Chapitre 11B:Direction rien.

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Ce qui,probablement,fausse toute la vie,c'est qu'on est convaincu de dire la vérité quand on dit ce qu'on pense. Sacha Guitry.

-Est-ce quelqu'un parmi vous aurait suivi une formation médicale?Même quelqu'un qui aurait abandonné  en première année? Même après le premier semestre,aller!

J'ai pensé à ma cousine Zita,qui aurait voulu suivre une formation d'infirmière.D'ailleurs,qu'est ce qui lui était arrivé à celle-la?Ca m'énerve,je comprends pas,où est l'intérêt de briser une aussi belle famille?Qu'est ce que ça va leur apporter de  positif,dites moi?

J'essayai d'ignorer leur conflit mais les piques que lançaient Rabys,l'homme qui sort d'une opération la jambe presque plus tordue qu'avant faisait que j'avais pas d'autre choix qu'intervenir.

Les passagers,tous,répondirent par la négative,avec un petit air qui signifiait"désolé,je peux rien pour vous."

-On peut essayer de lui écliser la jambe,fit Lavra,comme ça.

-Très bonne idée!Seulement,est-ce que quelqu'un ici aurait quelque chose de rigide?

La situation de ce pauvre type n'inquiétait pas que moi,je vis que Gaëll fouillait dans son sac aussi.

-J'ai une petite réglette en bois,dit-elle en sortant ledit morceau de bois rempli de noms de filles qu'elle ne reverra probablement pas.

J'en ai profité pour reposer la question à ma mère,à savoir si je pouvais regarder ce que nous avait donné ma tante.

-Mais non,Lana,qu'est-ce que cela pourrait t'apporter de toute manière?Elle avait la voix tremblante.

-Des réponses,déclarai-je sombrement.

Pendant ce temps,Rabys réclamait une euthanasie pour la troisième fois depuis qu'il est arrivé,et ma prof de maths attachait le réglon avec ce chèche rouge qu'elle portait très souvent.Ma mère a participé à l'effort solidaire en faisant contribuer son chèche noir.

Il était évident que ce matériel n'avait pas servi à ça depuis longtemps.Ca lui faisait mal,j'entendais Markas crier.

Au dernier moment,j'aurais pu fuir.J'aurais pu reculer,sauter,renoncer,partir en courant,comme je le faisais quand j'avais peur,quand j'étais une petite trouillarde qui n'avait pas passé le baptême de l'horreur.Mais c'était trop tard.Le camion s'ébranla maladroitement et quitta la ville.

Je me suis allongée sur le sol,lasse de tout ça,et j'ai pensé à des choses plus agréables,comme avant de m'endormir.J'ai pensé à la mère de mon père,celle qui est enfermée au couvent.J'ai pensé à elle,oui.Je lui ai intérieurement suppliée de prier pour nous,pour notre âme et pour la sienne.

-Cette jupe a servi à ta grand-mère,me dit ma mère comme si elle avait lu dans mes pensées,ce qui maintenant me semble possible,que sais-je?

Je me suis brusquement relevée.Cela me semblait indécent de porter la robe de cette dame.J'aurais voulu me changer,mais je ne le pouvais pas.Ben non,regardez autour de moi.

On est arrivé dans un dépot de rase campagne.C'est là que ma mère écrivit cette lettre d'adieu,sur un papier qui doit à présent être jauni,après tout ce temps.C'était risqué car la cour de la gare était remplie de camions soviétiques.Nous entendions des cris de voix féminines un peu plus loin,qui se rapprochaient au fur et à mesure que notre route progressait.Enfin,on vit la femme en question,qui se penchait en hurlant le nom de sa fille.

-On vous entend dans toute la cour hurler sur votre Synki,râla Rabys,on voudrait savoir ce qui se passe.

Il avait ce petit ton méprisant qui m'énervait vraiment.

-Ma fille Synki est-elle avec vous?

Il secoua la tête.

-On a par contre une certaine Clara qui se mêle de ce qui ne la regarde pas,et qui risque de tous nous faire tuer,fit une voix derrière elle,en russe.

Elle a fini par se taire quand on les a doublé.

-Pourquoi on nous a amené dans un dépot de campagne et pas à la gare de Riga?demanda une vieille femme.

Sans être directement interrogée,ma mère a répondu:

-Sûrement que vu le nombre de gens qu'il y a ici,il sera plus facile d'organiser le départ ici.Vous savez que la gare est toujours noire de monde.

Elle parlait comme si on partait en colonie de vacances,et bizarrement,plus ça va plus c'est l'impression que j'avais.Impression qui allait mourir bientôt.

Ma mère s'est affalée sur le sol,et elle paraissait soucieuse.

-Ca va?

-Ca va très bien.

-Je ne peux pas croire ce que tu dis,j'ai l'impression que tu transformes la réalité,et que tu te transforme toi aussi.Prouve moi que tu es toujours la même,donne moi ce baluchon.

-Je ne peux pas,Lana,fit-elle d'une voix brisée.

J'ai regardé autour de moi.La gare était situé dans un no man's land entouré de forêts abandonnées.J'avais l'impression que les russes étaient venus faire le ménage,passer la serpillère en chassant des milliers de grains dérangeants.J'étais l'un de ces grains.Autour de moi s'étendaient une marée d'autres grains,qui étaient en rélaité des personnes.Des personnes au bout de leur vie.

-Davaï,nous cria un garde en ouvrant hayon de notre camion.

En sortant,j'ai lancé mon regard loin derrière le fourmillement de camions d'agents et de gens chargés de bagage,et je vis un trou dans le grillage qui aurait pu me permettre de fuir dans ces sombres forêts sûrement emplies de myhtes païens.

-Surtout,les filles,restez près de moi,fit maman.Il ne faut pas que nous soyons séparés.Tenez moi la main,ou cramponnez vous à mon manteau.

Je pris la main gauche de ma mère,et Gaëll s'agrippa à une poche du manteau pour laisser la main droite libre à Lavra .

-Non.

Lavra avait toujours considéré ses parents comme des gens voulant qu'elle termine ses études avec un diplôme en poche.Lavra avait toujours pensé que nous avions bien cherché ce qui nous étaient arrivé.C'était très inquiétant pour nous de la voir s'éloigner exprès.

Penne,j'aimerais tellement que vous nous dîtes la vérité à propos de ma mère.Je ne veux pas que vous me mentiez.Cela ne sert à rien de mentir,j'en souffre encore davantage.

-Quand tu auras fini ton récit,Lana.Quand tu auras fini ton récit.

Les bourgeons de la Haine [Between shades of gray fanfic]Where stories live. Discover now