Oui, nous nous reverrons, mes frères... - Partie 3

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Base américaine ouest, 26 mars 852

Ce fut un réfectoire animé qui accueillit Armin. Des soldats enjoués dès le matin, il n'en avait plus vu depuis des mois et des mois. Dans cette longue pièce basse et sans fenêtre, au plancher fait à l'arrache, néons froids, et murs gris, une cinquantaine d'américains habillés d'épais uniformes kaki bavardaient. En face d'eux, sur leurs tables de pin, de simples bols de bouillie d'avoine. Moins nourrissant que les rations sèches et sans goût des Murs, songea le stratège en se dirigeant vers les vastes plats de fer qui les attendaient, lui et Eren, au fond de la pièce.

Celui-ci s'y dirigea sans attendre. Il ne prenait pas toujours la peine d'attacher ses cheveux mi-longs ; les crânes rasés de près et autres chignons stricts le jalousaient presque. Et le blond non plus ne respectait pas cette règle dès le lever. Il était trop habitué à son éternel carré pour cela. Je les arrangerai bien après...

Il attrapa un récipient par automatisme, et ne remarqua qu'à peine le jeune garçon encore plus blond que lui, dont les yeux pâles observaient avec fatigue la louche qu'il était en train de manipuler. L'adolescent haussa les sourcils sous la surprise. Il ne lui donnait pas plus de douze ans. Est-ce qu'il est en train de faire son service ? Mes parents m'ont pourtant dit qu'ils ne sélectionnaient aucun soldat classique en-dessous de dix-huit ans...

Et c'est qu'il se redressa brutalement dès qu'il les vit. Il manqua de laisser tomber l'ustensile, le rattrapa de justesse, porta sèchement sa main à sa tempe. Sur son petit visage rond, un tracas manifeste.

« G... Good morning ! What do you...

The usual breakfast, Falco, intervint une voix familière. »

Armin s'orienta vers Reiner avec étonnement – son air tourna vite au sombre. Eren, lui, plissa simplement les paupières. Le plus grand les dévisagea un instant, détourna le regard, et chopa une écuelle. Mais si Armin crut bien échapper à sa présence sans incident, ses mots l'arrêtèrent illico.

« Est-ce que je peux vous rejoindre à votre table ? »

Le jeune stratège se contenta de sourire au dénommé Falco, et de se diriger vers une place vide. « Comme tu veux », énonça alors platement Eren avant de suivre. Il les entendit, au beau milieu du joyeux brouhaha, les rangers du semi-titan cuirassé claquer contre le sol de chêne. Pourquoi lui ? pensa-t-il avec lassitude.

Il s'assit machinalement sur un banc. Son meilleur ami se mit à sa droite, l'assassin de Jean s'installa en face. Et il lorgna sombrement son petit déjeuner, et il darda enfin ses prunelles châtain sur eux. Armin les voyait, le trouble et la fatigue, sur sa face rectangulaire.

« Ce retournement de situation... », souffla-t-il. « Je ne m'y attendais pas. Pourquoi avoir rejoint notre côté ? » Il serra lentement les dents.

« Eren, toi qui...

— Tu nous as beaucoup surpris, en 850, le coupa l'intéressé. »

Un lourd silence tomba sur la tablée. Le plus grand le fixa avec stupéfaction. « Cette révélation, je ne m'y attendais pas. Pourquoi cette amorce de génocide ? » L'intéressé ouvrit la bouche, en vain. « On n'a jamais eu le temps de s'expliquer avec toi, Reiner. Tu es passé de camarade à ennemi en peu de temps... A cause de Marion, c'est ça ? »

Le brun marqua une pause pour avaler une cuillerée de bouillie. « Tu t'étais d'abord amusé à jouer au grand frère... Puis tu a détruit Karanes... Et après avoir tué quelques explorateurs, tu as décidé de jeter un rocher sur Conny... Il a perdu ses deux jambes, pour information », glissa-t-il.

ᴀʟʟᴇʀ-ʀᴇᴛᴏᴜʀ - ᴀᴛᴛᴀᴄᴋ_ᴏɴ_ᴛɪᴛᴀɴ&0.7[1] ⌜ᵗᵒᵐᵉ ⁴⌟Où les histoires vivent. Découvrez maintenant