Tout son corps fut secoué, et le métal des menottes s'enfonça un peu plus dans sa chair. Rygam gémit en réalisant qu'il ne pouvait pas aider sa compagne. La seule chose qu'il pouvait faire se résumait à effleurer son esprit. Alors il se colla à sa psyché, et lui prodigua des caresses qu'il espérait apaisantes.
Quand Indigo parvint à se calmer, elle remarqua des gouttelettes de sang sur le sol gelé devant elle, qui n'étaient pas présentes quelques instants plus tôt. Rygam aussi les remarqua. Le grognement qui suivit ce constat était teinté d'un désespoir poignant.
Pourquoi est-ce que je n'arrive pas à contacter Wraith ? demanda Indigo. Dis-moi qu'il va bien.
Il était en vie quand je l'ai quitté. Mais je n'ai plus aucun contact depuis. J'aime pas, marmonna-t-il. C'est silencieux.
Le peu de sang qui restait dans les veines d'Indigo se glaça. Tu... es parti ?
Oui, dit-il. Vous aviez besoin d'aide.
— Comment est-ce possible ? souffla-t-elle pour elle-même.
Dans les profondeurs des couloirs, une porte grinça.
Ta walkyrie est venue me chercher, répondit Rygam, aussi simplement que s'il énonçait une chose banale, et non un exploit monumental.
Il fallait rester réaliste. Des pas se rapprochèrent, Indigo les ignora. Raza était probablement en train de revenir, mais elle avait une chose plus importante à mettre au clair.
Tu fais erreur Rygam. Ma walkyrie n'existe pas. À ces mots, quelque chose se recroquevilla douloureusement en elle. Peu importe ce qui t'a envoyé dans mon crâne, mais ce n'est pas elle.
— C'est impossible, chuchota-t-elle à regret.
C'est. Elle, martela le démon.
Indigo mobilisa ses quelques forces pour secouer la tête, même si personne n'était là pour la voir.
Elle n'existe pas, dit-elle entre ses dents. Elle ne s'est jamais manifestée, pas même quand j'avais le plus besoin d'elle.
Mais...
— Elle n'existe pas ! hurla-t-elle dans un sursaut. Elle est morte !
Prononcer ces mots était un calvaire. Sa walkyrie était morte le jour où on lui avait arraché ses ailes, point. C'était la première fois qu'elle mettait des mots sur ce qu'elle ressentait vis-à-vis de cette absence. Quelque chose se brisa en elle.
La silhouette de Raza se découpa dans l'embrasure de l'entrée. En voyant la mine affligée de la jeune femme, il rit.
— La folie est arrivée plus vite que ce que j'avais prévu, constata-t-il platement. Qui est-ce qui est morte ? s'enquit-il avec intérêt.
Je suis désolée, résonna une petite voix.
Indigo hoqueta. Elle écarquilla les yeux, avant de regarder frénétiquement les parois de la grotte, comme pour se raccrocher à quelque chose de tangible.
La petite voix était brisée, douloureuse à entendre. Elle suintait la détresse et l'affliction.
Elle était aussi détruite qu'Indigo. Aussi détruite que sa walkyrie.
Je suis désolée.