TENEBRIS LUMINA : L'Arbre de Vie [INTÉGRALE]

24 - Rédemption

— Je comprends ton jugement, je comprends ton choix et je mentirai si je te disais que cela ne m'affecte pas. Cependant, je ne peux nier le fait que je me sentirais soulagé de savoir notre enfant en sécurité, dans une famille aimante, respectée et aux ambitions bienveillantes.

Ces quelques mots, que je lui dis, avant que nous ne nous disions adieu pour toujours, restent ancrés dans ma mémoire trente ans plus tard. J'ai vieilli avec mes cicatrices, et j'ai choisi d'éteindre ce qui me faisait souffrir, pour devenir Baralf le Brutal, le Mage dédaigneux et dangereux, qui pille, émet des contrats douteux et tue sans une once de pitié.

Le fait de retrouver mon humanité, veut aussi dire retrouver mes souvenirs. Je l'aimais, suffisamment fort pour la laisser partir, pour accepter l'abandon. J'espérais qu'elle vive heureuse, longtemps et que jamais, elle ne regarde en arrière.

Le destin est parfois vicieux, trompeur et rieur. La femme pour qui j'aurais donné ma vie a été tuée par mes hommes, sous les yeux de notre propre enfant. Je ne peux regretter mes choix jusqu'alors, même si j'ai brisé Gabriel, même si j'ai détruit des vies. Il convient d'assumer ses actes jusqu'au bout, même les plus difficiles à avouer.

Je fixe l'arme à feu que je garde dans ma main, je me souviens la fois où je l'ai achetée à un marchand d'outre-mer pour quelques Stozars. Gabriel était si heureux d'avoir enfin son propre revolver, lui qui a des gênes de Paria est capable d'utiliser les armes à feu comme personnes d'autres. Avant de lui offrir cette arme dix ans plus tôt, j'ai longuement hésité. Je préférais cacher ses gênes, pour lui éviter de se poser toutes questions sur ses origines.

— Baralf ? Ohé, je te parle, grommelle Gabriel.

Je me redresse et tourne la tête vers lui. Il enfile tout juste son plastron que Fred lui attache dans le dos.

— Où sont Kira et Selene ? interroge Gabriel. Et il est où, le Roi ressuscité avec ses cheveux soyeux ?

— Kira souhaitait s'adresser à son peuple avant que nous ne rejoignions Atya, rétorque Aowyn. Tu n'écoutes pas ce qu'on te dit ?

Gabriel lui jette un regard.

— Je t'ai pas adressé la parole, traître.

— On est tous des traîtres ici.

— Et toi t'es le pire de ton espèce.

— Tu travaillais pour moi, dois-je te rappeler que tous les Stozars que tu as gagné venaient de moi ?

— On s'en fout, peste Fred en se postant à côté de Gabriel. Maintenant, on n'est plus à la merci de personne. Gardez votre énergie pour le combat, Aowyn, on compte sur vous, montrez enfin que vos pouvoirs ne sont pas qu'une légende.

Gabriel sourit, fier de son ami. Ils ont toujours été proches tous les deux.

— Écoutez-vous parler, grommelle Artus.