Chapitre 41C:Les illusions retrouvées.

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-Est-ce que dans ce monde - ci,demanda Sara,il est possible de faire revenir les morts à la vie?

J'aurais pu rire cruellement.Mais j'ai réfléchi à ce que ça sera si c'était vrai.Sans doute les morts retournés à la vie ne me reconnaîtraient pas.Mon père non en tout cas.Peut-être ma mère,cette magnifique jeune femme dont il était tombé sous le charme.Normalement,je ne devrais pas prendre un tel temps de réflexion pour répondre à une question aussi simple.

-Me serais-je retrouvée ici sinon?

C'est alors qu'une fée est arrivée avec des boissons chaudes.J'ai tourné la tête vers Lana,qui serrait super fort ses mains aux jointures saillantes,contenant une rage de vengeance ou une tristesse destructrice,sûrement les deux.

-Je comprends enfin pourquoi mon père avait l'air si tourmenté...disait-elle.J'aurais dû le comprendre dés 1941...

Elle parlait tout bas,la nuque pliée vers le sol comme une plante sèche,d'une toute petite voix.

-Dans mon enfance il avait toujours été jovial.Puis ce fut un autre homme...

Maintenant,je pense que de sa part,ne pas avoir fui la Terre alors qu'on l'aurait laissé aller sur Tir Na Nog était un acte de courage aussi désintéressé que sublime.Et très bête aussi...Mais comment est-ce que je peux oser parler comme ça d'un mort?

Ainsi pensait Sara également.Et ainsi pensai-je.Je les contemplais,comme fascinée.

-Je peux savoir ce que tu fais?a-t-elle dit,comme si elle croyait que je me rassurais quant à mon état en contemplant le sien.Elle avait une voix acerbe.Mais qu'est-ce qu'ils lui ont fait?

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13 février 1945.

J'ai dû tomber d'épuisement d'un coup,car Ponno a dû venir me chercher comme si j'avais encore dormi dans la rue.

-Expliquez-moi ce qui est arrivé après,Loony,je vous écoute.

J'ai tout raconté,tout du mois de faicho 4952.J'ai tout raconté.La tempête.Luke,venu pour me sauver.La maison.Je me souviens...J'ai vu sa famille.Ses parents dont les portraits traînaient sur le sol.Ce qu'il m'avait dit à propos de leurs destins,tout cela je le savais déjà en réalité.Et puis comment il m'avait administré une Noudiz,un sortilège d'amnésie.La maison sembla alors abandonnée,j'étais revenue dans la réalité.Pour finir,j'arrivais jusqu'à une tombe,qui était celle de Bergonian Gérénianski.A chaque fois que je parlais,je voyais les yeux noirs de Ponno s'arrondir et sa bouche s'ouvrir de stupéfaction.

-C'est une illusion que vous vous êtes envoyées.Est-ce avant vos cinq mois en camp de travail?

Oh,Gilfo,on va y venir..Je ne peux pas poser de mots sur la démesure du nouveau camp où je serais déportée jusqu'à la fin de 4952.Il me fallait un peu de temps.Un peu de temps.Je fus contrainte de replonger dans l'enfer d'un camp de concentration.Assumer le rôle de responsable de la situation politique sombralienne c'était habituel pour moi.J'étais même soulagée qu'ils ne me livrent pas aux japonais.

-Comment?s'étonna Ponno.

-Ils savaient,ils sont pas cons figure-toi.

-Pourquoi?

-J'essaie encore de comprendre de mon côté ce déferlement de haine vois-tu.

-C'est les japonais qui me posent question.

-Ils savent que le Japon existe,même si l'inverse n'est pas vrai.

-Qu'est-ce qui te dit que...

-C'est pas forcément des gens en qui Ankarka ou Sombralia aurait confiance.Toujours est il que...Sans doute cette illusion était elle un stratagème de plante carnivore.Ils m'ont hypnotisé si fort que j'eus l'impression d'avoir une commotion cérébrale,avant de me réveiller au cri de:

-Et voici ta chambre!

Le jeune rebelle qui avait été chargé de m'amener jusqu'ici me jeta négligemment comme un sac de navet au pied de l'horrible planche,retenue sans magie par des chaînes.Ca sentait la poudre de goudron,le marché aux esclaves,le bois de bateau.Il appuya son épaule contre la porte,croisa les bras pour faire gonfler ses murs et me sourit d'un air supérieur,comme si il avait quelque chose à se prouver.Heureusement,quelqu'un ouvrit la porte derrière lui et je fus sauvée par le gong.Grand rassemblement.Je sautais presque dans le couloir,comme un krang,abandonnant mon air frêle de détenue à abattre pour marcher droite comme un membre de l'armée royale.Je devais faire bonne impression,me dire que je survivrais même si c'était pour mourir ici.Je fis volte face et observa l'autre détenu du couloir,un type d'une cinquantaine d'années.J'ai pensé à lui taper la discute mais je me suis rétractée.Les lèvres de ce mec se sont bien mises à bouger,mais aucun son n'en est sorti.Remarque,j'étais dans le même état.Même demander à un type à côté de moi comment me servir de cette barre argentée qu'on nous tendait j'osais pas.Je ne pensais plus qu'à ce travail obligatoire.Je n'avais jamais travaillé de ma vie.Non,cobaye humain ça compte pas.Comment peut-on forcer quelqu'un à travailler?Après,oui,comment peut-on forcer quelqu'un à mourir,à perdre sa famille?

Dans la langue sombralienne,il existe un mot générique qui rassemblent tous les mots vulgaires.Gilfo.Je l'ai lâché comme je me serais soulagée.Et je pense que c'est pour cela que je me suis retrouvée d'un coup sur le sol.Une fois redressée,j'ai arrangé ma tenue de travail,enfilée à l'arrache devant un groupe de fille qui conversait de ma stature.Décidément,tous les prétextes,et même il n'en fallait aucun,étaient bons pour nous attaquer ici.Mon pantalon bleu était trop large.Mon t-shirt doré froissé.Mais au moins j'étais habillée,et j'espérais le rester longtemps.

-Qu'est-ce que tu fais là?me demanda le mec de 40 ans qui me suivait comme si on se connaissait.

-Heuh..

-Laisse-moi deviner,le gouvernement t'envoie ici parce que tu n'as pas bien fait ton boulot et qu'on t'accuse de sabotage?

-Je pense que ça va un peu plus loin,ai-je répondu en riant franchement.

-Tu t'appelles comment.

-Loony de Sombralia,monsieur.

Ses éclats de rires rauques et drus,m'ont carrément fait mal aux oreilles.

-Oui,c'est moi.

-T'es vivante au moins.

Hé,Bofer!

-Quoi Zdiwom?

-Figure-toi que nous accueillons aujourd'hui l'ennemi numéro 1 des rebelles!

Bofer,l'interpellé,lâcha lui aussi un gros éclat de rire de cochon.Mais si il était en camp de travail c'est que c'était un type bien.

-Ils sont pas supposés faire du mal à la base,ai-je rappelé en riant.

-Pense-tu,je crois que l'on peut leur faire confiance!





Les bourgeons de la Haine [Between shades of gray fanfic]Where stories live. Discover now