Et tout ça...pour ça.

6 1 0
                                    

-Est-ce que ma mère est là?

C'était presque pire que s'ils l'avaient vraiment touché. J'avais les mains posées sur ses oreilles, et je sentais la chaleur de son corps, qui n'allait plus jamais retourner à la normale. Mais là, il délirait exactement comme elle. Je l'ai alors embrassé en me disant que ce serait tous les derniers bisous.

-Elle est partie reposer...enfin se reposer.

-Non c'est vrai...Ne m'embrasse pas tu vas attraper ma maladie sinon.

-On va ressortir d'ici...Il neige. Il y a tellement de déportés qui ont été libérés ici , les hôpitaux sont pleins à craquer, raison de plus pour nous accueillir. Si ça se trouve ton père est à l'hôpital, il faudrait aller le chercher.

-Sara ça fait deux ans...Regarde moi. Je n'ai même pas eu la force de tenir quelques mois. Tu te souviens comment il est fait mon père.

-Tu sais je me suis souvenue d'un truc pendant mon sommeil. Enfin je sais pas si c'est un souvenir. Peut-être que c'était un rêve. Je n'en sais trop rien.

-Tu te souviens de notre lycée hein? Quand on avait simulé la guerre contre les allemands. J'y pense tous les jours à cette scène moi. Il y a jamais eu une telle unité entre nous tous qu'à ce moment là.

-Collège. On est jamais au lycée. C'était un souvenir de la chorale. Tu t'en souviens des spectacles de chorales toi? J'ai jamais voulu monter sur scène. Mais Zosia le faisait. Oh Zosia...

-Tu ne voulais jamais monter sur scène mais un jour la prof t'avais demandé de le faire en classe. Elle voulait que tu chantes en juif. C'était très maladroit de sa part j'ai trouvé.

-T'aurais préféré que ce soit toi?

-Je sais que j'étais pas le meilleur élève et que j'étais un gros lourd à cette époque là...J'ai jamais brillé par ma subtilité et sûrement pas quand j'étais gosse. Mais je t'ai aimé depuis bien plus longtemps que le ghetto.

-C'est vrai? ai-je demandé d'une voix tremblante.

-Quand j'ai vu que tu allais vivre avec moi...Et quand je vois qu'on a vécu tout ça, ensemble, tous les deux et que je vais sans doute mourir avec toi...

-Mourir avec moi?

J'avais la voix tremblante, mais il est vrai que je n'arrivais plus à contenir mon émotion. On m'avait déléguée d'office pour tout contrôler mais là j'étais si épuisée que je ne pouvais pas paniquer, et comment ne pas paniquer quand on ne sait pas quelle décision prendre? Je pourrais aller chercher des médicaments en courant, mais je n'en avais pas la force physiquement. Je me suis levée et mes jambes ont coupé court à tout mouvement. Je me suis fait mal et j'espérais en saigner, qu'on me montre que j'étais bien vivante. Et je m'en veux. Jusqu'au bout j'aurais été inutile. Pour commencer j'aurais même pas du les empêcher de prendre les wagons. J'aurais abrégé leurs souffrances. Enfin, non, je ne le pense pas. Je me suis approchée de Waldek et j'ai serré sa main;

-Juz lato odeszlo i kwiaty przekwitly...

Tu manques sûrement de sommeil Waldek. Je suis fatiguée moi aussi.

Idzie lasem pani jesien...

-Sara, tu diras à mon père...

Je n'en croyais pas mes oreilles.

-Que je suis mort heureux.

-Mais qu'est-ce que t'as à croire comme ça que tu vas mourir?

-J'ai mal...

-Et pourquoi t'as pas commencé à par me dire ça au lieu de vaguement me dire que tu allais mourir?

-Tu survivras mieux sans moi. A aucun moment je n'avais fait un quelconque effort pour organiser la vie de notre groupe.

Les bourgeons de la Haine [Between shades of gray fanfic]Where stories live. Discover now