93 / Proposition indécente ?

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— Tu penses à lui ?

— À qui ?

— À Aren.

— Aren ? Non, j'écoutais le chant des scorpions, répondit Wira distraitement.

— Vraiment ? Et bien, je te croyais plus attaché à lui.

— Attaché à Aren ? Mais il ne fait même pas partie de ma communauté ! Je le respecte beaucoup, mais je suis plus inquiet pour mes amis et Alya, que je n'ai pas revus depuis notre départ des îles.

— Alya ?

— Ma... compagne.

— Ta compagne... tu m'en diras tant.

Wira ne releva pas le ton un peu moqueur. Il avait d'autres préoccupations. Car contrairement à ce qu'il disait, il s'inquiétait beaucoup pour Aren. Cela faisait plus d'une journée qu'ils l'avaient laissé derrière eux. Le fait que plus personne ne les suive indiquait qu'il avait réussi. Mais à quel prix ? S'était-il fait prendre pour ne pas les rejoindre aussitôt ? Avait-il décidé de prendre un autre chemin ? Mais il ne savait pas quelle était la destination finale... Tout ceci travaillait beaucoup Wira. Beaucoup trop, à vrai dire. Il avait décidé d'agir la veille, mais il était sans nouvelle de ses messagers...

— Que chuchotes-tu comme ça ?

— Je discute avec les scarabées et les oiseaux.

— Allons bon... et qu'ont-ils d'intéressants à te dire ?

Wira fronça les sourcils. Personne ne lui posait jamais ce genre de questions. D'abord, parce que la plupart des gens se fichait royalement de ce que les animaux avaient à dire. Ensuite, parce que ce serait s'immiscer dans une conversation qui ne regardait que lui. Wira devint soudain suspicieux.

À aucun moment, il n'avait remis en cause la légitimité de Médjès. Il l'avait même trouvé sympathique. Mais brusquement, il se demandait s'il n'avait pas eu tort. Et si le plan du nomade avait été de se séparer de Aren, dont le don était très fort ? D'isoler Wira, dont le don lui paraissait dérisoire, afin d'amener un Znūntāk vivant aux Dévoreurs ? Non ! C'était impossible ! Médjès avait essayé de dissuader Aren de rester en arrière...

— Vas-y crache le morceau, lança Médjès. Je vois bien que tu cogites. Et vu ton regard, j'imagine que ça n'est pas à mon avantage.

— Pourquoi veux-tu savoir ce que disent les scarabées et les oiseaux ?

— Parce que je m'intéresse à ton don.

— Et pourquoi t'intéresses-tu à mon don ?

— Parce que tu me plais, laissa tomber Médjès en attisant le feu sans rien ajouter.

De l'autre côté des flammes, Wira voyait maintenant miroiter la noirceur des pupilles du nomade. Il était stupéfait. C'était étrange cette capacité qu'avait certaine personne d'exposer leurs sentiments sans honte. Lui en était dépourvu. Enfin, il le pensait. Il n'avait jamais eu à faire quoi que ce soit de ce genre. Il ne s'intéressait pas suffisamment aux hommes et aux femmes qui l'entouraient pour ça.

Alya s'était imposée à lui, et il l'avait laissée faire. Médjès avait-il l'intention d'en faire autant ? Et qu'est-ce que cela faisait de lui ? Une girouette ? Une chose était sûre, il n'avait de sentiments profonds, ni pour Alya, ni pour Médjès. Il n'était même pas attiré physiquement par eux. Leurs odeurs lui étaient indifférentes. Il avait de la sympathie, c'était tout. Il se trouvait donc dans une situation un peu trop complexe pour lui.

— Je t'ai dit que j'avais une compagne ?

— Oui. Alya. Mais tu ne l'aimes pas, n'est-ce pas ?

— Pourquoi dis-tu ça ?

De notre sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant