça me permet de m'évader un peu. Ce matin j'ai demandé au Docteur Drews si j'avais le droit d'aller dans le parc pour lire, il m'a dit qu'à partir de maintenant, je n'aurais plus besoin de demander son autorisation. J'ai le droit d'y aller quand je veux, du moment que je suis présent pour tous les repas, rendez-vous et autres activités auxquelles j'essaie de participer.

Quand j'étais dehors, Calvin m'a rejoint. Il s'est assis sur le banc à côté de moi. J'en ai déduis que lui aussi avait le droit de sortir. J'ai continué à lire, jusqu'à ce qu'il brise le silence.

Il ne m'a toujours pas dit pourquoi il était là, mais il m'a raconté que quand il a su qu'il allait venir ici, il a eu peur. Il imaginait qu'il allait se retrouver dans un asile psychiatrique comme on en voyait dans les films. Je lui ai répondu qu'on n'était pas dans un hôpital psychiatrique, il m'a dit que maintenant il savait, mais qu'au début non, alors il avait imaginé tout un tas de choses qui lui faisaient peur.

En fait je crois qu'il avait un peu la même image que moi, celle d'un film d'horreur. Ça m'a donné envie d'en regarder un. Avec toi. Ça fait longtemps. Avant on adorait ça tous les deux, tu n'avais jamais peur toi, alors que moi je sursautais tout le temps. Ça te faisait rire. Je donnerais tout ce que j'ai pour t'entendre te moquer de moi une dernière fois.

Tu sais, ici ça ne ressemble pas du tout à un film d'horreur, les gens sont même gentils. Je veux dire, les autres patients. Je ne parle pas vraiment avec eux, mais je les vois agir entre eux. Certains passent beaucoup de temps toujours avec les mêmes personnes, je crois qu'ils sont devenus amis en quelque sorte. Ils ne sont pas tous malades, certains sont ici parce qu'ils ont subi des grosses opérations et ont besoin de temps pour se remettre. Il y a un peu de tout et de tout âge.

Tu crois qu'il y a des gens qui aiment être ici ? Qui se sentent bien dans cet hôpital ? Qui n'ont pas envie de rentrer chez eux ? Moi j'ai envie de rentrer à la maison. Ça fait deux mois que je suis là, c'est long.

Calvin m'a fait penser à toi, il ne te ressemble pas, mais il m'a interrompu dans ma lecture et toi aussi tu aimais toujours venir m'embêter pendant que je lisais.

Tu me manques.

Bonne nuit Railey.

— Harry