TENEBRIS LUMINA : L'Arbre de Vie [INTÉGRALE]

12 - L'Antre de la Vérité

Selene

•••

Je reste immobile de longues secondes sous le jet d'eau qui arrose mes cheveux et mes épaules. L'eau coule sur mon visage, alors je garde les yeux fermés, soulagée par la chaleur qui m'enivre. Grâce à leurs pouvoirs, ici, l'eau reste constamment chaude.

Je sais qu'à la ferme, je la faisais bouillir avant de la mettre dans la cuve, mais si je restais trop longtemps, l'eau devenait froide à force d'être pompée.

Je détends mes clavicules et pousse un profond soupir. Avec tout ce qu'il s'est passé en si peu de temps, mes muscles sont raides, j'ai quelques hématomes sur le corps et surtout, j'ai mal au cœur, terriblement mal au cœur.

Lorsque je rouvre les yeux, je sens mes larmes rouler sur mes joues, sans retenue, sans contrôle. Je suis enfin seule face à moi-même et la peine qui m'habite est trop grande pour l'ignorer. Je passe mes mains dans mes cheveux avant de laisser les sanglots m'envahir de toutes parts. Je suis submergée par toutes les émotions que j'ai refoulée jusqu'à présent. Je suis si fatiguée, si en colère...

Comment une vie peut-elle être réduite à néant si rapidement ? Alors je pleure, encore et encore. Je pose une main sur ma poitrine compressée par ma tristesse et l'autre sur ma bouche, afin de faire le moins de bruit possible.

Je revis ce kidnapping traumatisant, je revois ces créatures immondes, ces morceaux de corps démembrés, j'entends de nouveau la voix de Baralf, puis l'image de mon père inerte sur son lit, la sensation de son corps dur et froid sous mes mains... c'est le fléau qui meurtri mon âme. Certains ne sont pas attachés à leurs parents, ils ne rêvent que d'une chose : les quitter le plus rapidement possible. Pour moi, mon père était une figure paternelle certes mais également un ami, à qui je me confiais, avec qui je rigolais et partageais les moments de joie comme de peine. Il ne m'a jamais abandonnée, il m'a toujours épaulée, encouragée. Me voilà dépourvue de famille. Je finirai par errer seule si je ne parviens pas à le ramener.

Je ne peux cesser de me dire que si l'Arbre de Vie péri, Atya périra aussi. Nous, ses habitants, finiront comme ces hommes et femmes il y a des siècles : morts, esclaves d'un Mal puissant et destructeur. Nous nous réveillerons, éternels, nous serons guidés par les pouvoirs des Ténèbres.

Je sors enfin de la douche, je m'enroule dans une serviette, mes cheveux gouttent encore puis je passe ma main sur le miroir pour y enlever la buée qui s'y est installée. Je me regarde un instant, mes yeux sont cernés, le contour rougis par mes larmes qui ne coulent plus. Je déglutis, inspire profondément, expire lentement par la bouche...

Ne montre pas tes faiblesses à ces hommes, Selene.

Je sors de la salle de bain, Gabriel et Fred sont assis au bord du lit, ils arrêtent de discuter lorsque je sors et me jettent un regard. J'espère qu'ils ne m'ont pas entendu pleurer.

—  L'un de vous peut y aller.

—  Super, il est temps de me décrasser, sentir le Wealer... ce n'est clairement pas à mon avantage.

Gabriel passe à côté de moi et ferme la porte derrière lui. Je vois que Fred semble déçu et inquiet. Je tiens ma serviette puis penche la tête sur le côté alors que lui fixe le vide.

—  Est-ce que tout va bien ?

—  Hoestrid est entrée dans l'esprit de Gabriel.

Je croyais qu'il maîtrisait la situation.

—  Oh...

—  Elle sait donc que Baralf te voulait pour te vendre à Aowyn.

Je hausse les sourcils.