Chapitre 54

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Clong !

Ce bruit soudain me fit cligner des yeux. Je me trouvais dans une pièce sombre, froide et avec des barreaux. En gros dans une prison. J'avais les doigts gelés et le bout du nez me piquait. Je n'étais plus habituée à ressentir les différentes températures. Je devenais une proie facile car je n'étais plus vampire. Je me levais puis j'essayais de bouger les barreaux mais sans résultat.

Toujours les mains sur les barres de fer froid, j'entendis les cris plaintifs. Des cris effroyables qui me donnaient la chair de poule. Peu de temps après, je m'asseyais contre le mur du fond, à l'opposé de l'unique sortie. Je n'avais aucune fenêtre et la seule lumière qui me permettait de voir provenait de la galerie. Je repliais mes jambes contre moi pour me procurer un peu de chaleur.

Qu'allait-il m'arriver maintenant que je me trouvais emprisonnée, sans défense et sans personne ? Où se trouvaient les autres pour que je n'entende pas Tyler ? Avais-je seulement rêvé lui faire confiance ? Je me demandais encore ce qu'il avait fait dans ma vie d'avant, ce qu'il avait dû abandonner pour protéger son frère. Tyler était un homme d'une intégrité totale. Il avait tout quitté par amour pour son frère. Il m'avait mentis pour le protéger. Devais-je lui en vouloir ?

D'un coup, le visage trop familier du Killer se pointa aux barreaux de ma cellule. Il avait une mine effroyable et ce cadre n'arrangeait en rien l'éclat de sa cruauté. Il portait les mêmes vêtements tous les jours donc je ne pouvais pas savoir depuis combien de temps j'étais dans cet endroit. Il décrocha le trousseau de clés qui pendait à sa ceinture et, avec une grande rapidité, il ouvrit la porte et s'accroupit à mes côtés. Sans même le faire réellement, il me dévora du regard.

« Je suis appétissante ? Qu'est-ce que tu attends pour me croquer un bon coup ? De toute façon on sait bien comment ça va se finir tous les deux. Toi et toute la bande de timbrés allez me tuer. Donc autant le faire maintenant que dans dix ans ou même mille ans. »

Il passa sa main dans la poche de sa veste noire trouée et en sortit des menottes. Ce détail me perturba. Je ne savais pas que les vampires utilisaient aussi des menottes pour leurs prisonniers. Vu l'état dans lequel elles étaient, elles devaient exister depuis plusieurs années.

Le vampire me prit vraiment pour une criminelle. Il me les enfila devant moi et, toujours avec ses yeux rouges, il me contempla plusieurs secondes. Il devait en profiter. Pour une fois que personne ne se trouvait avec nous. Qu'est-ce qu'il se passait dans sa tête ?

Subitement, la main du Killer effleura les mèches de cheveux qui s'étaient mélangées à ma frange. Il me les mit derrière mon oreille. Moi je les aimais bien ces quelques cheveux devant mon visage. Cela me donnait sûrement un côté plus agressif. Ce geste me laissa perplexe mais pas pour longtemps. Je vis ses canines grandir à vue d'œil pour s'approcher petit à petit de mon délicieux cou.

« Oh non pas encore une fois ! Ça n'allait tout de même pas se passer comme dans les films ! »

Je bougeai pour le gêner dans son entreprise machiavélique. Les bras d'abord puis les jambes. Malgré ça, il fut en état de me neutraliser en me bloquant totalement. J'avais une peur croissante qui forma une boule dans mon ventre. J'avais envie de crier, de pousser un rugissement tel que je n'en avais jamais fait. Mais ma gorge se noua sous le coup de la peur.

Je sentis ses longues dents venir effleurer la pâle peau de mon cou. Je ne pouvais plus rien faire pour me sortir de l'emprise du Killer. Mais juste avant que ses canines ne s'enfoncent dans ma chair, une voix l'interrompit.

- Qu'est-ce que tu fous toi ?

Je ne voyais que les pieds de mon sauveur mais je le remerciais déjà de son apparition presque miraculeuse.

- Zcluhuy ne t'as pas demandé de la mordre mais de l'apporter à l'Ajdonsc, ajouta-t-il après avoir compris la situation qui se trouvait face à lui.

« À quoi ? À l'abattoir ? Non mais vous avez crus que j'étais du bétail, un bon gros morceau de viande prêt à être consommé ? Rêvez pas trop les mecs, je ne suis pas comestible du tout. Demandez donc l'avis du chien de ma voisine qui avait voulu me bouffer la guibolle ! En compensation, je lui avais tiré des fléchettes de jeu dans le derrière. »

Le Killer me prit sur l'une de ses épaules comme un sac à patates. Je n'ai pas apprécié le trajet étant donné que j'avais l'impression que mon estomac faisait des loops. Durant tout le « voyage », j'avais fermé les yeux pour me concentrer essentiellement sur mon estomac.

Tout à coup, il s'arrêta, me déposa au sol pour me retrouver encerclée de vampires. Une fois sur le sol, je ne me sentis pas plus l'aise. Tous les mêmes : ils me fixaient intensément, impatient de se jeter sur la nourriture qui venait d'être servie. Le leader venait de se frayer un chemin pour venir se poser juste devant moi.

- Vous l'aurez bien compris mademoiselle Lawford, nous ne pouvons pas vous relâcher en pleine nature alors que vous savez beaucoup trop de choses. J'ai une seule question qui sellera à jamais votre destin. Voulez-vous nous rejoindre auquel cas nous vous laissons la vie sauve ou préférez-vous mourir ?

Ma vie ne tenait à une seule et simple question ? J'aurai pu avoir un de leurs poignards pointé sur le cœur pour que je donne rapidement une réponse et la décision aurait été, je pense, plus facile. Là, je devais décider de vivre enfermée pour la fin des temps ou mourir pour être enfin libre.

- Dans les deux cas je vais mourir, l'une de façon rapide et l'autre de façon beaucoup plus lente. M'enfermer c'est comme enfermer un animal qui ne demande qu'à vivre librement : c'est inhumain. Ah mais j'avais zappé. Vous n'êtes pas humains, vous êtes des monstres !

J'avais hurlé la dernière phrase comme un cri de désespoir. Ce dernier mot resta en suspend au-dessus de toutes les personnes présentes. Des larmes de fatigue et de détresses inondèrent mon visage. Mais sans vaciller ni me décourager, je tentai de les convaincre de changer de vie. Car je savais que les mentalités pouvaient être changées. Il me restait un soupçon d'espoir.

- Vous êtes prêts à tuer une fille à l'aube de sa vie sans avoir connu le monde à l'extérieur de ses remparts. Que voulez-vous m'apprendre d'autre que ce que m'ont appris mes dix-huit ans de vie ? Moi je vous le dis : rien de votre monde ne pourra m'apporter plus grande satisfaction que celui d'où je viens. J'ai des origines encrées en moi et cela à jamais. Quoi que vous puissiez faire, quoi que vous puissiez dire : je vis moi ! Et comme tout vrai humain, je vais mourir un jour. Peu m'importe la date, l'heure, la minute, la seconde, moi, j'aurai vécu ! J'aurai été une femme libre !

La main froide du Killer me pris la gorge et couru pour me plaquer violemment contre un mur. L'odeur étrange que j'avais sentie en arrivant s'intensifia d'un coup. Sa voix que je n'avais encore jamais entendue se fit claire, froide. On aurait dit le diable en personne. Il ne prononça que trois mots, les trois derniers mots que j'aurais entendus de ma vie :

- Regarde tes amis.

Il me fit un signe de tête. Je commençai à manquer d'air pour respirer et le Killer ne faisait qu'amplifier la pression de sa main. Trouvant les dernière forces, je tournais la tête dans la direction indiquée et vit au loin des corps. Tous allongées sur le sol, tous reconnaissables : Luke, Tyler et Matthieu. Tous les trois sans vie sur le dallage rougis du sang du seul humain. Ils avaient fait leur choix. Ils étaient partis. J'allais les rejoindre.

Mais qu'y avait-il après la vie ?

Je n'allais pas tarder à le savoir.

Sur cette affreuse image, mes yeux se fermèrent et mon cœur s'arrêta de battre.

𝐃𝐞𝐬𝐭𝐢𝐧𝐲 𝐉𝐞𝐦𝐦𝐚 [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant