101 / Les vivants et les morts

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Se relever fut une épreuve. Camille dut se mettre à quatre pattes, puis prendre une longue inspiration avant de se dresser sur ses deux jambes. Une autre inspiration profonde, et elle ouvrit grand les yeux sur l'obscurité... qui n'en était plus une.

Elle voyait parfaitement l'immense salle dans son ensemble : Les colonnes et les arches, le sol sillonné d'arabesques et les sarcophages. Tout était nimbé d'une lueur bleutée comme ces maisons fantômes dans les films. Sauf que pour elle, c'était la réalité. À moins qu'elle ne rêve ? Ou alors elle était morte ?

La jeune femme se tata avec incrédulité. Est-ce qu'un fantôme pouvait avoir conscience de sa propre existence ? Qu'est-ce qu'elle en savait ? Les fantômes, ça n'existait pas ! Enfin, jusqu'à présent, les vampires non plus. Or, pour les Dévoreurs, c'était bien ce qu'elle était devenue ! Et puis, ce qu'elle avait vu ou cru voir... ça avait tout l'air d'être des putains de fantômes ! Et ils l'avaient tous traversées jusqu'au dernier avant de disparaître elle ne savait où, la faisant tomber inconsciente, sous le choc de leur énergie fulgurante.

Camille mit ses mains devant elle et constata qu'elle-même n'avait pas cette luminosité bleutée, comme si elle était un élément incongru dans un tableau. C'était déjà ça ! Elle se demanda si l'effet visuel qu'elle subissait, n'était pas lié au choc qu'elle avait encaissé plus tôt. Elle s'était évanouie quand même ! Pragmatique, elle se dit qu'elle devait utiliser à son avantage cet étrange phénomène. Si c'était sa curiosité qui l'avait poussée à aller jusqu'ici, c'était son instinct de survie qui lui intimait maintenant de bouger.

Laissant derrière elle la fresque, elle commença à avancer pour voir si elle ne trouvait pas un autre accès pour quitter les lieux. Parce qu'après tout, rien n'aurait plus la moindre importance si elle mourait ici. Elle se mit donc à scruter la salle avec attention et remarqua, étonnée, qu'elle pouvait lire ce qu'il y avait dans les cartouches au-dessus des sarcophages. Il s'agissait de nom. Un autre détail, qui lui avait échappé jusqu'alors, la fit réfléchir brièvement. Collé à chaque sarcophage, trois marches de pierre devaient en permettre l'accès. Comme si ces tombes avaient été peuplées de vivants qui s'y reposaient avant de les quitter. Tout ceci n'avait aucun sens.

Et puis, Camille arriva plus ou moins au centre de la salle, et elle l'aperçut. Une porte dissimulée dans un mur. Elle était invisible pour une personne qui n'aurait pas eu de lumière suffisante, car son tracé suivait la séparation naturelle des pierres utilisées pour faire les murs. Ça n'était qu'un grand rectangle parfaitement enchâssé dans la maçonnerie. Un grand rectangle qui allait lui permettre de sortir d'ici. Enfin, elle espérait...

***

Assis sur un haut tabouret pivotant, Wira fixait le cadavre d'Alya recouvert d'un drap. Il espérait toujours qu'elle se relève brusquement en rigolant, purgée du mal qui avait brutalement eut raison d'elle, et prête à se battre. Mais ça n'arriverait pas. Ce poison, que Kaspar avait sans doute élaboré pour les Dévoreurs, avait la capacité de réussir ce qu'aucune arme n'arrivait vraiment à faire, - à part la grenade ou la bombe qui éparpillait et ventilait façon puzzle sans espoir d'y échapper, bien sûr -, : tuer un Znūntāk.

Non loin de lui, dans son sommeil agité de visions funestes, Dresden murmura le nom de sa Kachnefer, tandis que Aren lui passait un linge humide sur le front. Wira observa ses gestes attentifs et éprouva une sensation étrange qu'il n'identifia pas, trop occupé à remâcher sa colère et sa peine.

Alya était morte. Il n'avait pas pu la sauver. Bien sûr, il n'était pas aussi triste que s'il l'avait vraiment aimée, mais elle avait été sa maitresse autant que son amie, et il rêvait de la venger. Lui, si peu enclin à la violence d'habitude, aurait aimé être aux côtés de la Matriarche à lancer des hordes d'animaux dangereux sur l'ennemi.

De notre sangOnde histórias criam vida. Descubra agora